La région Paca est-elle l’une de celles qui investissent le moins dans l'apprentissage ?

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La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a affirmé lundi sur Europe 1 que la région Paca était l'une de celles qui investissaient le moins dans l'apprentissage. Vrai ou faux ?

Le projet de loi "Avenir Professionnel", qui contient un volet apprentissage, sera présenté vendredi en conseil des ministres, mais l’esprit même de la réforme, qui bouleverse le financement de l’apprentissage, fait grincer des dents. La région Paca a gelé ses investissements dans l’attente d’y voir clair. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, lui répond.

"Il y a des régions qui investissent beaucoup sur l’apprentissage, c’est le cas des Hauts-de-France. Mais c’est le cas aussi en IDF, en Nouvelle-Aquitaine, en Centre-Val de Loire. Une des régions qui investit le moins, c’est la région Paca, mais c'est son président qui s'exprime le plus pour dire qu'il est contre. Qu’il fasse d’abord, et après on discute."

La région Paca est l’une de celles qui investissent le moins dans l'apprentissage. Vrai ou Faux ?

C’est faux. Et les chiffres du ministère de la Cohésion des Territoires le confirment : en 2017, la région Paca a dépensé 60 euros par habitant pour la formation professionnelle et l'apprentissage, c’est plus que l’Île-de-France (53 euros). Et pour 2018, le budget voté est en hausse : 140 millions devaient être consacrés au seul apprentissage. Cela représente 5,7% du budget total de la région. L'Île-de-France, elle, y consacrera 5%, 4% pour l’Occitanie… En réalité, la région Paca est l’une de celles qui investissent le plus, cette année, juste derrière les Hauts-de-France. C’est aussi l’une de celles qui voient depuis trois ans le nombre de leurs apprentis augmenter.

En fait, cette querelle entre la ministre et la région relève surtout de l’affichage. Tout le monde s’accorde à dire qu'une réforme des financements est nécessaire, mais les régions s'inquiètent de l'esprit. Aujourd’hui, elles financent les centres de formation des apprentis, les CFA, avec le produit qu’elles perçoivent de la taxe d’apprentissage (51%). Demain, ce sont les branches professionnelles qui géreront cet argent. Un tarif sera fixé pour chaque formation, les centres seront financés selon le nombre d'apprentis qu'ils accueillent. La région Paca, qui avait des ressources de 120 millions, n’en aura plus que 25 l’an prochain, et c’est ce qu’elle dénonce.

Mais les investissements seront garantis, assure le gouvernement.

Oui, le projet le prévoit. Sur le 1,6 milliard que touchent les régions aujourd'hui pour l'apprentissage, elles conserveront 430 millions pour rénover les centres, ou compenser les disparités de territoire. Mais comme les branches professionnelles décideront quelles formations financer, beaucoup d'acteurs locaux redoutent qu'on privilégie les grands centres, où les coûts seront optimisés, et que des sections soient fermées dans les zones reculées. L’Association des Régions de France craint la fermeture de nombreux petits CFA. Et les exemples abondent. Une formation de boucher-charcutier-traiteur coûtait l’an dernier 7.174 euros à Brest, dans un grand CFA, mais 19.201 euros à Quimper. Pourtant, on a aussi besoin de bouchers à Quimper…

Est-ce que l'argent prévu pour compenser cela (250 millions d’euros, selon le projet de loi) sera suffisant ? Les régions estiment les besoins à 380 millions. Et elles soulignent surtout que les 400 branches professionnelles n’ont pas toutes les structures adaptées, au niveau local, pour prendre les bonnes décisions. Qui, dans la branche des ébénistes, se battra pour une section en Lozère ? La réforme réduit le pilotage public de l’apprentissage et les possibilités d’aménagement du territoire… C'est, en réalité, tout l'enjeu de ce bras de fer.