Brésil : comment Jair Bolsonaro veut prendre la main sur la jeunesse du pays

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© EVARISTO SA / AFP
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Jean-Sébastien Soladïni, envoyé spécial d'Europe 1 au Brésil, édité par Romain David , modifié à
Le nouveau président brésilien entend nommer comme ministre de l'Education un professeur de l'école de commandement et d’Etat-major de l’armée. Une nomination qui effraie déjà une partie du corps enseignant.
REPORTAGE

Il est le nouvel homme fort du Brésil. Jair Bolsonaro a été investi mardi à la présidence. Sa campagne a été marquée par des discours aux accents populistes. Ouvertement misogyne, homophobe et raciste, il exacerbe les tensions. Tensions qui pourraient gagner rapidement les milieux éducatifs, car le nouveau président envisage de nommer un ultra-conservateur comme ministre de l’Education, Ricardo Vélez-Rodriguez.

Lutter contre le "socialisme scolaire". Professeur de l’Ecole de commandement et d’Etat-major de l’armée, le futur ministre est partisan d’un projet de loi baptisé "L’école sans parti (politique, ndlr)". Avec ce responsable aux manettes, les enseignants redoutent la mise en place d'une chasse aux sorcières pour ceux qui se montreraient trop proches des idées de gauche. Les partisans du président entendent en effet lutter contre ce qu’ils appellent le "socialisme scolaire", et les professeurs qui feraient selon eux l’apologie du marxisme et de la théorie du genre auprès des élèves.

" Il y a une volonté de criminaliser le corps enseignant "

Americo Lyra, qui dirige l’université de Boa Vista, voit là une façon de formater les esprits. "Le président semble avoir des difficultés avec les différences au sens large, et particulièrement les questions d'identité et de genre. Ce sont des thèmes de gauche. Il ne veut pas mêler ces combats avec son propre agenda", explique à Europe 1 cet universitaire. "Il confond le gauchisme avec une certaine flexibilité libérale."

Des professeurs filmés par leurs élèves. Le programme scolaire serait revisité, et ainsi les années de dictature présentées sous un meilleur jour dans les manuels. Pour le professeur Jefferson Dantes, gare à celui qui prendrait des libertés avec la nouvelle ligne. "J'ai le sentiment qu'il y a une volonté de criminaliser le corps enseignant", pointe-t-il. "Il y aura une certaine insécurité juridique à exercer. Le professeur pourra avoir peur de répondre à une question posée à un élève de façon à le piéger. Avant de répondre, il faudra qu'il analyse si cela représente un risque pour lui". Et d’autant plus que Jair Bolsonaro et ses proches incitent aussi les élèves à filmer leurs professeurs pour mieux les dénoncer.