La France est-elle le 16ème pays en Europe à accueillir des migrants ?

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Le défenseur des droits Jacques Toubon a affirmé que la France était le 16ème pays d'accueil des migrants en Europe. Vrai ou faux ?

La loi sur l’Asile déchaîne les passions.

Alors que le texte adopté à l’Assemblée poursuit son chemin au Sénat, ses opposants ne désarment pas. L’extrême droite y voit le prélude à une submersion migratoire, la gauche au contraire critique un texte qui mettrait en péril les droits des migrants. Une position que défend le Défenseur des Droits Jacques Toubon.

Nous sommes le 16ème Pays en Europe à accueillir des migrants. Vrai ou Faux ?

C’est vrai. Même si, en l’occurrence, ce chiffre reste contesté, puisque Jacques Toubon s'appuie sur une statistique diffusée par l’Union Européenne : celle des demandes d’asile enregistrées en 2016 dans les États Membres. Il y en a eu 1,106 million en tout, et si la France en a reçu beaucoup, elle n’arrive qu’au 16ème rang des pays d’accueil par rapport à la taille de sa population. En 2017 toutefois, ce classement a changé. Avec 11% du total des demandes d'asile reçues sur son sol, la France se place au 12ème rang, toujours par rapport à sa taille. D’où l’idée agitée par le Front national notamment que monsieur Toubon manipulerait les chiffres, que c'est dans son ensemble qu'il faut regarder l'immigration.

Alors nous avons regardé, en reprenant les chiffres de la Commission européenne depuis 2009, croisés aux données de population. En neuf ans, la France a reçu un peu moins de 600.000 demandes d’asile. C’est considérable (seule l’Allemagne en a reçu d’avantage). Mais proportionnellement à notre population, qui est quand même la deuxième en Europe, le classement reste le même : la France arrive en 15ème position, ces neuf dernières années, des pays d’accueil.

Et quand on regarde l’immigration totale, c'est-à-dire le nombre de titres de séjour accordés chaque année, elle n'apparaît pas non plus particulièrement accueillante. La France a délivré un peu moins d’1,9 million de titres de séjour à des extra-européens entre 2008 et 2016. Moins que l’Italie, trois fois moins que la Grande-Bretagne. Nous sommes au 21ème rang par rapport à notre population.

D'où vient cette perception complètement inverse alors, d'une grande partie de la population ?

D'abord, de ce que la structure de cette immigration n'est pas la même. La France accorde peu de visas de court séjour. L’immigration économique est résiduelle, moins de 10% du total. L’immigration familiale est plus importante, même si on reste dans la moyenne basse en Europe. En fait ce qui a surtout changé, c'est moins les flux migratoires, qui restent assez constants sur une très longue période, que la structure interne de nos sociétés, celles des pays d'accueil. Comme notre natalité baisse, la population n'augmente plus, en Europe, que grâce au solde migratoire, c’est-à-dire la différence entre les entrées et les sorties d’étrangers. L’Insee le confirme depuis quelques années déjà. En France, ce solde migratoire oscille depuis trente ans, autour de 50 à 100.000 par an et un peu moins de 30% des enfants qui naissent ont au moins un parent né à l'étranger.