Une peinture d'Elisabeth Vigee Le Brun représente la reine Marie-Antoinette.
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L'exposition "Marie-Antoinette, métamorphose d'une image" démarre ce mercredi à la Conciergerie, à Paris, l'endroit même où la reine de France a vécu ses dernières semaines.

Reine dépensière et détestée par son peuple, Marie-Antoinette continue de fasciner les foules du monde entier. Celle qui finit sa vie tragiquement, sur l'échafaud, sera pourtant adulée comme une sainte au XIXe siècle par les royalistes, jusqu'à devenir, depuis une vingtaine d'années, une véritable icône pop.

Décrite comme "une jeune femme moderne" par l'historien Antoine de Baecque, interrogé mercredi sur Europe 1, elle est devenue une sorte "d’icône de mode, de fashionista de la haute-couture", d'après lui. A tel point que l'exposition "Marie-Antoinette, métamorphose d'une image" lui est consacrée à la Conciergerie à partir de ce mercredi et jusqu'au 26 janvier. Pour l'occasion, le parfumeur Francis Kurkdjian, patron de la maison du même nom, était l'invité inattendu d'Europe 1 ce mercredi matin. 

Marie-Antoinette à "l'avant-garde d'un renouveau et d'un retour à la nature"

Le parfumeur possède un lien particulier avec la reine de France puisqu'il a reconstitué son parfum en 2006, en s'appuyant sur des documents originaux d'époque et grâce à l'aide d'une historienne. "La reine sentait assez différemment de son époque. Elle était à l'avant-garde d'un renouveau et d'un retour à la nature. Elle délaisse, contrairement à Louis XV par exemple, les notes très musquées, ambrées et animales, qui sont lourdes", a-t-il détaillé au micro d'Europe 1.

La reine privilégiait plutôt les motifs fleuris, notamment la rose. "Elle aimait la rose, la fleur d'oranger et surtout les tubéreuses, une fleur tropicale qui sent comme de la fleur d'oranger très épicée et très verte. C'est un parfum entêtant. Elle aimait l'iris également. Ce sont des notes légères pour l'époque, mais qui restent lourdes". La reine a, en effet, "débarrassé la parfumerie de l'époque de toutes ses notes ambrées et animales", a-t-il précisé. "Quand un parfumeur parle d'une note animal, c'est souvent quasiment fécal, ça ne sent pas très bon et ça peut même sentir le crottin de cheval".

"Une reine qui provoque "passions et déchaînements"

Francis Kurkdjian s'est inspiré de documents originaux pour travailler la formule de son parfum. "Au tout début, quand j'ai commencé à sentir les premiers effets, qui diffèrent vraiment de ce que je fais habituellement - soit pour ma maison soit pour d'autres marques -, je me suis demandé si je devais changer la note". Car les odeurs et parfums du XVIIIe siècle diffèrent grandement des senteurs auxquelles nos nez se sont habitués aujourd'hui. "A l'époque, les aristocrates se nourrissent de viandes faisandées, de ragoûts et de choses macérées qui sont olfactivement très puissantes. Les corps ont donc une odeur particulière et puis il y avait aussi cette idée de manque d'hygiène", a-t-il précisé. 

Le parfumeur décide finalement de rester le plus fidèle possible : "Au bout d'un moment, j'ai arrêté de vouloir trafiquer ou adapter le parfum à notre nez d'aujourd'hui. Je voulais respecter une forme de vérité historique. Je pense qu'il était nécessaire, pour avoir une impression de l'époque, de respecter la forme olfactive et les règles de composition qui m'étaient données par mes ancêtres parfumeurs".

Le parfumeur a admis ne pas être indifférent au personnage de Marie-Antoinette : "C'est une personnalité historique qui provoque les passions et les déchaînements". "Il y a quelque chose d'assez attendrissant chez cette femme un peu seule, au destin tragique. C'était une mère très proche de ses enfants, ce qui était très particulier pour l'époque. Je trouve qu'il s'agit de la facette la plus touchante de Marie-Antoinette. C'est cette féminité là qui était, pour l'époque, très moderne", a-t-il conclu.

>> Regardez l'intégralité de l’entretien de Francis Kurkdjian