Aide juridictionnelle : la colère des avocats "est immense" affirme le bâtonnier

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C.P.-R. , modifié à
Pierre-Olivier Sur, bâtonnier de Paris, a affirmé sur Europe 1, mardi matin, que les avocats allaient "vers une grève générale pour toutes les affaires" si le gouvernement ne revient pas sur la réforme de l'aide juridictionnelle.
INTERVIEW

"Il n'y aura plus de prud'hommes, il n'y aura plus de divorces, d'actions responsabilité... Tout va s'arrêter si les pouvoirs publics ne répondent pas à notre demande", a averti Pierre-Olivier Sur, invité de Jean-Pierre Elkabbach, mardi matin, sur Europe 1, au sujet de la réforme de l'aide juridictionnelle, dont ne veulent pas les avocats. Le bâtonnier de Paris a indiqué : "nous allons vers une grève générale pour toutes les affaires". Et de poursuivre : "La colère gronde, la colère est immense."

Depuis une semaine, les avocats de France sont en grève pour manifester leur rejet du projet Taubira de la réforme de l'aide juridictionnelle. Sur 164 barreaux en France, 141 sont en grève, a annoncé le Conseil national des barreaux (CNB) qui avait voté en faveur du mouvement de grève. "On nous demande aujourd'hui de travailler pour 10 euros de l'heure pour l'aide juridictionnelle et parallèlement, on demande aussi à notre profession de financer cette aide", a dénoncé Pierre-Olivier Sur.

"Une justice par le haut". L'aide juridictionnelle (AJ) permet aux Français qui gagnent moins de 1.000 euros par mois d'accéder aux services d'un avocat. "Il s'agit pour nous de proposer aux personnes aujourd'hui que l'on ne peut plus défendre, parce que l'on n'a plus d'argent pour le faire, une justice revalorisée", a-t-il défendu. "On veut offrir à ces gens-là une justice par le haut. C'est-à-dire une justice où les avocats arrêtent de perdre de l'argent en les défendant et où on ne demande pas à la profession de payer pour les défendre", a-t-il poursuivi.

"On nous demande de financer le service public". Le projet de réforme de la garde des Sceaux, Christiane Taubira, prévoit notamment un prélèvement de cinq millions d'euros en 2016 et dix millions d'euros en 2017 sur les intérêts de fonds placés dans des caisses gérées par les avocats, pour boucler un budget en augmentation. "Pour cinq millions d'euros, l'Etat est en train de bloquer la Justice en France", a estimé le bâtonnier du barreau réunissant le plus d'avocats en France. "On nous demande de financer le service public, comme si on demandait aux médecins de financer la Sécurité sociale ou aux instituteurs de financer l'Education nationale."

"l'Etat se désengage". Selon Christiane Taubira, 57% de l'AJ est réalisée par seulement 7% des avocats. "Tous les avocats défendent gratuitement et très largement",a rétorqué Pierre-Olivier Sur, qui a dénoncé le manque de dialogue avec la garde des Sceaux. "Ce que je voudrais, c'est avoir un dialogue avec elle et son directeur de cabinet, en tête à tête. Ce que je voudrais, c'est être reçu par le Premier ministre", a insisté le bâtonnier, déplorant que "l'Etat se désengage".