Salah Abdeslam arrêté vivant à Bruxelles, et après ?

Suspecté d'être le logisticien des attaques du 13 novembre à Paris, Salah Adbeslam était en cavale depuis quatre mois.
Suspecté d'être le logisticien des attaques du 13 novembre à Paris, Salah Adbeslam était en cavale depuis quatre mois. © DSK / POLICE NATIONALE / AFP
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Chloé Pilorget-Rezzouk, Marguerite Lefebvre et Chloé Triomphe , modifié à
Il est le seul survivant des trois commandos du 13 novembre. Après son arrestation, l’espoir grandit qu'il réponde de ses actes devant la justice française.

Que va-t-il se passer, maintenant que le seul membre encore vivant des trois commandos du 13 novembre a été arrêté ? Vendredi, en fin de journée, Salah Abdeslam a été neutralisé à l'issue d'une vaste opération policière, dans la commune populaire de Molenbeek, à Bruxelles, où il s'était retranché dans un appartement. Selon les informations d'Europe 1, celui que toutes les polices traquaient sans relâche depuis quatre mois a été blessé au genou par un tir policier. Avec la capture du suspect clef des attaques de Paris, se dessine notamment l'espoir d'un procès. "On va avoir un procès avec un homme et pas des chaises vides dans le prétoire", a ainsi réagi à l'antenne d'Europe 1 Me Jean Reinhart, avocat de victimes des attentats. 

"Seule personne à qui l'on peut poser les questions". "C’est le seul survivant des commandos du 13 novembre. C'est donc la seule personne à qui l'on peut poser les questions qui sont toujours en suspens", souligne le journaliste d'Europe 1 Didier François, spécialiste des questions de défense. "On a retrouvé la ceinture d’explosifs qu’il portait abandonnée du côté de Montrouge, et sa voiture abandonnée dans le 18e arrondissement de Paris. Donc l’opération qu’il devait monter, il ne l’a pas faite. Il n’est pas allé jusqu’au bout", rappelle-t-il. D'après des témoignages, une altercation aurait d'ailleurs eu lieu dans la rue, la veille des attentats, entre les deux frères Abdeslam.

>> mise à jour :l'avocat de Salah Abdeslam, Sven Mary, a annoncé d'ores et déjà, samedi après-midi, que son client refusera son extradition vers la France. "Ce n'est pas parce qu'il refuse qu'il ne sera pas remis", a expliqué samedi à l'AFP l'avocate française Florence Rouas-Elbazis, "mais cela peut entraîner un délai supplémentaire". 

Le "moins idéologue" des terroristes du 13 novembre. Car si son frère Brahim s’est fait exploser boulevard Voltaire le soir des attaques, Salah, lui, ne s'est pas tué en kamikaze. Le jeune homme de 26 ans "est le moins idéologue", estime le journaliste Didier François. Avant sa radicalisation, le petit délinquant devenu logisticien présumé des attentats était connu pour ses excès en tous genres : alcool, cannabis, femmes et sorties. D’ailleurs, Salah Abdeslam a préféré se cacher au sein du quartier Molenbeek - qu'il connaît bien puisqu'il y a grandi -, et non en Syrie. 

Des éléments intéressants qui laissent espérer que le principal suspect des attentats puisse répondre aux questions des enquêteurs et leur fournir des informations. "On peut espérer un interrogatoire, vu que ce n’est pas le plus dur, d’en apprendre un peu plus sur la façon dont a pu être montée cette opération. [...] Depuis combien de temps cet attentat était préparé ? Quand a t-il été contacté par les gens qui l'ont activé depuis la Syrie, par quels moyens ? Enfin, et surtout, qui a fabriqué les explosifs ? On va peut-être en savoir plus là-dessus", développe Didier François.

Quand va-t-il être remis aux autorités françaises ? En attendant, Salah Abdeslam va être rapidement entendu par les policiers belges qui, selon Le Monde, disposent de 24 heures de garde à vue en matière terroriste, contre 96 en France. Etant sous le coup d'un mandat d'arrêt européen émis par la justice française, les autorités vont réclamer son retour sur le territoire. François Hollande a déclaré à ce sujet espérer que la Belgique livre "le plus rapidement possible" Salah Abdeslam à la France. Depuis l'adoption du mandat d'arrêt européen en 2002, la remise de suspects entre pays membres de l'UE est facilitée.

Dans le cadre de cette procédure, le suspect clef des attentats va devoir dire s'il accepte ou non d'être remis aux autorités françaises. Comme ce fut le cas pour l'auteur de la tuerie de Bruxelles, Mehdi Nemmouche, qui avait été livré à la justice belge fin juillet 2014, après qu'elle en a fait la demande à la France, où il avait été arrêté en mai. Si Salah Abdeslam accepte son transfert, cela devrait être une question de jours pour qu'il soit remis aux magistrats du pôle antiterroriste du parquet de Paris. En revanche, s'il refuse, la procédure pourrait prendre plus de temps. 

L'espoir d'un procès, mais... Au fond, l’espoir de voir un jour Salah Abdeslam sur le banc des accusés occupe tous les esprits. "Le fait qu’il ait été capturé vivant, et qu’il ait à répondre de ses actes devant la justice, cela va vraiment changer la donne pour nous, en tant que victimes. C’est une belle issue", a confié au micro d’Europe 1 Caroline, une rescapée du Bataclan, la voix emplie d’émotion. Toutefois, s'il y aura bien une personne susceptible de répondre aux questions dans le box des accusés, un procès n'aura pas lieu avant plusieurs années. Car l'instruction d'un dossier aussi complexe prend du temps. Par exemple, c'est seulement ce mois-ci que les magistrats antiterroristes ont décidé de renvoyer devant une cour d'assises spéciale le frère de Mohamed Merah et un complice, soit quatre ans après les faits.