Les affrontements entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont fait plusieurs centaines de morts. 2:58
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Didier François, édité par Antoine Terrel
Pendant le conflit avec l'Azerbaïdjan, qui s'est soldé par un accord, lundi soir, l'Arménie a souffert de son infériorité militaire face à une armée mieux équipée. Ce petit pays d'Asie occidentale à cru, à tort, que la Russie allait la protéger.
ANALYSE

Le texte doit mettre fin à six semaines de combats meurtriers : l'Azerbaïdjan et l'Arménie ont signé sous l'égide de la Russie un accord de fin des hostilités dans le conflit du Haut-Karabakh qui consacre les victoires militaires azerbaïdjanaises. Cet évènement est donc vécu comme une capitulation pour les séparatistes arméniens. 

Combattants épuisés

Moscou a attendu le tout dernier moment pour arrêter net les combats, alors que les Arméniens étaient battus, incapables de rétablir la situation, puisque que les troupes azéries venaient d’enlever la position clé de Chouchi, cette ville-forteresse bâtie au Moyen-Age sur le col de la montagne qui domine Stepanakert.

Plus rien ne pouvait donc les empêcher de capturer la capitale du Haut-Karabakh qui était à leurs pieds. La défaite arménienne aurait alors été totale. Les derniers défenseurs de la province séparatiste étaient épuisés, blessés pour la plupart, sans ravitaillement ni munitions, puisque le corridor de Latchine, cordon ombilical vital les reliant à l’Arménie, avait été coupé la semaine dernière par l’avancée inexorable des Azéris qui avaient très minutieusement préparé cette guerre.

La supériorité aérienne de l'Azerbaïdjan

Grâce aux milliards de dollars générés par ses gigantesques gisements de pétrole, et avec le soutien inconditionnel de la Turquie, Bakou a construit une armée redoutable, équipée d’un matériel militaire de toute dernière génération, particulièrement des drones et des avions qui lui ont offert la supériorité aérienne des le début de l’offensive. Quand les forces arméniennes, elles, ne s’attendaient qu’à rejouer la guerre de position retranchée dans les montagnes qu’elles avaient gagné dans les années 90, mais qui est désormais totalement dépassée. 

Ces dernières ont été surprises, et ont subi un déluge de feu intenable, souvent avec des obus au phosphore ou des bombes à sous-munitions, certes interdites par les traités internationaux, mais terriblement efficaces. 

Le triple objectif du Kremlin

Les forces arméniennes ont cru que la Russie allait les protéger puisque l’Arménie a signé un accord de défense avec Moscou. Et cela a été certainement leur plus grosse erreur stratégique, puisque Vladimir Poutine a toujours estimé que la province séparatiste du Karabakh n’était pas concernée par cet accord. 

En fait, le Kremlin poursuivait trois objectifs dans ce conflit. Le premier était de reprendre pied comme la seule force militaire d’interposition dans la région, ce qui est désormais chose faite avec le déploiement de 2.000 soldats chargés de faire appliquer le cessez-le-feu. Le second était de ne pas rompre avec l’Azerbaïdjan, un partenaire commercial et énergétique extrêmement important que la Russie ne veut pas laisser tomber entièrement dans les bras de la Turquie. C’est la raison pour laquelle Moscou a laissé Bakou reconquérir l’essentiel du Karabakh. 

Le troisième objectif était de conserver son emprise sur l’Arménie, en lui faisant la démonstration de sa dépendance, d’où cette intervention in extremis pour imposer cette capitulation, qui, formellement, sauve Stepanakert, et coûtera certainement son siège au Premier ministre Nikol Pachinian, que Vladimir Poutine a toujours considéré comme beaucoup trop indépendant.