INTERVIEW- «Je comprends ce combat mais je ne peux pas être féministe», assure Hélène de Fougerolles

Hélène de Fougerolles incarne le rôle de Camille dans "Les disparus de la forêt noire" © TF1
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Solène Delinger , modifié à

Féminisme, mouvement MeToo, Harvey Weinstein, polyamour… A l'occasion de la diffusion sur TF1 des premiers épisodes de la série "Les Disparus de la Forêt Noire", jeudi 5 janvier, Hélène de Fougerolles s'est confiée sans langue de bois à Europe 1. Interview. 

Hélène de Fougerolles fait son grand retour sur le petit écran jeudi 5 janvier avec la diffusion sur TF1 des premiers épisodes de la mini-série Les Disparus de la Forêt Noire. L'actrice de 49 ans y incarne le rôle de Camille Hartmann, une juge d'instruction mise sur la touche après un accident de voiture. La découverte d'un charnier sur une base militaire franco-allemande va raviver en elle des souvenirs très troublants. Très vite, on comprend que cette affaire est liée à l'accident qui lui a fait perdre la mémoire un an plus tôt. Totalement déboussolée, Camille va tout faire pour découvrir la vérité, aux côtés d'Eric Maes, l'inspecteur franco-allemand en charge de l'affaire, interprété par Grégory Fitoussi.

Pour Europe 1, Hélène de Fougerolles s'est longuement confiée sur son rôle dans la série, son rapport au féminisme mais aussi sa rencontre avec le producteur Harvey Weinstein, condamné pour viol et agression sexuelle.

Il y a un propos féministe dans la série. Cela vous a-t-il séduit ? 

Je dirais que ça a été un plus, qu'il y avait du fond. Ce n'était pas juste un polar avec des cadavres. Je ne suis pas féministe moi-même, je n'ai pas un combat à mener avec ça, mais je l'entends et je trouve que la série nous emmène subtilement à nous poser des questions. Car nous ne sommes pas toutes logées à la même enseigne. J'ai beaucoup joué de mes atouts et de ma féminité pour obtenir des choses. Se sentir désirable, c'est le propre de mon métier d'actrice. Et j'en ai toujours joué pour pouvoir être engagée et gagner ma vie. Donc, je ne peux pas être féministe. Mais à côté de ça, j'entends très bien qu'il y a des femmes qui se sont senties abusées, ou dont on a abusées. Je le comprends et j'en suis désolée aussi. Mais je n'irai pas au combat avec elles, je ne suis pas portée par ça. 

"J'ai eu la chance de tomber sur un producteur un peu libidineux"

Quelle a donc été votre perception du mouvement MeToo, lancé par des actrices qui ont brisé l'omerta sur les agissements du producteur Harvey Weinstein ?

Comme je vous l'ai dit, j'ai beaucoup usé et abusé de ma féminité. J'ai rencontré Harvey Weinstein  aussi. Et je n'y suis pas allée en jogging. Après, j'ai eu la chance de tomber peut-être sur un producteur un peu libidineux, mais il n'y avait pas de quoi aller porter plainte. Je comprenais qu'il aurait bien voulu…  Moi, j'aime bien me sentir désirée. Je ne me suis jamais sentie victime de ça. Des hommes ont pu être lourdauds avec moi mais on n'a jamais dépassé la limite. J'ai de la chance et je touche du bois.

Avez-vous des craintes pour votre fille, âgée de 19 ans ? 

J'ai tout blindé, donc ça va être difficile qu'il lui arrive quelque chose. Ça veut dire que même si un mec commence à être un peu désagréable, il est crucifié dans la seconde (rires). Je suis une dragonne. Donc je n'ai pas peur puisque tout est sous contrôle. 

Vous êtes une actrice connue pour être lumineuse et solaire. Alors, pourquoi avoir accepté de jouer dans Les Disparus de la Forêt Noire, un polar hivernal particulièrement sombre ? 

C'est précisément une des raisons pour lesquelles j'ai accepté de faire cette mini-série. J'avais demandé à mon agent de théâtre de faire un personnage un peu plus rustre, un peu plus âpre, un peu plus brut, c'est à dire avec moins d'artifices. J'étais partie vraiment sur quelque chose où c'était presque l'histoire qui était plus importante que le personnage lui-même. Dans cette série, on voit que je me débats avec ma mémoire et avec ma personne. Je n'arrive pas à remonter à la surface. Camille, le personnage que j'incarne, est sous l'eau. 

"Je suis célibataire par choix"

Dans la série, vous interprétez donc le rôle de Camille Hartmann, une juge d'instruction mise sur la touche après un grave accident de voiture. Elle a perdu la mémoire et on sent chez elle une grande fragilité et aussi beaucoup de frustration. Comment avez-vous fait pour rentrer dans la peau de cette femme brisée ? 

Je me suis amusée à imaginer que j'étais sous médicaments, donc d'avoir un temps de retard sur tout. Je me laisse habiter par quelque chose d'autre et, c'est ce que j'aime dans mon métier : vivre des vies qui ne sont pas les miennes. Par contre, quand c'est fini, je reprends mes habits, mes bijoux, mon maquillage et je me dis : "Ah ça m'avait tellement manqué". 

Pour finir, côté vie personnelle, où en est votre aventure de polyamoureuse ? 

J'ai adoré vivre cette aventure et je l'ai d'ailleurs vécue avec beaucoup de sincérité et d'honnêteté. Pendant un an, je me suis donné cette liberté qui a été extraordinaire à vivre parce que ça m'a ouvert l'esprit à plein de choses. Aujourd'hui, je suis célibataire par choix, parce que je suis dans une autre phase de ma vie. Ce n'est pas un rejet. C'est une envie de ne plus être attachée à une personne ou à plusieurs personnes. Avec le polyamour, il fallait créer des moments et ne pas donner plus à l'un qu'à l'autre. C'est encore fatigant (rires). A l'aube de la cinquantaine, je me sens bien seule, dans le Lubéron, avec mon chat sauvage.