Génocide rwandais : la France a "livré des armes à des criminels"

Des soldats français ont été déployés en 1994 au Rwanda, mandatés par l'ONU, pour mettre fin aux massacres ethniques.
Des soldats français ont été déployés en 1994 au Rwanda, mandatés par l'ONU, pour mettre fin aux massacres ethniques. © HOCINE ZAOURAR / ARCHIVES / AFP
  • Copié
Sébastien Krebs, édité par M.Be.
Guillaume Ancel, ancien soldat français déployé au Rwanda en 1994 après le génocide, a confirmé à Europe 1 avoir vu des livraisons d'armes par la France aux génocidaires Hutus.

La Revue XXI révèle mercredi un témoignage qui met à nouveau en cause le rôle de la France dans le génocide du Rwanda. Un haut fonctionnaire, qui a eu accès aux archives classées secret défense de l'Élysée sur le génocide rwandais, assure avoir vu des documents prouvant que la France a donné l'ordre de réarmer les génocidaires Hutus, qui venaient de fuir massivement vers le Zaïre voisin dans des camps de réfugiés.

"Détourner l'attention des journalistes". Guillaume Ancel, ancien officier de l'armée de terre déployé en juillet 1994 au Rwanda dans le cadre de l'opération "Turquoise", a confirmé à Europe 1 avoir vu ces livraisons d'armes, une scène qui l'a marqué. "Le commandant adjoint de la base me demande de détourner l'attention des journalistes parce qu'un convoi d'armes va partir vers le Zaïre. Et je vois dans leur dos passer une dizaine de camions. Je ne comprends pas : on livre (des armes) dans des camps de réfugiés, à des criminels", s'indigne l'ancien militaire.

Les Hutus voulaient "finir le travail". Ces armes que la France aurait livrées vont réarmer les Hutus et permettront à ceux-ci de poursuivre leur combat, explique Patrick de Saint-Exupéry, co-fondateur de la Revue XXI. "Il va y avoir pendant des mois et des années des tentatives de reconquêtes, et des tentatives aussi, comme disent les Hutus, de 'finir le travail'. Ce sont des mots qu'on entendra dans les camps de réfugiés : 'Nous avons perdu mais nous voulons finir l'extermination'", relate aujourd'hui le journaliste spécialiste du conflit.

Selon lui, le témoignage du haut fonctionnaire dans la Revue XXI constitue une nouvelle preuve que la France a continué de soutenir un régime meurtrier, alors même que le génocide était connu de la communauté internationale. Mais pour l'heure, ces documents classés secret défense n'ont pas été déclassifiés et restent inaccessibles aux historiens.