Eric-Emmanuel Schmitt : "Je suis un écrivain qui aurait adoré se passer des mots"

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A.D , modifié à
L'écrivain était l'invité d'Isabelle Morizet dimanche après-midi. Il a retracé son parcours au travers des arts.
INTERVIEW

Il est un auteur prolifique et "impatient" de son propre aveu. Eric-Emmanuel Schmitt a ainsi acheté le Théâtre Rive gauche "pour ne pas avoir à appeler les directeurs de théâtre" et dépendre d'eux pour que ses textes soient joués. C'est donc dans son établissement qu'il présente son adaptation de Pretty little liars, une pièce de Broadway rebaptisée Confidences, et qui derrière l'humour propose une réflexion sur l'engagement. Invité dans l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, l'écrivain a évoqué ses multiples fronts d'activités.

Acteur "de remplacement". En plus d'avoir acheté un théâtre, Eric-Emmanuel Schmitt est devenu acteur "de remplacement" : il a dû au pied levé reprendre le rôle de Francis Lalanne dans Monsieur Ibrahim. Pour cette première expérience, il a ressenti une "énergie incroyable qui venait de la salle", un sentiment "vertigineux". "Je vois toujours le public comme une patte de chat. Selon le comportement, elle est caressante ou elle griffe." Le public s'est montré plutôt conquis, mais il confie avoir vomi en coulisses juste avant de monter sur les planches. "L’esprit tient mais le corps lâche". Ce premier trac ne l'a pas empêché de renouveler régulièrement l'expérience de la scène.

"Écrivain, c'est ma nature". Mais sa petite musique fondamentale reste l'écriture. Même si - surprise - c'est la musique qu'il érige au rang supérieur. "Je suis un écrivain qui aurait adoré se passer des mots (...) Les mots articulent le sens et la musique dit l’ineffable", juge-t-il. Il reconnait néanmoins qu'être écrivain est sa "nature. J’ai trouvé ma place sur cette terre (...) J'écris comme je respire."

Amélie Nothomb, une maie de 25 ans. Sa bibliographie lui a d'ailleurs permis de faire partie de l'Académie Goncourt, un rôle qu'il a accepté en renonçant à l'Académie française, les deux état incompatibles. Il siège également à l'Académie royale de Belgique à l'instar de sa compatriote Amélie Nothomb. "On est amis depuis 25 ans. C'est quelqu’un que j’admire autant comme écrivain que comme personne parce qu’il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Elle est unique, singulière, supérieurement intelligente, ironique, cachant de la tendresse sous le sarcasme, mais tendre au fond. C'est une très belle personne", la décrit-il, élogieux.

La leçon de travail de son grand-père

Le grand-père d'Eric-Emmanuel Schmitt était un artisan bijoutier joaillier sertisseur à Lyon. "Il n'était pas riche mais des fortunes entre les mains". A la fin de sa journée de travail, son aïeul décrochait le tablier qui l’unissait à son établi et qui recueillait la poussière d’or qu'il glissait dans une pipette en verre", décrit le romancier, qui à l'époque se moquait gentiment. "Je lui disais qu’il n’y avait rien, il me disait tu verras".

A la mort de son grand-père, sa grand-mère ne pouvait que vivotait avec une petite pension. "Et en fait avec la poussière d’or, mon grand-père avait coulé six ou sept lingots. Cette poussière d’or a permis à ma grand-mère de vivre correctement. Pour moi cette poussière d’or qui devient lingot et permet la vie est vraiment la métaphore du travail. "