Thierry Frémaux 5:44
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Matthieu Charrier , modifié à
Dans la nouvelle émission cinéma d'Europe 1, "Clap", un invité se prête chaque semaine à un portrait chinois autour du cinéma. Ce samedi, c'est Thierry Frémaux, le délégué général du festival de Cannes, qui répond à ce questionnaire de Proust version Septième art.
INTERVIEW

Tous les samedis pendant une heure dans Clap, le spécialiste cinéma d'Europe 1 Mathieu Charrier et ses chroniqueurs font le tour de l'actualité du Septième art. Chaque semaine, un invité, qu'il soit ou non du monde du cinéma, se soumet à un questionnaire de Proust version 7e art. Le directeur délégué général du Festival de Cannes, Thierry Frémaux, a accepté de se prêter au jeu du portrait chinois. 

Votre premier souvenir de cinéma ?

"Je ne me souviens pas du premier souvenir. J'en ai plusieurs qui font la queue. Mais j'ai le souvenir, évidemment, de Blanche-Neige - tous les enfants du monde ont commencé par les films Disney -, mais aussi d'une projection, dans un ciné-club où m'avait emmené mon père, de ce que je crois être La Chevauchée fantastique de John Ford dans les années 1960.

Votre meilleur souvenir en salle ?

À Lyon, dans une salle d'art et essai, je dirais que j'ai un souvenir particulier du Parrain 3. Je me souviens être allé seul à la projection, et donc j'étais reparti seul dans la rue. Comme ça, personne ne me parlait. C'était très bien, j'étais encore avec le film.

Pour vous, Le Parrain 3 est le meilleur opus de la trilogie ?

Non, ça n’est pas le 3. On dit toujours que Le Parrain a cette particularité que le 2 est meilleur que le premier, ce qui se discute. Mais en tout cas, le 3, qui a longtemps été un film mal aimé, est tout à fait du niveau des deux autres.

Votre séance de cinéma la plus dingue ?

C'était une séance en plein air, il y a des années, avec Georges Lautner et Les Tontons flingueurs. Je ne connaissais pas Georges. Je l'avais invité. Il m’avait demandé pourquoi. Parce que je trouve le films formidable, bien écrit, bien joué et bien mis en scène. […] À l'époque, il n'y avait pas encore eu le revival Audiard et Lautner. On était les premiers, au festival Lumière de Lyon, à ne pas faire de religion et à trouver que c'était un film formidable et un cinéma formidable.

La séance avait été assez dingue. Venantino Venantini (qui interprète Pascal, ndlr) était là, et lorsque Jacques Dumesnil met ses mains sous le lit où il y a deux pistolets, il y a eu un mouvement dans la salle. Georges m’a dit : 'Ah, ils connaissent le film !'

Le film que vous avez le plus vu ?

C'est pourtant un film très long, un film de six heures : Novecento ("1900" en français, ndlr) de Bernardo Bertolucci. Je l’ai vu de nombreuses fois, mais aussi Le Parrain dont je parlais.

J'ai également beaucoup vu un film de Wim Wenders qui s’appelle Au Fil du Temps. Trois heures en scope noir et blanc d'un film d'errance où deux loosers parcourent la frontière de l'Allemagne de l'ouest et de l'Allemagne de l'est, du nord au sud, en réparant les projecteurs dans les salles de cinéma des petits villages où ils passent.

Votre réalisatrice ou réalisateur préféré ?

Vu ma fonction, je vais essayer de prendre un mort ! Je dirais, pour la France, Sacha Guitry et Jean Renoir. Mais j’ajouterais aussi Jean-Luc Godard, qui est hors concours.

Ma réalisatrice préférée, c’est Agnès Varda. On la cite trop maintenant comment une cinéaste pratique parce qu'elle incarne quelque chose du féminisme au cinéma. Mais c'est aussi une artiste, y compris dans son travail méconnu, dans certains films qui n'ont pas toujours été aimés à leur sortie, dans son travail de documentariste, et dans la façon qu'elle avait de parler du cinéma. Agnès est dans un autre firmament, mais je pense à elle très souvent.

Et pour finir, la bande originale qui a le plus marqué votre vie ?

Il était une fois dans l'Ouest ! Je n'avais pas le droit de voir ce film parce qu'il était interdit aux moins de 13 ans. J'avais pourtant une passion pour ce film, dont J'avais vu les images. J’en avais d'abord aimé la musique (composé par Ennio Morricone, ndlr). Le premier vinyle que j'ai acheté - à l’époque ça coûtait 22,50 francs -, fut celui d’Il était une fois dans l’Ouest. Je l’ai fait signer à Ennio Morricone lors de l'un de ses derniers concerts, à la Halle Tony Garnier à Lyon."