Liban : "Je suis en colère contre cette classe politique corrompue et incompétente"

Les témoignages de Beyrouth racontent une ville dévastée.
Les témoignages de Beyrouth racontent une ville dévastée. © AFP
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Guilhem Dedoyard , modifié à
Après les deux explosions survenues dans le quartier du port à Beyrouth, au Liban, la ville est ravagée. Le photographe de guerre Maher Attar témoigne au micro d'Europe 1 de sa vive émotion et de sa colère à l'égard de la classe politique qu'il désigne comme responsable. 
INTERVIEW

"Il faut qu'ils dégagent." Quelques heures après les deux explosions causées par du nitrate d'amonium qui ont détruit une partie de la ville de Beyrouth le photojournaliste Maher Attar témoigne au micro d'Europe 1 de l'ampleur des dégâts humains et matériels. Il exprime surtout sa colère contre la classe politique du pays, qu'il tient pour responsable de la situation dans laquelle se trouve le Liban aujourd'hui.

"Un jour noir dans l'histoire" du Liban

Il raconte avoir ressenti "comme un tremblement de terre. J'ai crié, j'ai paniqué. Moi qui ait connu la guerre, je n'ai jamais vécu ça. Ce qu'on voit aujourd'hui, c'est infernal : des corps déchiquetés, des bâtiments détruits, des carcasses de voitures brûlées, des milliers de blessés, c'est du jamais vu".

"Aujourd'hui est un jour noir dans notre histoire et moi, je suis en colère. Une colère sourde contre cette classe politique corrompue, pourrie, incompétente, qui se passe le pouvoir depuis des générations", explique Maher Attar. Le photographe, particulièrement ému, reproche aux responsables politiques la catastrophe qui vient de frapper le Liban. Mais ces explosions ne sont que la dernière tragédie en date, selon lui. "Il ne manquait que ça, malheureusement."

"Les gens sont en train de crever"

Et si les responsables sont, pour lui, évidents, Maher Attar se montre très pessimiste sur une sortie de crise par le haut. "J'espère qu'ils vont lâcher leur siège, mais je n'y crois pas, ce sont des gens qui n'ont pas de sentiment. On a essayé par tous les moyens de leur faire comprendre qu'on ne veut pas d'eux. Ils ont déjà volé mon adolescence, ils m'ont forcé à l'exil et ils sont toujours là : les mêmes familles, les mêmes dynasties."

Le photographe de 57 ans explique par exemple qu'après les explosions, un ouvrier venu réparer ses fenêtres a été obligé de quitter son chantier pour réparer les vitres d'un fils de général.

Selon lui, tant que cette classe politique est au pouvoir, "on doit encore s'attendre à des catastrophes au Liban. Les gens sont en train de crever. Il va y avoir plus de problèmes d'essence, d’électricité. C'est catastrophique". Il rappelle que même avant la catastrophe, la capitale libanaise était sujette à des coupures d’électricité très fréquentes. Pour Maher Attar, très ému,"Beyrouth est triste, Beyrouth est malheureuse, Beyrouth est détruite".