Hier, un journaliste a pris une balle perdue
Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce mercredi, il revient sur la mort du journaliste Arman Soldin en Ukraine.Tous les jours, Bruno Donnet décortique, parfois longuement, la mécanique médiatique mais ce matin, il sera bref.Court. Concis. Rapide.Vous savez que c’est une des libertés éditoriales des journalistes, ils peuvent choisir l’espace ou le temps qu’ils estiment nécessaire de consacrer à tel ou tel sujet.Et donc, le traiter par un long reportage, par une enquête ou bien sous la forme d’une simple brève, une brève, c’est-à-dire une information courte, expédiée en quelques petites secondes.Et c’est donc ça, une brève, qui m’a frappé hier soir, alors que je regardais le journal télévisé. Car j’ai été saisi par un contraste.Vous savez que lorsqu’il neige en hiver, par exemple, ça arrive, les journaux télévisés nous ensevelissent sous des avalanches de reportages. Que quand il y a des embouteillages, en été, ils en font des kilomètres. Et que lorsque l’essence vient à augmenter de 10 centimes, ils en font des litres.Mais que se passe-t-il lorsqu’un journaliste qui couvre la guerre, en Ukraine, meurt sur le front ?Et bien dans ce cas-là, comme Anne-Sophie Lapix, hier soir, sur France 2, on en fait une brève : « On a appris ce soir qu’un journaliste de l’Agence France Presse avait été tué dans une frappe de roquettes à l’est de l’Ukraine, près de Bakhmout. Arman Soldin était un journaliste franco-bosnien de 32 ans, coordinateur vidéo de l’AFP en Ukraine. Sa mort rappelle les risques pris par les reporters qui couvrent ce conflit. »Voilà, 19 secondes. 19 secondes seulement pour évoquer la mort d’un jeune journaliste de 32 ans qui documentait la guerre et dont le travail et les images, étaient utilisés, tous les jours, par les rédactions du monde entier.Pourquoi un tel paradoxe ?Par pudeur, un peu. Et surtout, surtout pour ne pas avoir l’air d’être par trop corporatiste.Les drames, la guerre, la mort, c’est le pain quotidien de la presse. Mais la mort d’un confrère, c’est compliqué. Pas facile à traiter. Et bien plus difficile à attraper qu’un Nième fait divers macabre, auquel on consacrera volontiers de longues minutes d’enquêtes, plus ou moins nécessaires.Les cordonniers, vous le savez, sont les plus mal chaussés. Et les journalistes n’ont pas coutume de s’attarder sur la mort d’un des leurs. Ça ne se fait pas. On l’évoque donc, en bref, on ne s’y attarde pas.Alors ? Et bien, Bruno Donnet ne s'y attardera pas,lui non plus. Pas ce matin en tous cas. Il ne vous racontera pas que le 1er mai dernier, Arman Soldin avait envoyé des images terrifiantes d’une explosion de roquettes dans l’est de l’Ukraine, qu’il avait eu la peur de sa vie mais qu’il avait pris son courage et sa caméra, à deux mains, pour nous montrer l’épouvantable réalité de la guerre et son fracas terrifiant.Il ne vous dira pas qu’Arman Soldin est au moins le 11e reporter, fixeur, ou chauffeur de journalistes, à avoir perdu la vie, en Ukraine, victime d’un tir de roquette.Il dira simplement qu'hier, au moment où Vladimir Poutine expliquait devant des Russes, privés d’images, que les Ukrainiens sont les nouveaux nazis, un reporter de 32 ans qui filmait la réalité en est mort. Bref, hier, un journaliste a pris une balle perdue.
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Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce mercredi, il revient sur la mort du journaliste Arman Soldin en Ukraine.
Tous les jours, Bruno Donnet décortique, parfois longuement, la mécanique médiatique mais ce matin, il sera bref.
Court. Concis. Rapide.
Vous savez que c’est une des libertés éditoriales des journalistes, ils peuvent choisir l’espace ou le temps qu’ils estiment nécessaire de consacrer à tel ou tel sujet.
Et donc, le traiter par un long reportage, par une enquête ou bien sous la forme d’une simple brève, une brève, c’est-à-dire une information courte, expédiée en quelques petites secondes.
Et c’est donc ça, une brève, qui m’a frappé hier soir, alors que je regardais le journal télévisé. Car j’ai été saisi par un contraste.
Vous savez que lorsqu’il neige en hiver, par exemple, ça arrive, les journaux télévisés nous ensevelissent sous des avalanches de reportages. Que quand il y a des embouteillages, en été, ils en font des kilomètres. Et que lorsque l’essence vient à augmenter de 10 centimes, ils en font des litres.
Mais que se passe-t-il lorsqu’un journaliste qui couvre la guerre, en Ukraine, meurt sur le front ?
Et bien dans ce cas-là, comme Anne-Sophie Lapix, hier soir, sur France 2, on en fait une brève : « On a appris ce soir qu’un journaliste de l’Agence France Presse avait été tué dans une frappe de roquettes à l’est de l’Ukraine, près de Bakhmout. Arman Soldin était un journaliste franco-bosnien de 32 ans, coordinateur vidéo de l’AFP en Ukraine. Sa mort rappelle les risques pris par les reporters qui couvrent ce conflit. »
Voilà, 19 secondes. 19 secondes seulement pour évoquer la mort d’un jeune journaliste de 32 ans qui documentait la guerre et dont le travail et les images, étaient utilisés, tous les jours, par les rédactions du monde entier.
Pourquoi un tel paradoxe ?
Par pudeur, un peu. Et surtout, surtout pour ne pas avoir l’air d’être par trop corporatiste.
Les drames, la guerre, la mort, c’est le pain quotidien de la presse. Mais la mort d’un confrère, c’est compliqué. Pas facile à traiter. Et bien plus difficile à attraper qu’un Nième fait divers macabre, auquel on consacrera volontiers de longues minutes d’enquêtes, plus ou moins nécessaires.
Les cordonniers, vous le savez, sont les plus mal chaussés. Et les journalistes n’ont pas coutume de s’attarder sur la mort d’un des leurs. Ça ne se fait pas. On l’évoque donc, en bref, on ne s’y attarde pas.
Alors ? Et bien, Bruno Donnet ne s'y attardera pas,lui non plus. Pas ce matin en tous cas. Il ne vous racontera pas que le 1er mai dernier, Arman Soldin avait envoyé des images terrifiantes d’une explosion de roquettes dans l’est de l’Ukraine, qu’il avait eu la peur de sa vie mais qu’il avait pris son courage et sa caméra, à deux mains, pour nous montrer l’épouvantable réalité de la guerre et son fracas terrifiant.
Il ne vous dira pas qu’Arman Soldin est au moins le 11e reporter, fixeur, ou chauffeur de journalistes, à avoir perdu la vie, en Ukraine, victime d’un tir de roquette.
Il dira simplement qu'hier, au moment où Vladimir Poutine expliquait devant des Russes, privés d’images, que les Ukrainiens sont les nouveaux nazis, un reporter de 32 ans qui filmait la réalité en est mort. Bref, hier, un journaliste a pris une balle perdue.

