Birmanie : le Conseil de sécurité de l’ONU "condamne fermement les morts de centaines de civils"

L'ONU demande notamment la libération d'Aung San Suu Kyi, accusée d'avoir violé une loi datant de l'époque coloniale.
L'ONU demande notamment la libération d'Aung San Suu Kyi, accusée d'avoir violé une loi datant de l'époque coloniale. © AFP
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Europe 1 avec AFP
Pékin et Moscou ont bloqué à plusieurs reprises ce communiqué, jugé trop menaçant. Il a donc dû être édulcoré, notamment de la mention de possibles sanctions à l'égard du régime birman, de manière à pouvoir être adopté unanimement par les membres du Conseil de sécurité de l'ONU.

 

Le Conseil de sécurité de l'ONU "a condamné fermement les morts de centaines de civils, incluant des femmes et des enfants" en Birmanie, dans une déclaration unanime jeudi, largement édulcorée par la Chine lors d'une négociation difficile qui a duré deux jours. Profondément préoccupés "par la détérioration rapide de la situation", les membres du Conseil, qui avaient tenu mercredi une réunion à huis clos de plus de deux heures après les violences meurtrières du week-end, dénoncent aussi "fermement le recours à la violence contre des manifestants pacifiques", indique leur déclaration initiée par le Royaume-Uni.

Les réticences de Pékin et Moscou

Dans les versions précédentes du texte, les Occidentaux avaient mis une mention affirmant que le Conseil de sécurité était "prêt à envisager de nouvelles étapes", soit une vague allusion à la possibilité de sanctions internationales contre les militaires qui ont pris le pouvoir. Selon des diplomates, la Chine, opposée à toute prise de sanctions, a cependant bloqué à plusieurs reprises une approbation du texte à cause, entre autres, de cette mention qui ne figure plus dans le texte adopté. Ce dernier se borne à stipuler que le Conseil "restera activement saisi du dossier". 

Pékin a aussi imposé en fin de négociations de changer une mention portant sur "le meurtre de centaines de civils" par une mention évoquant "les morts de centaines de civils". La Russie, selon les mêmes diplomates, a aussi bloqué plusieurs fois le texte car ce pays voulait une mention condamnant la mort de membres de forces de l'ordre dans des manifestations, qu'il n'a pas obtenue explicitement.

"Une seule voix"

Arriver à parler d'une "seule voix" au Conseil de sécurité est "un signal très important" pour les militaires birmans, veut croire un ambassadeur sous couvert d'anonymat, en reconnaissant implicitement que plusieurs concessions ont dû être faites à Pékin. Depuis le coup d'Etat du 1er février, le Conseil de sécurité a montré via des déclarations son unité à trois reprises, incluant celle de ce jeudi. 

Pékin, premier soutien de la Birmanie et qui n'a jamais reconnu l'existence d'un coup d'Etat militaire, a cependant à chaque fois réduit la portée des textes négociés. Les prises de position du Conseil n'ont en outre eu que peu d'effet sur les militaires jusqu'à présent. Mercredi, l'émissaire de l'ONU pour la Birmanie, Christine Schraner Burgener, avait pourtant demandé au Conseil de sécurité une action forte, en avertissant d’un risque "sans précédent" de "guerre civile" et d’un "bain de sang imminent".

Dans sa dernière déclaration, le Conseil de sécurité réitère son "appel aux militaires pour qu’ils fassent preuve de la plus grande retenue". Il faut qu'ils "respectent pleinement les droits humains et recherchent le dialogue et la réconciliation conformément à la volonté et aux intérêts du peuple de Birmanie", ajoute le texte, en demandant à nouveau la libération d'Aung San Suu Kyi, accusée jeudi d'avoir violé une loi sur les secrets d'Etat datant de l'époque coloniale, et du président Win Myint.

Le texte souligne aussi que le Conseil apporte son "soutien aux efforts" de l'organisation régionale asiatique Asean, qui doit tenir un sommet fin avril, pour trouver une solution à la crise, et appelle "à un accès humanitaire sûr et sans entrave à toutes les personnes dans le besoin".