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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce lundi, il revient sur la décision du gouvernement de fermer les commerces non-essentiels. Il pouvait encadrer la liberté mais il a choisi de la restreindre encore plus.

Jean Castex a donné ce dimanche soir un tour de vis à l’encontre des grandes surfaces pour leur interdire, à partir de demain, de vendre autre chose que des produits de première nécessité.
C’est la réponse qu’a choisie le gouvernement face à la fronde des petits commerçants et des organisations patronales, et au soutien massif de centaines de maires en France, y compris dans la plupart des très grandes villes ou agglomérations du pays. Tous dénonçaient une inégalité de traitement entre petit commerce et géants de la distribution et de l’Internet.

C’est cette inégalité que le Premier ministre a voulu corriger.

Oui, il avait pour cela deux options et il a pris la plus mauvaise. Il pouvait autoriser les petits commerces à accueillir au compte-goutte les clients et leur permettre ainsi de survivre. Non, il a préféré interdire aux plus grands de vendre des livres, des vêtements, tout ce qui n’est pas de première nécessité. Il pouvait encadrer la liberté mais il a choisi de la restreindre encore plus.

Mais c’est au nom de l’égalité ou de l’équité justement.

C’est un problème classique, pour les pouvoirs publics, d’avoir à rechercher le bon réglage, le bon équilibre entre liberté et égalité. Sauf qu’avec les mesures annoncées par Jean Castex, l’égalité n’est pas davantage rétablie. La Fnac ne vendra plus de livres mais Amazon aura le champ encore plus libre. Car bien sûr, le commerce sur Internet, impossible de l’interdire.

En tout cas, ce sont les libraires les plus remontés.

Oui, et qui servent d’étendard pour le reste du commerce parce que la culture, c’est l’argument qu’aucun gouvernement ne peut balayer d’un revers de main. Mais derrière eux, il y a la cohorte de tous ceux qui n’ont pour perspectives que de rater la période des achats de Noël, et de ne vivre ou survivre que grâce à des aides du gouvernement. Sauf qu’une économie ne peut pas tenir comme ça, avec les seuls subsides de l’État.

Bruno Le Maire et Elisabeth Borne, les ministres des Finances et du Travail, disent que si les commerces ouvrent, c’est qu’il n’y a plus de confinement.

Et pourquoi ne disent-ils pas la même chose des services publics, des écoles, qui heureusement restent ouverts, ou de toutes les entreprises qui continuent à tourner parce qu’on ne peut pas mettre totalement à l’arrêt une deuxième fois le pays ? Non, le gouvernement a laissé s’installer l’idée qu’il prenait une décision injuste, qu’il tordait sciemment l’égalité entre des business concurrents, et qu’en plus, il le faisait au détriment des plus faibles. Nicolas Beytout ne discute pas les arguments sur la nécessité du reconfinement, et on voit bien qu’autour de nous, les autres pays y viennent de plus ne plus. Mais pour qu’une décision soit acceptée, surtout si elle est contraignante et qu’elle prive les gens de liberté, il faut qu’elle soit ressentie comme équitable et juste. Le gouvernement a raté ça. Le confinement n’en sera que plus difficile à faire respecter.