Sursis pour un condamné à mort malade et amnésique

La Cour a estimé que l'évaluation psychologique d'un condamné à mort, Vernon Madison, qui devait être exécuté en 2018, avait été insuffisante pour pouvoir appliquer la sentence.
La Cour a estimé que l'évaluation psychologique d'un condamné à mort, Vernon Madison, qui devait être exécuté en 2018, avait été insuffisante pour pouvoir appliquer la sentence. © Andrew Burton / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP
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avec AFP
Un prisonnier condamné à mort de l'Alabama a obtenu une victoire symbolique mercredi. Il contestait son exécution car il ne se rappelait plus de son crime après plusieurs AVC.

La Cour suprême américaine a accordé mercredi une victoire symbolique à un prisonnier condamné à mort de l'Alabama qui contestait son exécution car il ne se rappelait plus de son crime après plusieurs AVC. La Cour a estimé que l'évaluation psychologique de Vernon Madison, qui devait être exécuté en 2018, avait été insuffisante pour pouvoir appliquer la sentence sans craindre d'enfreindre le 8ème amendement de la Constitution, qui interdit les punitions "cruelles".

Il ne se souvient ni de son crime, ni de son procès. Vernon Madison avait été condamné à mort en 1994 pour avoir abattu un policier neuf ans plus tôt. En 2015 et 2016, des accidents vasculaires cérébraux ont considérablement réduit ses facultés. Le sexagénaire est aujourd'hui quasiment aveugle, ne marche pas sans assistance et souffre d'incontinence. Sa mémoire est tellement abîmée qu'il ne se souvient ni de son crime, ni de son procès.

L'Alabama estime qu'il avait "une compréhension rationnelle". Lors de l'audience devant la Cour suprême en octobre 2018, ses défenseurs avaient demandé aux juges, qui avaient déjà interdit l'exécution de condamnés incapables de comprendre ce qui leur arrivait, notamment des psychotiques, d'élargir cette définition aux personnes souffrant de "démence". L'Alabama avait estimé au contraire que ne pas se rappeler de son crime n'était "pas suffisant" pour échapper à la peine de mort. Selon le procureur de l'Etat, Thomas Govan, Vernon Madison avait alors une "compréhension rationnelle" de la procédure judiciaire en comprenant qu'on l'accusait d'un meurtre et qu'il allait être exécuté pour cela.

La Cour surpême s'est rendue aux arguments de la défense. Dans sa décision, rendue à la majorité de 5 juges contre 3, la Cour suprême s'est rendue aux arguments de la défense, estimant que le 8ème amendement s'appliquait pour les cas de "troubles psychotiques" et de "démence". Ces deux états "peuvent - ou pas - empêcher la compréhension nécessaire d'un châtiment", ont expliqué les juges.

Le sort des condamnés vieillissant en question. Dans le cas de Vernon Madison, ils ont observé qu'un expert psychologue n'avait pas évoqué la démence dans son diagnostic en 2016, une erreur selon eux puisque la justice locale n'a pas fait la preuve de sa "compréhension rationnelle des motifs de sa condamnation à mort". La Cour a donc annulé la décision d'exécution et demandé à un tribunal de l'Alabama d'"évaluer la compétence de Vernon Madison et de s'assurer que s'il est exécuté, il comprenne pourquoi". Au-delà de ce cas particulier, la décision porte sur le sort des condamnés vieillissant dans les couloirs de la mort. En 2011, une centaine de condamnés à mort avait plus de 65 ans.