Pourquoi appelle-t-on les auteurs de lettres anonymes des "corbeaux" ?

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Stéphane Bern, édité par Alexis Patri , modifié à
Dans l'émission d'Europe 1 "Historiquement vôtre", Stéphane Bern se penche sur les racines d'une expression du quotidien. Mardi, il s'intéresse à l'origine de la métaphore très française du "corbeau", cet auteur de lettres de menace ou de dénonciation qui préfère masquer son identité et ne pas signer ses écrits.

Stéphane Bern propose chaque jour, dans Historiquement vôtre avec Matthieu Noël, de partir à la découverte de ces expressions que l'on utilise au quotidien sans forcément connaître leur origine. Mardi, l'animateur nous explique les racines de la métaphore du "corbeau", un oiseau de mauvais augure qui désigne un menaçant auteur anonyme.

Quand, dans un village reculé de la France des clochers, un malotru s'amuse par courrier à dire du mal d’autres personnes (ou quand "gromoche69" sur Twitter dit pis que pendre d'une YouTubeuse), on peut parler d'un "corbeau". Un corbeau, c'est donc une personne anonyme qui va menacer ou dénoncer des choses souvent de façon malveillante.

L'idée que cet oiseau révèle une vérité douloureuse remonte à la mythologie romaine et au dieu Esculape, le dieu de la médecine. Sa mère, Coronis, trompait son père Apollon alors qu'elle était enceinte. Un corbeau, qui d'ailleurs était blanc, va révéler à Apollon l'adultère. Ce dernier, fou de douleur et de jalousie, fait assassiner Coronis. Elle aura juste le temps de donner naissance à Esculape, avant de mourir.

Mythologie romaine et affaire de Tulle

Apollon considérant par la suite que le corbeau avait fait une mauvaise action en lui révélant la vérité le rendra noir, ceci expliquant pourquoi ils ont cette couleur aujourd'hui. La légende du corbeau est restée. Depuis, on parle d'un corbeau pour désigner celui qui annonce des mauvaises nouvelles.

Mais c'est une autre histoire, plus récente, qui va populariser le terme dans la langue française. A Tulle, ville chère à François Hollande, entre 1917 et 1922, une multitude de lettres anonymes vont être envoyées à travers tout le village. Tout le monde en prend pour son grade et tout le monde va finir par suspecter tout le monde.

C'est une dictée collective donnée à tout le village qui permettra de trouver la coupable. Un film d'Henri Georges Clouzot appelé Le Corbeau, avec Pierre Fresnay et Ginette Leclerc, racontera cette histoire et achèvera de populariser l'expression. Dorénavant, l'oiseau anonyme de mauvaise augure sera appelé en France un corbeau.