Romero : "Il faut que les politiques disent leur homosexualité"

© Europe 1
  • Copié
Fabienne Cosnay , modifié à
INTERVIEW E1 - Pour Romero, Stéphane Bern n'aurait pas dû révéler l'homosexualité de Geoffroy Didier.

Le débat. L'animateur Stéphane Bern a-t-il dépassé les bornes en révélant sur le plateau de l’émission de Canal+ "Salut les terriens" l’homosexualité de Geoffroy Didier, le cofondateur à l’UMP du mouvement de la Droite forte ? Pour Jean-Luc Romero, premier politique à avoir été victime d'un "outing" en France, la réponse est "oui". "Je ne suis pas favorable à ce que quelqu'un dise votre homosexualité à votre place", a réagi lundi dans Le grand direct des médias le conseiller régional d'Ile-de-France  (apparenté PS). S'il comprend que le "outing" puisse être tentant face à l'attitude de certains - " je peux comprendre que, parfois, vis-à vis de certains responsables politiques qui tiennent des propos homophobes et qui sont eux-mêmes homosexuels, on ait parfois envie de le dire", Jean-Luc Romero considère que cela peut être dangereux. "Il faut faire attention et laisser la personne le dire elle-même", estime t-il.

Pour rappel. "Non, mais Geoffroy n'assume pas sa sexualité !", a lancé Stéphane Bern, en présence de Geoffroy Didier, dans l'émission de Thierry Ardisson. Avant d'ajouter : "Tout le monde sait qu'il est homo, mais il dit qu'il est hétéro. Sur le plateau, le cofondateur de la Droite forte répond mollement. Mais sur Twitter, vendredi, avant même la diffusion de l'émission, l'intéressé déplore des "propos mensongers et choquants". "J’assume mon hétérosexualité, personne n’est parfait", écrit-il sur le réseau social.

>>> Jean-Luc Romero avait gagné son procès. Une première.

Romero avait, lui aussi, été "outé". Jean-Luc Romero a été le premier homme politique à avoir été victime d'un "outing". "Je l'ai vécu alors que je devais le faire moi-même dans un journal quelques jours plus tard et je trouvais que c'était ma propre responsabilité", s'est remémoré Jean-Luc Romero sur Europe 1. Pendant la campagne pour les municipales à Paris, en octobre 2000, le magazine gay E. Mâle avait révélé que le conseiller régional RPR d'Ile de France était homosexuel. "On m'a empêché de faire très dignement ce qu'a fait Bertrand Delanoë", regrettait Jean-Luc Romero, interrogé par France 2 peu après cet "outing".

Des sanctions possibles ? Le "outing" est condamnable, rappelle l'avocat Roland Perez. "Le dévoilement de l’orientation sexuelle par autrui peut constituer une atteinte à la vie privée", précise le conseil. "A partir du moment où Geoffroy Didier n'a jamais parlé de quoique ce soit sur sa sexualité, il peut poursuivre et obtenir des dommages et intérêts", conclut Roland Perez.

Le précédent Romero en justice. Après la révélation de son homosexualité, Jean-Luc Romero avait porté plainte et avait gagné son procès contre le magazine gay qui l'avait "outé". Une première en France. Dans l'article incriminé, le journaliste écrivait que Philippe Seguin cherchait pour le quartier gay du Marais "un profil tout à fait particulier" pour plaire à la communauté homosexuelle et citait Jean-Luc Romero, "homosexuel lui-même". Si le journaliste a eu raison de "mettre en exergue l'adéquation entre les idées défendues par Jean-Luc Romero et les combats menés par la communauté homosexuelle, il n'impliquait pas pour autant de faire état de (son) homosexualité sans son consentement", avait estimé la cour d'appel de Paris pour justifier sa décision. Le conseiller régional avait obtenu 3.000 euros de dommages et intérêts.