Pascal Picq : "sur l’espérance de vie, mis à part France et Italie, tous les pays régressent"

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Faux, des chercheurs de l’OMS et du College impérial de Londres viennent de montrer qu’elle va continuer à progresser, dans les pays les plus riches.

Le Vrai Faux de l’Info, avec vous, Géraldine Woessner, et les inquiétudes d’un paléoanthropologue

Le spécialiste du comportement des grands singes Pascal Picq était l’invité d’Europe 1 cette semaine. Et il s’inquiète des ravages de la paresse intellectuelle sur nos sociétés, qui ne lisent plus, n’échangent plus, ne pensent plus. Elles laissent ce soin aux machines, et risquent de disparaître.

L’espérance de vie régresse partout, sauf en France et en Italie. C’est vrai ou c’est faux ? 

C’est complètement faux Thomas. Et je me demande d’où Monsieur Picq tient ses données : selon l’organisation mondiale de la santé, l’espérance de vie augmente, au contraire, à peu près partout, sauf en Syrie, où elle s’est effondrée depuis cinq ans pour les raisons que l’on sait. En moyenne, un enfant né en 2015 peut espérer vivre cinq ans de plus que s’il était né en 2000. Parce qu’on progresse contre les maladies infectieuses, les maladies chroniques, que le niveau de vie global s’est amélioré en Asie, en Afrique, que la prévention des cancers, des maladies cardiaques ne cesse de se renforcer. Alors évidemment un japonais vit toujours 33 ans de plus, qu’un Siera Léonais, mais non, l’espérance de vie ne décline pas. Des chercheurs de l’OMS et du College impérial de Londres viennent au contraire de montrer qu’elle va continuer à progresser, dans les pays les plus riches, dans les 10 ans qui viennent. Alors. D’où vient cette perception que ça régresse.

Ça fait partie de ces petites musiques qu’on entend

Bien de quelques facteurs qui sont inquiétants, et qui brouillent la vision d’ensemble. Ce qui se passe d’abord, aux États-Unis. C’est le seul pays développé, dans lequel l’espérance de vie a reculé en 2015, alors très légèrement, d’un petit mois, mais c’est la première fois depuis 93, l’épidémie de Sida. Et qu’est-ce qu’on apprend, Thomas. Que c’est dû, aux mortalités infantiles, et maternelles, qui progressent, donc un problème d’accès aux soins, au développement, de l’obésité, des maladies qui y sont corrélées, aux morts violentes et surtout qu’un groupe spécifique est touché : les hommes blancs, pauvres, de plus de 50 ans, les plus frappés par la désindustrialisation.  Alcool, drogue et suicide font des ravages dans ce groupe, leur espérance de vie décline, puisque leur mortalité augmente. Ensuite, quand on parle d’espérance de vie, il y a une autre donnée qui est intéressante : c’est l'espérance de vie, en bonne santé. Combien d’années va-t-on vivre, sans être important : et cet indicateur, il progresse, on vit globalement en meilleure santé mais moins vite que l'espérance de vie globale. Il décline même dans certains pays touchés par la crise, la Grèce, le Portugal, dans d’autres où le système de soin est loin d’être parfait, Grande-Bretagne, États-Unis, ça pose la question des systèmes de santé, de retraite, d’accès aux soins. Et c’est cela qui est important pour nos politiques publiques.