Europe 1
Les plus grandes vedettes françaises et internationales sont à l’honneur dans cette série de podcasts. A travers des récits inédits, des interviews exclusives et les archives exceptionnelles d’Europe 1, replongez dans les « destins extraordinaires » parfois semés d’obstacles mais toujours couronnés de succès de ces icônes légendaires qui ont marqué des générations entières.

Maël Hassani
Tous les soirs, Maël Hassani vous livre le concentré de l'actualité du jour, tout en gardant un œil sur les événements à venir avec les Unes de la presse du lendemain.

Europe 1
"Au Cœur du Crime" vous propose de (re)découvrir en podcast des anciennes séries policières. Chaque mardi et chaque vendredi, écoutez un nouvel épisode intense et immersif ”Crime Story”, inspiré des grands romans policiers anglo-saxons et incarné par la célèbre voix de Serge Sauvion, doubleur de l’acteur Peter Falk. Chaque dimanche, vous retrouverez désormais “le siffleur”. Cette série policière diffusée sur Europe 1 dans les années 60, met en scène des personnages pris dans un engrenage infernal ou dont le destin est proche de basculer… <br /> <br /> “Au Coeur du Crime” est disponible sur le site et l’application Europe 1 ainsi que sur toutes les plateformes d’écoute.<br />

Au Cœur de l'Histoire - Virginie Girod
Virginie Girod
Découvrez l’Histoire de France et du monde avec l’historienne Virginie Girod dans cette nouvelle saison du podcast "Au Cœur de l’Histoire" ! Embarquez pour un voyage dans le temps inédit sur fond de musiques originales, pour une immersion totale à la manière de la fiction audio. Virginie Girod met en lumière des personnages historiques inspirants et lève le voile sur des époques essentielles de l’Histoire. Origines des guerres, complots, vies d’artistes, politiciens, pionniers, retrouvez de nouveaux épisodes tous les jours sur une variété de sujets allant de l’Antiquité à nos jours. Les lundis, mardis, jeudis et vendredis, plongez dans des récits 100% immersifs, puis chaque mercredi et samedi Virginie Girod vous propose une interview inédite avec un invité historien, chercheur, journaliste, pour en apprendre encore plus. "Au Cœur de l’Histoire" est une production Europe 1 Studio.

Julien Pichené
"Au Coeur de l'Actu", c'est le podcast de la rédaction d'Europe 1 qui vous éclaire sur les sujets qui font l'actualité. Découvrez nos formats courts "10 minutes pour tout savoir" et nos séries documentaires, enrichis avec les archives de la radio.

Olivier Delacroix
Au cœur de la nuit, les auditeurs se livrent en toute liberté aux oreilles attentives et bienveillantes d'Olivier Delacroix, du lundi au jeudi, et de Valérie Darmon, du vendredi au dimanche. Pas de jugements ni de tabous, une conversation franche mais aussi des réponses aux questions que les auditeurs se posent. Un moment d'échange et de partage propice à la confidence pour repartir le cœur plus léger. Si vous aussi vous souhaitez témoigner, laissez vos coordonnées en appelant Europe 1 au : 01 80 20 39 21 (numéro non surtaxé).

Ombline Roche
Tous les soirs du lundi au vendredi entre 22h15 et 22h30 Ombline Roche vous plonge dans les musiques des années Top 50 sur Europe 1. Et si vous en voulez plus, rendez-vous les samedis et dimanches entre 21h et 22h !

Dimitri Pavlenko
Deux heures de direct à l'écoute de celles et ceux qui font le monde : le raconter, le décrypter et l'analyser pour donner des clés de lecture et de compréhension aux auditeurs.

Pierre de Vilno
Le tour complet de l'actualité en compagnie de Pierre de Vilno et de la rédaction d'Europe 1 de 19 heures à 21 heures.

Hervé Mathoux
Chaque parcours de vie est constitué de réussites mais aussi… d’échecs. Bien souvent, ceux-ci nous renforcent et nous apprennent autant, si ce n’est plus que les succès. Dans cette nouvelle série d’entretiens, le journaliste Hervé Mathoux évoque avec son invité ses plus beaux "accidents". Première personnalité à se plier à l’exercice : l’acteur Denis Podalydès, sociétaire de la comédie française.