Titres-restaurant : la cour d'appel confirme les pratiques anti-concurentielles

Tickets restaurant
Edenred qui avait été le plus lourdement sanctionné avec 157 millions d'euros d'amende, a annoncé envisager de se pourvoir en cassation (illustration). © ALAIN JOCARD / AFP
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avec AFP / Crédit photo : ALAIN JOCARD / AFP
En décembre 2019, l'Autorité de la concurrence avait condamné Sodexo, Edenred (émetteur des Tickets Restaurant), Natixis Intertitres et Up (émetteur des Chèque Déjeuner) à 415 millions d'euros d'amende pour "entente". Ces sanctions ont été confirmées par la cour d'appel de Paris ce jeudi et Sodexo ainsi qu'Edenred annoncent se pourvoir en cassation. 

Pour la cour d'appel de Paris, les sociétés émettrices de titres-restaurant se sont bien rendues coupables de pratiques anticoncurrentielles : les sanctions infligées par l'Autorité de la concurrence en 2019 ont été confirmées jeudi, Sodexo et Edenred annonçant se pourvoir en cassation.

415 millions d'euros d'amende pour "entente"

En décembre 2019, l'Autorité de la concurrence avait condamné Sodexo, Edenred (émetteur des Tickets Restaurant), Natixis Intertitres et Up (émetteur des Chèque Déjeuner) à 415 millions d'euros d'amende pour "entente", ainsi que leur organisme commun, la CRT (centrale de Règlement des Titres) désormais fermée (depuis février 2023). La cour d'appel "confirme la décision par laquelle l'Autorité de la concurrence a sanctionné ces acteurs du marché des titres restaurant au titre de pratiques anticoncurrentielles", qui sont "de deux ordres", selon un communiqué jeudi.

La première "consiste en des échanges d'informations commerciales sensibles, ayant duré pendant plusieurs années, à un rythme rapproché, entre les principaux concurrents, ayant facilité entre eux l'adoption et la mise en œuvre d'une collusion durable consistant, sur un marché en croissance continue, à s'assurer de la stabilité de la position globale de chacun d'eux". La seconde pratique "consiste en l'instauration de conditions d'adhésion à la CRT, non objectives, discriminatoires et non transparentes, et de mesures destinées à dissuader les émetteurs de se faire concurrence par l'innovation en se lançant individuellement dans l'émission de titres restaurant dématérialisés". La cour d'appel rappelle que l'activité de la CRT consistait à traiter les titres papier reçus des restaurateurs et des commerçants et préparer leur remboursement pour le compte des émetteurs.

Cassation

Edenred qui avait été le plus lourdement sanctionné avec 157 millions d'euros d'amende, a annoncé à l'AFP envisager de se pourvoir en cassation. Le groupe, qui a déjà réglé cette amende, "réfute catégoriquement les deux griefs qui lui sont reprochés et ne partage pas l'analyse de la Cour d'Appel de Paris, notamment son appréciation du caractère concurrentiel du marché français des titres-restaurant". Sodexo, qui avait écopé de 126 millions d'euros d'amende, une somme déjà réglée, "conteste avec la plus grande fermeté cette décision et a décidé de se pourvoir en cassation", selon une déclaration transmise à l'AFP.

Sodexo "contribue positivement à l'activité économique du pays en apportant des clients aux restaurateurs et commerçants et en permettant aux entreprises clientes d'octroyer des titres restaurant à leurs employés", se défend l'entreprise. Le groupe précise que son projet de scission de son activité de titres-restaurant, baptisée Pluxee, "se poursuit avec un objectif de cotation début 2024 sur Euronext Paris".

Indemnisations

Les deux autres acteurs, Natixis Intertitres (aujourd'hui appelé Bimpli) et Up avait écopé respectivement de 83 millions d'euros d'amende et de 45 millions d'euros. La cour d'appel "confirme les sanctions pécuniaires, sauf à l'égard d'un émetteur pour lequel leur montant a été réduit en raison de difficultés financières affectant sa faculté contributive", sans préciser lequel. La décision de la cour d'appel était attendue par les restaurateurs : une action a été lancée par le syndicat patronal GHR pour fédérer les commerçants qui s'estiment lésés par cette entente en enregistrant leurs recours sur la plateforme sécurisée indemnisationtr.fr.

"Cette entente illégale pourrait avoir eu comme conséquence des commissions abusives prélevées aux restaurants et commerces par les émetteurs de titres-restaurant, et ce sur chaque paiement depuis 2002 et jusqu'à ce jour", peut-on lire sur cette plateforme. "Les indemnisations pourraient se chiffrer en milliers, voire en dizaines de milliers d'euros pour chaque commerçant selon la durée et le volume de titres-restaurant concernés", est-il écrit. Edenred, qui souligne qu'il n'y a pas eu d'entente sur les prix, avait balayé le sujet lors de la présentation de ses résultats trimestriels en octobre.

Les titres-restaurant, utilisés par 5 millions de salariés, devraient faire l'objet d'une réforme, afin notamment d'accélérer leur dématérialisation. Bercy réfléchit également à pérenniser la possibilité d'acheter avec ces titres des produits non directement consommables en supermarché, censée prendre fin en décembre 2023.