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Chaque jour, la matinale d'Europe 1 revient sur l'un des événements sportifs qui fait l'actualité. Ce mercredi, Virginie Phulpin s'intéresse à la recrue âgée de seulement cinq ans d'Arsenal. Selon elle, c'est un danger à tous les étages.

On a parlé la semaine dernière de Zayn Ali Salman, cet enfant prodige de 5 ans recruté par le club de foot d’Arsenal. On l’appelle déjà le nouveau Messi. Mais au-delà de ce cas particulier, le foot actuel cherche des "pépites" de plus en plus jeunes, et pour vous c’est un danger à tous les niveaux. 

Au premier abord, un enfant surdoué dans un grand club avec le titre de "plus jeune recrue de tous les temps", c’est une belle histoire. Mais en fait cette course au recrutement de plus en plus jeune a de multiples effets pervers. D’abord pour les enfants eux-mêmes. Physiquement, le surentraînement, quand on est en pleine croissance, peut avoir des effets néfastes. Mentalement ensuite. Le foot doit rester un jeu à cet âge-là, un plaisir avant d’être une compétition. Qu’on laisse les enfants vivre une vie d’enfant avant de les précipiter à l’âge adulte. Et puis que les clubs cherchent à recruter les gamins le plus tôt possible, c’est un pari pour eux, mais aussi pour les jeunes, et un pari autrement dangereux.

Personne ne peut dire en voyant jouer des petits s’ils vont continuer à aimer le foot quand ils seront grands ou s’ils en seront dégoûtés à force d’avoir trop joué, personne ne peut dire non plus s’ils seront toujours performants. Là, en les recrutant à l’âge playschool, on leur fait miroiter la vie de footballeur professionnel dès leurs premières années. Et il ne faut pas oublier que même à l’adolescence, à l’entrée du centre de formation, il y a 9 apprentis footballeurs sur 10 qui ne vivront jamais leur rêve. J’en parlais hier avec Jérôme Dumois, de l’UNFP, le syndicat des footballeurs. Pour lui c’est essentiel de faire passer le message aux plus jeunes qu’il y aura peu d’élus, sans briser leur rêve évidemment. C’est extrêmement délicat. Mais quand vous êtes recruté à l’âge de 5 ans, bercé depuis toujours par le foot pro, comment voulez-vous imaginer la vie en dehors du football ?

Cette course au recrutement change aussi l’ambiance autour des matches des jeunes amateurs

 

Beaucoup de parents poussent leurs enfants à fond dans le football. Comme le dit si bien Yacine Hamened dans son livre "Les hors-jeu du football français", leur enfant devient leur ticket d’Euromillions. Il faut qu’il réussisse, et tout est interprété comme un obstacle sur le chemin de la gloire de leur progéniture. Du coup, si un arbitre ne siffle pas faute contre l’adversaire du gosse, ils l’insultent. Si l’entraîneur fait sortir leur nouveau Messi du terrain, ils lui en veulent et ne le respectent plus.

L’ambiance délétère qu’on constate à peu près chaque week-end dans les matches de jeunes, c’est aussi à cause de cette course au recrutement précoce. L’entourage, des parents aux éducateurs, a l’obsession de la réussite individuelle d’un joueur. Et ils ne se préoccupent plus ni du jeu, ni du collectif, et évidemment pas de l’aspect éducatif du sport. Donc je voudrais avoir les yeux qui brillent en voyant jouer Zayn Ali Salman. Mais je trouve surtout cette histoire inquiétante