Cumul des mandats : Région ou Assemblée, l’heure du choix

PATRICK KOVARIK / AFP xaver bertrand valerie pecresse
© PATRICK KOVARIK / AFP
  • Copié
, modifié à
En vertu de la loi sur le cumul des mandats, certains candidats élus dimanche soir, dont des présidents de région, vont devoir faire des choix. Au moins six législatives partielles vont avoir lieu.

Après les élections régionales, l’heure du choix. En effet, nombre d’élus, qu’ils soient de futurs présidents ou de futurs conseillers régionaux, vont devoir choisir, en vertu de la loi sur le cumul des mandats, quelle fonction élective ils choisissent. Certains avaient annoncé leur choix avant les élections, d’autres se donnent du temps pour trancher ou n’ont pas fait connaître leur choix. Europe1.fr fait le point.

  • Ce que dit la loi

A l’heure actuelle, un parlementaire peut exercer au maximum un mandat dans une assemblée locale, que ce soit un conseil régional, départemental ou municipal. Par ailleurs, le président de l’une de ses instances ne peut pas en parallèle être le chef d’une autre. Pour exemple, Valérie Pécresse, future président d’Ile-de-France, ne pourrait pas présider un conseil départemental ou être maire. Mais elle peut rester députée. En revanche, la loi ne dit rien au sujet des ministres.

La loi va se durcir au 31 mars 2017, après les prochaines législatives. Après cette date, un parlementaire ne pourra plus être maire (ni adjoint) d’une ville de plus de 1.000 habitants, ni président (ou vice-président) d’un conseil régional ou départemental. Certains ont décidé d’anticiper cette nouvelle réglementation, d’autres de rester jusqu’à ce que la loi les contraigne à partir.

  • Ils quittent l’Assemblée

Valérie Pécresse l’avait annoncé de longue date. Si elle était élue président de la région Ile-de-France, ce qui est le cas, elle quitterait son mandat de députée des Yvelines. "Valérie Pécresse, c’est zéro privilège, zéro cumul", disait encore dimanche son porte-parole, Geoffroy Didier. L’ancienne ministre de l’Enseignement supérieur l’a confirmé sur Twitter. Du coup, une législative partielle devra avoir lieu dans la 2e circonscription des Yvelines.

Idem dans la 2e circonscription de l’Aisne, bientôt laissé vacante par Xavier Bertrand. Le futur président de la région Nord-Pas de Calais Picardie a lui aussi toujours été très clair : il quittera tous ses mandats en cas de victoire. Plus de mandat de député donc, plus non plus de mandat  de maire de Saint-Quentin, même s’il restera conseiller municipal pour, dit-il, "garder ce lien avec le terrain". A noter également que l’ancien secrétaire général de l’UMP ne s’interdit pas de participer à la primaire de la droite en 2016. Il doit se prononcer avant Noël.

Même trajectoire à prévoir pour Christian Estrosi. Le futur président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur doit juridiquement abandonner l’un de ses mandats de député ou de maire de Nice. Mais il pourrait aller plus loin. "Je ne serai plus député en 2016, dès lors que les habitants de cette région m'auront fait confiance. Dès mon élection, je quitterai l'Assemblée nationale. Et en même temps, bien évidemment, je ne pourrais pas exécuter la présidence de deux exécutifs", assurait-il en avril à La Provence, laissant entendre qu’il quitterait son siège de maire de Nice. Reste à savoir s’il respectera sa promesse, puisqu’il n’a pas abordé le sujet récemment. Mais là encore, une législative partielle dans la 5e circonscription des Alpes-Maritimes est à attendre.

A plusieurs reprises, Hervé Morin l’a lui aussi promis. Futur président de la région Normandie, l’ancien ministre de la Défense devra donc quitter son mandat de parlementaire. Il n’a en revanche rien dit de son poste  de maire d’Epaignes, dans l’Eure, un village de moins de 1.500 habitants. Les électeurs de la 3e circonscription de l’Eure seront donc sous peu appelés aux urnes pour une législative partielle.

