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avec AFP , modifié à
"Un procès normal pour des faits qui ne le sont pas". Au procès des attentats 13-Novembre, le parquet national antiterroriste a commencé à prendre ses réquisitions mercredi, plus de six ans après cette nuit d'horreur qui "a fait irruption dans la vie de tous les Français". 

"Un procès normal pour des faits qui ne le sont pas." Au procès des attentats 13-Novembre, le parquet national antiterroriste a commencé à prendre ses réquisitions mercredi, plus de six ans après cette nuit d'horreur qui "a fait irruption dans la vie de tous les Français". "Que retiendra-t-on de cette audience ? Quelles images ? Quelles paroles resteront ?", a demandé l'avocate générale Camille Hennetier, l'une des trois représentantes du parquet antiterroriste (Pnat), dans son propos liminaire.

Beaucoup de zones d'ombres à éclaircir

"Votre verdict bien sûr. Le nom des disparus égrenés en septembre dernier. Les récits des victimes, enfin, incontestablement la cruauté des terroristes qui tirent au coup par coup et achèvent certaines personnes avec délectation", a-t-elle poursuivi d'un ton solennel. "Ce procès est chargé de symboles, d'espérance, d'attentes et de questions", a admis Mme Hennetier avant de rentrer dans le vif du dossier. "À ce drame hors norme a répondu une enquête hors norme (...) avec la tache de répondre à des questions politiques, sociologiques, humaines", a-t-elle poursuivi.

Pour autant, "il reste des zones d'ombre. Sur les accusés. Sur les faits. Quelles étaient les cibles prévues pour Mohamed Abrini et Salah Abdeslam ?", a-t-elle demandé avant de souligner : "Toutes ces questions qui nous taraudent ont des réponses et ces réponse se trouvent dans le box. La plupart des accusés savent. Ils savent tout et n'ont jamais parlé et n'apporteront jamais sans doute de réponse".

Après neuf mois d'audience, "nous allons vous proposer des clés de lecture", a-t-elle assuré, avant de commencer à "reconstituer le puzzle" de ces attaques jihadistes.

Trois jours d'interrogatoire

Concernant Salah Abdeslam, le seul membre encore en vie des commandos, "il ne s'est pas contenté d'aider, il a participé" aux attentats, cette "opération unique, coordonnée, dans laquelle tous les membres du groupe étaient interchangeables", a-t-elle affirmé avant de laisser la parole à son collègue Nicolas Braconnay. Il a commencé par aborder la "naissance du projet" terroriste en zone irako-syrienne, avec ce "rêve commun : attaquer la France". Selon le plan des réquisitions annoncé par Camille Hennetier, les magistrats évoqueront ensuite l'organisation des attaques, "le cauchemar du 13-Novembre", puis enfin ses suites.

Tour à tour et pendant trois jours, ils devront démontrer quelles sont, selon eux, les responsabilités de chacun des 20 accusés - six d'entre eux, dont cinq hauts cadres de l'organisation Etat islamique présumés morts en Syrie, sont jugés en leur absence. Ce n'est que vendredi qu'ils réclameront des peines à leur encontre.

Douze accusés à la barre

Douze accusés encourent la réclusion criminelle à perpétuité, dont Salah Abdeslam, unique membre encore en vie des commandos qui ont semé la mort au Stade de France, sur les terrasses parisiennes, et dans la salle de concert du Bataclan. Mutique pendant l'enquête, le Français de 32 ans a répondu aux questions durant le procès, mais sa "vérité" a peiné à convaincre l'accusation.

C'est "par humanité" et pas "par lâcheté", a-t-il expliqué, que lui-même n'a pas tué, renonçant à actionner sa ceinture explosive dans un bar du 18e arrondissement.

Abdeslam a pleuré à l'ouverture du procès

Celui qui s'était présenté comme un "combattant de l'État islamique" à l'ouverture du procès a finalement versé des larmes lors de sa dernière prise de parole quelques mois plus tard. "Je vous demande de me détester avec modération", a-t-il prié les rescapés et proches des victimes en demandant leur "pardon". L'accusation, qui a toujours préféré la thèse d'un défaut de fonctionnement de sa ceinture, a mis Salah Abdeslam face à ses contradictions lors de ses interrogatoires.

Difficile à croire enfin, alors que les commandos du Stade de France, des terrasses et du Bataclan étaient tous composés de trois hommes, que Salah Abdeslam opère "tout seul", lui qui contrairement aux autres n'était jamais allé s'entraîner en Syrie.

Le verdict attendu le 29 juin

Outre le principal accusé qui encourt la perpétuité incompressible - une sanction rarissime qui rend très difficile tout aménagement de peine - les avocats généraux requerront contre Mohamed Abrini, "l'homme au chapeau" des attentats de Bruxelles qui était aussi "prévu" pour le 13-Novembre et les "bons copains" qui ont aidé Salah Abdeslam pendant sa cavale.

Certains, comme les accusés Farid Kharkhach, qui a fabriqué des faux papiers "sans savoir" qu'ils étaient destinés à la cellule jihadiste, ou Yassine Atar, qui jure n'être lié au dossier que parce qu'il est le frère du commanditaire des attentats Oussama Atar, espèrent que les débats ont fait changer d'avis l'accusation.

Après les réquisitions, la parole sera donnée à la défense à partir du 13 juin. Le verdict est attendu le 29 juin.