Le double crime de Montigny-lès-Metz pourrait rester impuni

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Administrator User , modifié à
Les meurtres d'Alexandre Beckrich et Cyril Beining en 1986 à Montigny-lès-Metz, jadis imputé à Patrick Dils, pourraient rester à jamais un mystère car la nouvelle instruction menée contre le tueur en série Francis Heaulme se dirige vers un non-lieu. Le juge d'instruction de Metz révèle qu'il n'a pas trouvé d'élément matériel ou de preuves contre Francis Heaulme.

"C'est triste à dire, mais on n'a plus de piste. On va bien être obligé de faire un non-lieu. Avec les délais légaux, je ne vois pas ça avant septembre". Ce sont les déclarations publiques dans Le Républicain lorrain et Le Monde du juge d'instruction de Metz Thierry Monfort, chose rare car en principe illégale en raison de la règle du secret de l'instruction. Il souligne qu'il n'a pas trouvé d'élément matériel ou de preuves contre Francis Heaulme, mis en examen le 9 juin 2006 pour les homicides d'Alexandre Beckrich et Cyril Beining, deux enfants de huit ans tués à coups de pierres sur un talus SNCF de Montigny-lès-Metz en Moselle. La recherche d'empreintes génétiques des victimes sur un pantalon que le tueur en série aurait pu porter en 1986, saisi 21 ans après les faits chez sa grand-mère, n'a rien donné. "Aujourd'hui, j'ai le sentiment d'avoir brûlé ma dernière cartouche", dit le juge à ce propos. Il rappelle avoir envoyé des enquêteurs rechercher des témoins dans toute la France et raconte que le plancher du domicile de la grand-mère de Francis Heaulme, chez qui il résidait, a été arraché en vain, à la recherche d'empreintes génétiques. Francis Heaulme, condamné à sept reprises dont deux fois à perpétuité pour des meurtres, a refusé de participer à une reconstitution sur le talus SNCF, ajoute-t-il. "Heaulme ne nous a laissé aucun élément matériel, nous n'avons pas même un témoignage. De toute façon, on ne construit pas un dossier sur des aveux", dit-il. Les parties civiles, qui restent convaincues de la culpabilité de Francis Dils, ont pris argument des dernières expertises génétiques négatives pour demander un non-lieu et suggérer la réouverture du dossier Dils. Patrick Dils, âgé de 16 ans à l'époque des faits, avait été condamné à perpétuité en 1989, sur la base d'aveux qui sont aujourd'hui jugés extorqués, avant d'être innocenté en 2002 à l'issue d'un procès en révision en appel à Lyon. Les gendarmes avaient estimé dans une contre enquête que l'affaire portait "la quasi-signature criminelle" de Francis Heaulme, en raison de similitudes dans le mode opératoire. L'enquête avait par ailleurs établi que Francis Heaulme travaillait à l'époque des faits dans une entreprise située à 400 m des lieux du crime, dont il avait été licencié juste après les faits en raison d'un comportement perturbé. Francis Heaulme, tout en niant le crime, a dit dans plusieurs dépositions avoir été présent sur les lieux et avoir vu les enfants, qui lui auraient jeté des pierres, dit-il. Deux témoins entendus à Lyon ont dit avoir aperçu le tueur en série couvert de sang le jour des faits, ce qu'il a confirmé lui-même à la barre, affirmant être tombé de vélo. "On ne veut pas que le calvaire des familles continue. Nous demanderons la révision du procès de Lyon", a dit Me Dominique Rondu, avocat de la famille Beckrich, reconnaissant toutefois qu'une telle décision de révision d'un acquittement est juridiquement impossible en l'état actuel de la loi. L'ancien avocat de Patrick Dils, Me Jean-Marc Florand, a qualifié mercredi "d'élucubrations juridiques" la demande de réouverture des poursuites contre son ex-client.