Poursuivi pour avoir aidé une sans-papiers

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Un retraité, bénévole à la Croix-Rouge comparaît mardi malgré l'abrogation du délit de solidarité.

Il voulait aider une sans-papiers et se retrouve devant la justice. Un militant de la Croix Rouge est convoqué mardi devant le tribunal correctionnel du Havre pour "faux et usage de faux". Léopold Jacquens est soupçonné d'avoir établi une fausse attestation d'hébergement pour une Congolaise sans-papiers. Il risque jusqu'à un an de prison ferme et 15.000 euros d'amende.

Sans attestation de domicile, pas de régularisation. L'affaire remonte à 2012. Une Congolaise sans-papiers se rend au local de la Croix-Rouge tenu par le retraité et lui demande de l'aide pour obtenir un titre de séjour. Malade et sans domicile fixe la femme a besoin d'une adresse pour espérer pouvoir obtenir des titres en règles. Problème : le dispositif qui permettait aux associations de signer des attestations d'hébergement pour venir en aide aux sans-papiers, n'était plus autorisée à cette époque. "Le gouvernement Raffarin a interdit cette pratique", glisse Léopold Jacquens à L'Humanité.

Léopold Jacquens se charge donc de rédiger une attestation d'hébergement. "Comme elle ne connaissait personne, je lui ai donné mon adresse, raconte le retraité. A la sous-préfecture, si vous n'avez pas une adresse au Havre, vous ne pouvez pas commencer votre domiciliation", raconte-t-il à France Info. Quelques mois plus tard, la police se rend à son domicile pour constater que la femme ne vit pas chez lui.

Un délit de solidarité qui ne dit pas son nom. Le retraité écope alors de 500 euros d'amende qu'il refuse de payer. En effet, en décembre 2012, le délit de solidarité, qui punissait les personnes facilitant le séjour de personnes en situation irrégulière, a été supprimé par le Ministre de l'Intérieur. Léopold Jacquens pense donc qu'il n'a rien fait d'illégal. Mais la sous-préfecture du Havre porte plainte contre lui pour "faux et usage de faux". Selon le procureur, une telle attestation ne peut se faire que si le retraité hébergeait réellement la personne. "La justice essaie de réintroduire le délit de solidarité par la petite porte", s'insurge pour sa part Me Antoine Mary, l'avocat du retraité.

"Nous remercier, pas nous faire des procès". Une situation qui interpelle les associations d'aide aux migrants. Pour Marie-Hélène Boileau, présidente de la Ligue des droits de l'Homme du Havre cette affaire entre "dans la politique de harcèlement des militants associatifs. Faire peur aux gens pour qu'ils rentrent dans le rang et qu'ils n'enfreignent pas la loi".

La présidente de l'association défend par ailleurs la démarche du militant. "On ne favorise pas le séjour de personnes en illégalité, au contraire, on fait tout pour qu'ils puissent obtenir une régularisation, on devrait nous remercier, pas nous faire des procès".