François Sauvadet avait lui fait encore plus fort que ses comparses. L’ancien ministre de la Fonction publique, membre de l’UDI, avait annoncé que quoi qu’il arrive en Bourgogne-Franche-Comté il abandonnerait son mandat de parlementaire. Battu, il devra se plier à sa promesse. L’actuel député de la 4e circonscription de Côte d’Or - où il y aura donc une partielle - préfère donc se consacrer à son territoire, dont il préside le Conseil départemental.

Enfin, il y aura (au moins) une sixième législative partielle, puisque Gérald Darmanin, maire Les Républicains de Tourcoing, a annoncé qu’il préférait son nouveau siège de conseiller  régional à celui de député du Nord. Un autre élu a pris une décision radicalement différente. Louis Aliot, vice-président du FN, favorise lui son mandat de député européen et son siège de conseiller municipal de Perpignan à sa nouvelle fonction. Pour celui qui était bien placé au soir du premier tour pour remporter la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, c’était donc président ou rien.

  • Ils restent parlementaires

Quatre futurs présidents de région quitteront donc l’Assemblée, donc, quatre au moins comptent bien rester jusqu’au bout de leur mandat parlementaire. Contraint de choisir entre le siège de député de Haute-Loire et la mairie de Puy-en-Velay, Laurent Wauquiez, futur président d’Auvergne-Rhône-Alpes, a choisi le premier.

Les autres futurs présidents de région concernés par le cumul n’auront pas de sacrifices à faire, puisqu’ils ne sont pas maires. Alain Rousset, futur président de la nouvelle région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente, est déjà en situation de cumul, puisqu’à la tête de la région Aquitaine et député de Gironde. L’homme devrait en toute logique opter pour le statu quo. Idem pour Carole Delga (Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées), députée de Haute-Garonne et Bruno Retailleau (Pays de la Loire), sénateur de Vendée, qui ont tous deux annoncé leur volonté de rester parlementaires jusqu’en 2017.

  • L’exception Le Drian

Légalement, rien ne contraint Yves Le Drian à choisir entre le ministère de la Défense et la présidence de la région Bretagne. Mais moralement, la question se pose. A son élection, François Hollande avait été très clair en la matière et avait même édicté une charte à l’endroit de ses ministres. "Les membres du gouvernement consacrent tout leur temps à l’exercice de leurs fonctions ministérielles. Ils doivent, de ce fait, renoncer aux mandats exécutifs locaux qu’ils peuvent détenir", peut-on y lire.  Pourtant, l’ancien maire de Lorient va bel et bien cumuler. "Les Bretons ont voté pour moi en toute connaissance de cause. J'ai annoncé la couleur très clairement", a assumé celui qui a recueilli 51,4% des suffrages en Bretagne, dans le cadre d’une triangulaire.

"Je ne serai pas ministre de la Défense à mi-temps, je serai ministre de la Défense dans la plénitude de mes fonctions", a-t-il répété à RTL au lendemain des régionales. "J'ai auprès de moi à Rennes une équipe qui est prête à assurer la complémentarité de mes fonctions (..) Elle m'a aidé pendant la campagne et va m'aider encore", a-t-il ajouté. "En ce moment il y a une situation particulièrement dramatique, tragique, tendue et en période d'état d'urgence il est difficile pour le président de la République de dire à son ministre de la Défense ‘tu arrêtes’", a-t-il relevé.

  • Un grand flou

Il y aura donc, probablement avant le printemps 2016, six législatives partielles. Mais ce nombre pourrait augmenter. Car pas moins de 107 députés et 52 sénateurs étaient candidats aux régionales, selon un décompte réalisé début décembre par Libération. Si certains n’étaient que parlementaires et d’autres pas en position éligible, nombreux sont ceux qui cumulaient déjà leur mandat avec une fonction élective locale. Citons le FN Stéphane Ravier, sénateur et maire de secteur à Marseille, ou Les Républicains Eric Woerth, député-maire de Chantilly et Marc-Philippe Daubresse, député-maire de Lambersart, dans le Nord.

  • Pour eux, la question ne se pose pas

Certains futurs présidents de région n’auront pas de cas de conscience, puisque leur victoire de dimanche leur offre leur seul mandat électif. C’est le cas de Philippe Richert, en Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, de Marie-Guite Dufay, en Bourgogne-Franche-Comté, et de François Bonneau, en Centre-Val de Loire.