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Alexis Patri , modifié à
Les deux sœurs musiciennes Julie et Camille Berthollet, invitées d'Anne Roumanoff, expliquent les problèmes de sexisme et d'agressions sexuelles qui gangrènent le milieu de la musique classique. Elles espèrent pouvoir changer la situation pour la jeune génération d'artistes à venir.
INTERVIEW

Elles appelaient il y a quelques mois à un "MeToo de la musique classique". Les musiciennes Julie et Camille Berthollet reviennent au micro d'Anne Roumanoff sur les violences sexuelles dans ce milieu. Selon elles, la prise de conscience est réelle, même si elles regrettent qu'elle arrive "trop lentement et trop tard". "C'est en train de changer", observe Julie Berthollet, qui rappelle que cette question reste d'actualité.

Un problème "de notoriété publique"

Julie Berthollet ne comprend pas que certains se soient étonné que le milieu de la musique classique soit concerné par les violences sexistes et sexuelles. "Dès que quelqu'un va dénoncer dans un milieu, on va dire 'Ah mais dans ce milieu-là aussi !'. Evidemment là aussi, cela a lieu partout", appuie-t-elle. "Dans le milieu de la musique classique, il y une histoire très importante, beaucoup de traditions, mais il y a aussi des choses qui doivent bouger."

Ces problèmes ont pour Camille Berthollet longtemps été "de notoriété publique dans le milieu". Elle explique que tout le monde savait et personne ne disait rien, forçant les élèves à s'alerter entre eux des professeurs avec lesquels il fallait éviter de rester seule. 

Protéger les générations suivantes

Les deux sœurs ont donné plusieurs master class dans lesquelles elles ont abordé le sujet, notamment auprès des plus jeunes. "Quand on voit la génération des 10-15ans, on se sent un peu comme des grandes sœurs", confie Julie Berthollet. "On a envie de les protéger, qu'ils sachent dire non et que les professeurs soient respectueux."

"On veut surtout éviter que ce qui est arrivé dans le passé arrive aux générations suivantes", résume Julie Berthollet, consciente que le temps ne se rattrape pas. "Pour la génération précédente, on ne peut pas faire grand chose, si ce n'est que constater, Et, avec un peu de chance, rendre justice."

"Dès qu'il y a du pouvoir, il peut y avoir des dérives"

La cadette rappelle que les problèmes soulevés par le mouvement MeToo dans la musique classique ne se résument pas à une situation "professeur-élève fille". "On parle très peu des garçons qui ont eu ces problèmes-là, eux aussi", regrette l'altiste, qui ajoute que certains chefs d'orchestre sont visés par des accusations. "Il faut prendre le sujet dans sa globalité et surtout éduquer pour que ça n'arrive plus."

L'analyse que pose la musicienne sur ces abus peut en effet s'appliquer bien au-delà du milieu de la musique. "C'est toujours le problème de hiérarchie", observe-t-elle. "Dès qu'il y a du pouvoir, c'est là qu'il peut y avoir des dérives."

"Il y a encore beaucoup de choses à faire pour l'égalité", résume Julie Berthollet. "En France, les chefs d'orchestre sont dans environ 96% des cas des hommes. Les orchestres sont encore très majoritairement blancs", rappelle-t-elle. Mais la musicienne semble optimiste pour l'avenir. "Il y a encore énormément de choses à faire. Mais ça bouge gentiment."