Chômage : moins pour les hauts salaires ?

En vue de 2012, pour l'UMP, Bruno Le Maire propose une baisse des indemnisations. Un bon calcul ?
En vue de 2012, pour l'UMP, Bruno Le Maire propose une baisse des indemnisations. Un bon calcul ? © REUTERS
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et Fabien Cazeaux , modifié à
En vue de 2012, l'UMP Bruno Le Maire propose une baisse des indemnisations. Un bon calcul ?

Chargé de réfléchir au programme présidentiel de Nicolas Sarkozy en vue de 2012, Bruno Le Maire avance une idée, pas totalement neuve, mais qui fait déjà causer. Dans un entretien à L'Express publié mercredi, le ministre de l'Agriculture propose de revoir à la baisse les allocations chômage accordées aux cadres supérieurs.

Le ministre s'interroge ainsi sur la capacité de la France à "garder un dispositif d'indemnisation chômage parmi les plus généreux au monde". Pour Bruno le Maire, le redressement des finances publiques suppose des "décisions courageuses". Dont celle-ci, qui pourrait pourtant se révéler à double tranchant.

Une idée pas nouvelle à l'UMP

Le débat sur l'indemnisation des hauts salaires n'est pour autant pas totalement nouveau. L'idée d'un coup de rabot avait récemment été soulevée par un autre UMP. En janvier dernier, le président UMP de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, Pierre Méhaignerie, avait en effet jugé "excessive" l'indemnisation du chômage en France, notamment pour les cadres, dans une interview au Figaro.fr. 

L'ancien garde des Sceaux, qui proposait "le redéploiement" d'une partie des économies réalisées vers "les jeunes", avait alors suscité une levée de boucliers chez les syndicats et à gauche. Sa proposition était ensuite restée lettre morte, jugée délicate à un moment où syndicats et patronat allaient renégocier la convention d'assurance chômage qui fixe les règles d'indemnisation des chômeurs pour deux ans.

"Un comble" pour Hollande

En remettant cette question sur la table, Bruno Le Maire risque donc de s'attirer les mêmes foudres que son collègue de l'UMP. Interrogé par Europe 1 mercredi, le favori dans la course à la primaire PS, François Hollande, a d'ailleurs déjà vivement critiqué cette proposition. "Il peut toujours y avoir des réformes, des améliorations, mais considérer aujourd'hui que les chômeurs coûtent trop cher, comme hier les RSA étaient des fraudeurs potentiels et les assurés sociaux des faux-malades et les retraités des bien portants qui pouvaient travailler encore plus longtemps, ce n'est pas ma conception de la solidarité", a expliqué le député de la Corrèze.

A un moment où "on épargne les plus riches de toutes les contributions, dire que c'est vers les chômeurs qu'il faut tourner la tête pour demander de la solidarité, c'est un comble", s'est-il par ailleurs indigné.    

Un double mauvais calcul ?

Et d'un point de vue économique, la proposition de Bruno Le Maire soulève également des interrogations. Le plafond des allocations chômage est fixé en France à 5.800 euros. L'allocation chômage est proportionnelle au salaire touché pendant la dernière année travaillée. Environ 75% du salaire pour ceux qui gagnent jusqu'à 3.200 euros par mois et 57% pour les ceux qui sont dans la fourchette supérieure.

Comparé avec nos voisins européens, le plafond français de 5.800 euros est plus élevé. Mais dans les autres pays, si le montant maximum est plus bas, on perd moins au chômage par rapport au salaire qu'on touchait (75% maximum en France contre 90% au Danemark ou 80% en Suisse), ce qui fait dire aux syndicats que l'idée de rogner sur les allocations chômage en France, est une fausse bonne idée.

Le calcul est par ailleurs risqué sur le plan politique et qui pourrait faire mouche quelques mois à peine après la proposition très polémique de Jean-François Copé de durcir les conditions du RSA, et celle de Laurent Wauquiez d'instaurer une contrepartie aux minimas sociaux. Qui plus est, en visant les cadres supérieurs, un électorat traditionnellement à droite, l'UMP prend aussi un risque politique à quelques mois de la présidentielle.