Fausse affaire Garrido-Corbière : pour Mediapart, «Le Point» a «lâché son journaliste»

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Juliette Moreau Alvarez , modifié à
Invité au micro d'Europe 1 pour Culture médias, Antonn Rouget, journaliste à Mediapart, estime que le directeur du Point Etienne Gernelle doit "assumer" son rôle dans la fausse affaire Corbière-Garrido publiée puis retirée par l'hebdomadaire. Pour Antonn Rouget, Gernelle a "lâché en rase campagne son journaliste".

Les responsabilités doivent être prises : c'est ce qu'estime Antonn Rouget, journaliste à Mediapart et invité de l'émission Culture médias sur Europe 1 ce jeudi. Le Point a publié jeudi 23 juin, puis retiré une fausse accusation sur le couple d'Insoumis Raquel Garrido et Alexis Corbière affirmant que les députés exploitait une femme de ménage sans papier. En parallèle, Antonn Rouget a mené une contre-enquête pour Mediapart avec son collègue David Perrotin qui démontrait les failles du papier du Point. Les deux hommes soulèvent surtout l'importance de la responsabilité de la direction du Point dans cette affaire.

Gernelle en "capitaine du Costa Concordia"

"Pour moi, un responsable et directeur de rédaction doit assumer." Antonn Rouget déplore les propos tenus par Etienne Gernelle à la suite de cette fausse information. Il a "lâché en rase campagne son journaliste", estime-t-il. "J'avais l'impression d'entendre le capitaine du Costa Concordia qui prenait sa barque et s'en allait rapidement en laissant les autres couler."

Etienne Gernelle s'était exprimé pour la première fois sur cette affaire sur l'antenne d'Europe 1 lundi 27 juin. "Il y a un double enfumage", estimait le directeur de la rédaction du Point. Pour Gernelle, le journaliste Aziz Zemouri, auteur de l'article, "a perdu la raison et a enfumé sa hiérarchie sur au moins trois points : les entretiens qu'il a eu ou n'a pas eu, les documents qu'il a obtenu et la manière dont ils les a obtenus."

Le directeur du Point s'était également justifié : "si notre journaliste nous avait dit la vérité sur la manière dont il a obtenu ces documents, jamais l'article n'aurait été publié." Le responsable de la rédaction a enfin dénoncé "des gens qui ont essayé de monter une affaire qui n'existait pas".

Malgré ces propos envers la rédaction du Point, Etienne Gernelle avait fait son mea culpa et s'était excusé sur Twitter. "Nous reconnaissons notre erreur et nous faisons notre travail de journaliste vis-à-vis de nous-mêmes, comme l'ont fait par le passé Le Parisien, le New York Times et Le Canard enchaîné", avait-il ajouté sur Europe 1.

"La lâcheté" de la rédaction du "Point"

Après le rétropédalage du Point, le couple Garrido-Corbière avait notamment demandé le "licenciement immédiat" d'Aziz Zemouri. "Le tort causé est indélébile", avait tweeté Raquel Garrido.

Antonn Rouget officialise lui son soutien aux journalistes de la rédaction de l'hebdomadaire, se retrouvant au cœur de cette affaire : "J'ai une pensée sincère pour les journalistes qui font sérieusement leur travail au Point. Il y en a, et c'est finalement eux qui subissent les conséquences à la fois d'agissements de certains journalistes, qui étaient connus bien au delà de l'affaire Garrido-Corbière, et aussi de la lâcheté de leur propre direction."

Aujourd'hui, Rouget et Perrotin attendent de pouvoir interroger les premiers intéressés. Ils sollicitent actuellement Etienne Gernelle pour leur enquête sur les pratiques du Point.