Simone Gbagbo, une "Dame de fer" face aux juges

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avec AFP , modifié à
L’ex-Première dame de Côte d’Ivoire, jugée à Abidjan, jouait un rôle de premier plan dans le régime de son mari, qui s’est effondré en 2011.

 "Maman" pour les uns, "Dame de fer" pour les autres, Simone Gbagbo ne laisse personne indifférent. Le procès de l’ex-Première dame de Côte d’Ivoire a repris mardi à Abidjan, après une semaine d’interruption. À 65 ans, Simone Gbagbo est jugée depuis fin décembre avec 82 co-accusés pour son rôle dans les violences qui ont meurtri le pays pendant la crise post-électorale de 2010-2011. Un épisode dans lequel l’épouse de Laurent Gbagbo, loin de faire de la figuration, a joué un rôle majeur.

Le regard apeuré de la Première dame. Souvenez-vous : le 11 avril 2011, cette crise, qui a fait plus de 3.000 morts, s’achevait de façon spectaculaire, avec l’arrestation du couple présidentiel, terré dans le sous-sol de leur résidence. Sur les photos, qui font le tour du monde, Simone Gbagbo apparaît les cheveux arrachés, le regard hagard et apeuré, à côté de son mari. Quelques jours plus tard, elle est envoyée à Odienné, dans le nord-ouest du pays, et retenue dans une résidence privée. Pendant sa détention, les chefs d’accusation contre elle s'accumulent : "crimes de sang", "infractions économiques" et même "génocide". 

Simone Gbagbo en 2011 - 1280-640

© Aristide Bodegla/AFP

Début décembre, elle a été transférée à Abidjan pour ce procès, au cours duquel l’itinéraire de cette ambitieuse devrait être décortiqué. Née en 1949 dans une famille de dix-huit enfants dont le père est gendarme, elle suit des études de linguistique et d’histoire. Simone se passionne vite pour le syndicalisme et la politique, ce qui lui vaut plusieurs séjours en prison dans les années 1970 et 1990, pour avoir critiqué l’ancien président Félix Houphouët-Boigny. 

"Dieu a donné la victoire à Laurent". En 1982, elle co-fonde le Front populaire ivoirien, le FPI, dont elle devient députée en 1995. Elle épouse Laurent Gbagbo en secondes noces, en janvier 1989. Simone Gbagbo est mère de cinq filles, dont deux de son époux actuel. Le 26 octobre 2000, c’est la consécration : son mari est élu président – mais dans des conditions controversées.

Loin de faire tapisserie, la Première dame s’implique et donne l’image d’une femme pieuse. Dans ses discours en public, cette chrétienne évangélique fervente fait souvent référence à Dieu. Quand son mari est réélu, le 28 novembre 2010, dans des conditions encore contestées, elle assure que "Dieu a donné la victoire à Laurent". Simone Gbagbo continue à jouer un rôle actif. D’après Jeune Afrique, elle est "considérée comme un pilier inébranlable du régime de son mari Laurent sur lequel elle exerçait une forte influence".

Ouattara, un "chef bandit". Son ennemi : Alassane Ouattara, adversaire de son mari, qualifié de "chef bandit", aujourd’hui au pouvoir. Quand le pays plonge dans la crise post-électorale, elle n’est pas tendre non plus avec ce "diable" de Nicolas Sarkozy, alors président français. Et quand les derniers soutiens de son mari lui conseillent de jeter l’éponge, "elle pique des colères homériques", souligne l’hebdomadaire, qui indique aussi que Simone Gbagbo avait un plan bien précis en tête : prendre la tête du FPI avant de se présenter à la présidence en 2015.

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Aujourd’hui, il ne lui reste plus qu’à attendre l’issue de son procès. Contrairement à son mari, qui doit comparaître devant la justice internationale en juillet à La Haye, c’est à Abidjan qu’elle est jugée. La Côte d’Ivoire refuse en effet de transférer ce pilier de l’ex-régime à la Cour pénale internationale, arguant que sa justice est désormais capable d’organiser un procès équitable, vu comme un moyen de contribuer à la réconciliation nationale.

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