Arrestation du journaliste Loup Bureau en Turquie : "un signal d'intimidation"

Loup Bureau a été placé en détention par les autorités turques.
Loup Bureau a été placé en détention par les autorités turques. © Capture d'écran Twitter
  • Copié
Guillaume Perrodeau avec Gwendoline Debono , modifié à
Sur Europe 1, l'un des avocats du jeune journaliste et le président de Reporters sans frontières, Pierre Haski, réagissent à l'arrestation et l'inculpation de Loup Bureau.

Un nouveau journaliste français a été arrêté en Turquie. Il s'agit de Loup Bureau, journaliste free-lance de 27 ans, inculpé et incarcéré pour "participation à un groupe terroriste". En moins d'un an, il est le troisième journaliste français à être arrêté après Mathias Depardon et Olivier Bertrand, cofondateur du site Les Jours.

"Une nouvelle étape est franchie". Loup Bureau, journaliste free-lance, était à un poste frontière entre l'Irak et la Turquie lorsqu'il a été interpellé. "Les autorités turques le relâchent, puis le ré-interpellent pour une raison difficile à comprendre et lui demande alors d'ouvrir son ordinateur portable. Là, il y a des photos et un reportage réalisé en 2013", détaille l'un de ses avocats, Martin Pradel à Europe 1. C'est ce documentaire, diffusé sur TV5 Monde et en libre accès sur Vimeo, qui poserait problème, ainsi que des photos prises durant ce reportage. Le documentaire relate la situation de la population civile syrienne kurde, prise dans des combats entre les milices Kurdes et Daech.

Placé en garde à vue pendant cinq jours, Loup Bureau est finalement inculpé le 1er août "pour des faits d'appartenance à une organisation terroriste armée", indique Martin Pradel. Le 8 mai dernier, Mathias Depardon, un autre journaliste français avait déjà été arrêté, avant d'être libéré un mois plus tard. "Mathias Depardon était simplement accusé d'avoir triché sur son visa. (...) Aujourd'hui, on a franchi une nouvelle étape avec cette inculpation pour 'terrorisme' qui pèse très lourd", analyse Pierre Haski, président de Reporters sans frontières, au micro d'Europe 1. "Il faudra très certainement une intervention politique".

"Un signal d'intimidation". "La Turquie ne veut plus de témoins et de journalistes sur son sol. Il y a une affirmation très nationaliste vis-à-vis de l'Europe, vis-à-vis de l’étranger en général", explique Pierre Haski. "Aujourd'hui, on est dans l'escalade. C'est un signal d'intimidation envers l'étranger à travers le sort d'un jeune journaliste français", estime-t-il.

"Loup Bureau est pris dans une sorte d'engrenages qui est liée à la situation spécifique actuelle du conflit entre la Syrie, les Kurdes, le gouvernement turc d'un côté. Et de l'autre, le contexte de la Turquie post-tentative de coup d'état de l'an dernier, dans laquelle la presse a été victime d'une répression absolument terrifiante", analyse le président de Reporters sans frontières. La Turquie est actuellement située au 155e rang du classement mondial de la liberté de la presse dans le monde établi par Reporters sans frontières, juste derrière la République Démocratique du Congo.

Jeudi après-midi, dans un communiqué commun, les syndicats français de journalistes SNJ, SNJ-CGT et CFDT-Journalistes, soutenus par la Fédération européenne des journalistes (EFJ) et la Fédération internationale des journalistes (IFJ), ont réclamé la libération "immédiate" de Loup Bureau.