2:36
  • Copié
Nicolas Beytout
Le gouvernement peaufine toujours sa réforme des retraites, débattant notamment du rythme de son application. D'après notre éditorialiste Nicolas Beytout, l'exécutif cherche déjà à reculer sur certains points de la future loi... mais ne veut surtout pas perdre la face. 

>> Emmanuel Macron a reçu tous les ministres concernés par la réforme des retraites dimanche à l’Elysée. Ils avaient vu Edouard Philippe plus tôt dans l’après-midi. Cette intense activité dominicale se prolonge mardi, puisque le chef de l’Etat recevra à nouveau ses ministres, cette fois lors d’un déjeuner élargi aux les responsables de la majorité. Tout cela donne une indication assez claire : il y a débat au sommet du pouvoir. 

Le débat, au sein du gouvernement a lieu sur l'un des points cruciaux de la réforme des retraites : le rythme de son application. Et ce débat porte en particulier sur deux points. Premièrement, sur le retour à l’équilibre de l’actuel régime. Un retour sur lequel s’est engagé Emmanuel Macron et qui devait être réalisé avant la mise en place du nouveau régime de la retraite à points. Sauf que cette promesse du chef de l’Etat se heurte à un refus obstiné de la CFDT.

Débat sur la date d'entrée en vigueur

Or, vu l’ampleur des manifestations de jeudi dernier, et vu que la mobilisation semble se poursuivre chez les grévistes, l’urgence est désormais de désolidariser le front syndical. Certains, au sein du gouvernement, défendent donc l’idée qu’il faut repousser dans le temps le retour à l’équilibre.

 

>> Retrouvez la matinale du jour de Matthieu Belliard en replay et en podcast ici

 

Le second point de désaccord porte, comme il fallait s’y attendre, sur la date d’entrée en vigueur de la réforme, en particulier pour les régimes spéciaux. Ce qui semble déjà acquis, c’est qu’elle ne s’appliquera pas à partir de 2025, comme prévu initialement. Cela permettrait de donner un gage au principal syndicat de la RATP, avec toujours le même objectif de fragiliser le bloc syndical. La réforme des retraites pourrait finalement entrer en vigueur dans 10, 15 voire 30 ans, tous les schémas circulent…

"Jusqu'où on cède ?"

C’est d’ailleurs incroyable de penser qu’on en est là, que la réforme n’a même pas encore été présentée dans sa globalité, mais que le gouvernement est déjà en train de reculer sur plusieurs de ses aspects essentiels. Car nous n’en sommes plus au débat de savoir s’il faut tenir ou ne pas tenir. La question, désormais, c’est plutôt : "combien on lâche, jusqu’où on cède ?". Le débat, c’est comment gagner un armistice social sans perdre une bataille politique.

Soit Emmanuel Macron fait quelques menues concessions, par exemple sur l'équilibre financier du régime ou la date d’entrée en vigueur de la réforme des régimes spéciaux, mais il parvient à ne pas dénaturer la réforme, ou en tout cas à en donner l’illusion. Soit le chef de l’Etat joue la montre, il dilue la réforme, la repousse carrément dans le temps, et tout le monde comprendra qu’il a renoncé à son ambition réformatrice. Il entamera alors son crédit politique, auprès de ses électeurs, bien sûr, mais aussi auprès des sympathisants de la droite qui soutiennent massivement sa réforme. Un mauvais calcul.