Livret A : vers une probable nouvelle hausse du taux

© DENIS CHARLET / AFP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Le gouverneur de la Banque de France et le ministre de l'Économie devraient divulguer jeudi le nouveau taux du Livret A, actuellement à 3%. La formule de calcul du Livret A devrait aboutir à un taux entre 4% et 4,1%, selon les experts. Mais la banque de France semble d'ores et déjà préparer le terrain à une hausse plus limitée.

"Il est sage d'être prudent" : le gouverneur de la Banque de France et le ministre de l'Économie devraient divulguer jeudi le nouveau taux du Livret A, actuellement à 3%. Si une hausse est attendue pour le 1er août, elle pourrait bien être inférieure à ce que prévoit la loi.

Un taux à 4% ?

En effet, en cas de circonstances jugées exceptionnelles, les autorités ont la possibilité de déroger à la formule de calcul qui prend en compte d'une part la hausse des prix et d'autre part les taux interbancaires des derniers mois, auxquels les banques s'échangent de l'argent à court terme. 

C'est ce qui s'était passé en février 2022 lorsque la Banque de France avait proposé d'arrondir à 1%, au lieu de 0,8%, puis en février 2023, mais dans l'autre sens cette fois, lorsque l'institution avait proposé 3% au lieu de 3,3%.

Cette fois-ci, si l'inflation se maintient à 4,5% sur un an en juin lors de la publication du chiffre définitif de l'Insee jeudi, la formule de calcul du Livret A devrait aboutir à un taux entre 4% et 4,1%, selon les experts. Mais la banque de France semble d'ores et déjà préparer le terrain à une hausse plus limitée.

Charge de 1,4 milliard d'euros

"Il faut préserver d'un côté l'intérêt des épargnants, bien sûr, et de l'autre un secteur ultrasensible pour les Français, qui est le secteur du logement, parce que le Livret A sert à financer en particulier le logement social et plus largement le crédit immobilier", a temporisé mardi matin sur franceinfo son gouverneur François Villeroy de Galhau.

Face à la "bonne nouvelle" pour les épargnants que constitue le recul de l'inflation - passée de 6% au début de l'année à 4,5% lors de l'estimation provisoire du mois de juin -, "je crois qu'il est sage d'être un peu prudent sur le taux du Livret A en pensant aussi au bon financement du logement", a-t-il ajouté, notant qu'il "y a toujours une marge d'appréciation".

Si un taux d'environ 4% "aurait comme avantage d'être proche de l'inflation et de garantir un rendement réel faiblement négatif voire nul", a estimé lundi dans une note Philippe Crevel, directeur du Cercle de l'épargne, de nombreux acteurs plaident eux pour un maintien à 3%.

"L'épargnant a été protégé quand les taux sont devenus négatifs" il y a quelques années, avec un plancher (maintenu) à 0,5%, a rappelé à l'AFP Alexandre Holroyd, député Renaissance et président de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, qui gère 60% des montants déposés par les quelque 55 millions de Français détenteurs d'un Livret A.

"Il me paraît logique que le revers de la médaille soit qu'en cas de hausse très significative, le même mouvement existe pour protéger" le logement social et les collectivités locales, dont les prêts sont en partie indexés sur le taux du Livret A, a-t-il ajouté.

Dans un communiqué diffusé lundi, l'Union sociale pour l'habitat a demandé le maintien du taux à 3%, arguant "qu'un point d'augmentation se traduit, en année pleine, par une charge financière supplémentaire de 1,4 milliard d'euros" pour les bailleurs, un montant qui "s'ajouterait au coût des précédentes réévaluations (...) qui ont fortement grevé les capacités d'investissement des organismes HLM".

Compromis à 3,5% ?

Lors d'un entretien avec l'AFP, le directeur général de la CDC Eric Lombard a estimé que "ce ne serait pas logique que le taux du Livret A, qui est liquide, garanti et défiscalisé, soit le plus élevé" parmi les produits d'épargne, alors que certains sont nettement plus risqués, et donc traditionnellement mieux rémunérés.

Une hausse du taux pèse aussi sur les banques, qui gèrent environ 40% des montants du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire. Les banques françaises ont toutefois globalement réalisé de belles performances ces dernières années.

Dans ce contexte, "il est difficile de concilier ces intérêts contradictoires" et "les autorités pourraient choisir une solution de compromis avec une augmentation du taux du Livret A et du LDDS à 3,5%", estime Eric Dor, directeur des Études économiques de l'IESEG School of Management. Une prédiction partagée par Philippe Crevel.