Que sait-on du "réseau" derrière l'attentat de Manchester ?

L'enquête progresse vite, une semaine après l'attentat de Manchester.
L'enquête progresse vite, une semaine après l'attentat de Manchester. © OLI SCARFF / AFP
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M.L avec AFP , modifié à
Une semaine après l'attaque qui a fait 22 morts et des dizaines de blessés, quatorze personnes se trouvaient en garde à vue, lundi. Certaines ont été arrêtées en Libye.

L'hypothèse d'un "loup solitaire" n'aura tenu que quelques heures après l'attentat qui a fait 22 morts, lundi dernier à Manchester. La police britannique s'était d'abord montrée prudente, évoquant toutes les pistes y compris celle d'un acte isolé et revendiqué par l'organisation Etat islamique (EI) de manière opportuniste. Mais dès le lendemain, les autorités procédaient à une première arrestation, celle d'un complice présumé du kamikaze. Depuis, quinze autres personnes soupçonnées d'être en lien avec un réseau terroriste d'importance ont été interpellées en Grande-Bretagne, mais aussi en Libye, d'où était originaire l'assaillant. Deux ont été relâchées et quatorze se trouvent encore en garde à vue.

  • Qui sont les complices présumés de Salman A. ?

La plupart des suspects entendus par la police britannique sont de jeunes hommes résidant dans la région de Manchester. Selon de nombreux médias anglais, le premier interpellé, âgé de 24 ans, serait un grand frère du kamikaze, prénommé Ismaël. Dans la nuit de mardi à mercredi, trois autres hommes de 18, 21 et 24 ans, ont été arrêtés. D'origine libyenne, ils seraient des cousins de Salman A. Dans la même journée, deux autres personnes ont été placées en garde à vue : un homme de 22 ans et une femme de 34 ans, remise en liberté quelques heures plus tard. Depuis, neuf hommes âgés de 16 à 44 ans ont été arrêtés. Le mineur a été libéré sans poursuite.

Le réseau est notamment soupçonné d'avoir conçu la bombe à l'origine de l'explosion, considérée comme très sophistiquée par les experts. "Quand on a des engins explosifs artisanaux, il y a rarement une seule personne isolée mais plusieurs individus", a analysé Will Gedes, responsable d'une entreprise spécialisée dans la sécurité. "Il est clair que ça lui a été livré par un tiers." L'enquête devra notamment permettre de déterminer lesquels des complices présumés de Salman A. ont pu participer à cette confection, et identifier un éventuel artificier.

  • Quels sont leurs liens avec la Libye ?

Deux autres suspects ont été interpellés en Libye, mardi. Il s'agit de Hachem A., jeune frère du kamikaze, et de Ramadan A., leur père. Devant les services de sécurité libyens, le premier a revendiqué son appartenance à l'EI et a reconnu un séjour en Angleterre, dans la phase de préparation de l'attentat de son frère. Son implication exacte doit encore être déterminée, mais les premiers éléments de l'enquête suggèrent que l'EI pourrait avoir transféré une partie de ses compétences vers ce pays. "Jusqu'à présent, ces opérations étaient pilotées depuis Raqqa, le fief de l'État islamique en Syrie", note Didier François, spécialiste des questions terroristes pour Europe 1.

Le père de Salman A. était par ailleurs membre du Groupe islamique combattant libyen (GICL), interdit au Royaume-Uni depuis 2005 et considéré comme une organisation terroriste. Après avoir combattu en Afghanistan aux côtés d'Al-Qaïda, il aurait trouvé refuge en Grande-Bretagne - où est né l'assaillant de Manchester - avant de rentrer en Libye pour rejoindre les rebelles dans leur lutte contre Kadhafi.

  • La cellule a-t-elle été intégralement démantelée ?

Une "bonne partie" du réseau djihadiste révélé par l'attentat a été démantelée, a indiqué la police britannique, vendredi. Les autorités restent cependant prudentes. Samedi soir, elles ont diffusé un appel à témoin et des photos de Salman A. afin de retracer, dans le détail, ses derniers jours avant l'attaque de la Manchester Arena. Une source proche de la famille du kamikaze affirme qu'il se trouvait en Libye quelques jours avant l'attentat. La police allemande indique de son côté qu'il a fait escale à Düsseldorf.

Depuis une semaine, 1.000 agents sont mobilisés pour analyser plus de 800 pièces à conviction dans ce dossier, et procéder à des recherches dans 18 lieux différents. Près de 13.000 heures de vidéo-surveillance ont été visionnées pour tenter de trouver des indices. Dimanche, la ministre britannique de l'Intérieur, Amber Rudd, a déclaré à la BBC que d'autres membres du réseau djihadiste pourraient toujours être en fuite.

  • Était-elle suffisamment surveillée ?

Selon la BBC, les services de renseignement du MI5 ont été alertés au moins trois fois sur les positions extrémistes du jeune Britannique d'origine libyenne. Interrogée à plusieurs reprises lundi matin sur ce qui était connu précisément sur le suspect, la ministre de l'Intérieur a refusé de répondre. Mais, fait inhabituel de la part des autorités britanniques, elle a indiqué que le MI5 enquêtait sur son propre mode de fonctionnement pour tenter d'établir d'éventuelles failles dans la surveillance de Salman A.. D'après l'agence Reuters, le kamikaze faisait partie des 20.000 personnes connues du renseignement intérieur britannique, mais pas des 3.000 faisant l'objet d'une enquête active.