15:55
  • Copié
A.D , modifié à
Chaque dimanche, Mathieu Charrier et Bruno Cras critiquent trois films récents ou qui vont sortir sur les écrans, accompagnés de confrères journalistes. Verdict !

Les deux spécialistes cinéma d'Europe 1, Mathieu Charrier et Bruno Cras, accompagnés cette semaine de Danielle Attali du Journal du dimanche et de Baptise Liger de Lire et L’Express, livrent leurs impressions sur trois sorties cinéma dans l'émission Un dimanche de cinéma. Sur le grill, ce dimanche : Cézanne et moi de Danièle Thompson, Brooklyn Village d'Ira Sachs et Juste la fin du monde de Xavier Dolan.

Le pitch : "C'est l'amitié entre Cézanne et Zola, amitié assez destructrice puisque Zola a rencontré le succès qu'on lui connaît, Cézanne non, en tout cas pas de son vivant. Il y a toute une relation entre ces deux amis très proches, l'un qui réussit, l'autre qui échoue. Et Cézanne qui accuse Zola, notamment dans l'un de ses romans, de s'être inspiré de sa vie."

>> L'avis de Mathieu Charrier : "J'ai beaucoup aimé. Je trouve que c'est un beau film sur une histoire que l'on ne connaissait pas, avec de bons acteurs. C'est un film pour le grand public avec des beaux paysages. C'est bien mis en scène, bien joué, classique, sans une originalité dingue mais on passe un bon moment de cinéma."

>> L'avis de Danielle Attali : "Un film académique. Une empoignade intéressante entre Cézanne et Zola, mais une forme, une accumulation de flash-back des fois un peu désordonnés qui nous fait lâcher le film en route. Par ailleurs, il y a quand même chez Guillaume Gallienne quelque chose d'assez fascinant. Il interprète Cézanne d'une manière assez magistrale."

>> L'avis de Baptise Liger : "C'est une catastrophe. Pour moi, c'est un film indigeste au dernier degré. Le sujet est intéressant, je suis d'accord, mais ce qui nous est proposé sur la forme est d'une atrocité absolue, aussi bien dans l'écriture  que je trouve terrible - que dans la mise en scène, extrêmement académique. J'aime le cinéma classique mais là, ça pose quand même problème. Les flash-back sont très artificiels. J'aurais préféré - c'est un comble - un récit beaucoup plus linéaire. Les dialogues sonnent terriblement faux, on ne parle pas comme ça dans la vie. Quant à l'interprétation, mon Dieu, je sais bien qu'il faut faire un effet de contraste entre les personnages dans un film comme celui-ci mais entre Guillaume Gallienne, qui est un mélange d'Ugolin et de Jacquouille la Fripouille, et Guillaume Canet qui est très, trop sobre..."

>> L'avis de Bruno Cras : "Je vous trouve dur, c'est un film qui mérite d'être vu. C'est une belle histoire plutôt bien jouée. A l'heure où je vous parle, le film a mal démarré, mais je trouve que les critiques ont été souvent très injustes."

VERDICT : très mitigé.

 

  • Brooklyn Village, d'Ira Sachs, en salles depuis le 21 septembre.

Le pitch : "Une famille de bobos hérite d'un immeuble à Brooklyn parce que le grand-père vient de mourir. Dans cet immeuble, il y a, au rez-de-chaussée, une petite couturière qui vit ici depuis des années avec un loyer assez faible, que les héritiers vont chercher à augmenter parce qu'eux-mêmes ne vivent pas très richement."

>> L'avis de Danielle Attali : "Je n'ai pas vraiment aimé, je me suis un peu ennuyée. Je trouve que c'est un film émollient qui veut être humaniste, gentil. Cela se laisse voir, il n'est pas question de tuer le film. On peut aimer ce genre de lenteur. Ira Sachs est le cinéaste des nuances mais c'est tellement en nuance qu'il a fini par me perdre."

>> L'avis de Bruno Cras, partagé par Mathieu Charrier : "Il faut absolument aller le voir. C'est un très joli film qui m'a fait penser à Une Séparation d'Asghar Farhadi. Tout est en nuances. C'est un couple super gentil et généreux qui passe de Manhattan à Brooklyn. Leur fils se lie d'amitié avec celui de la couturière. Cette amitié va être contre-carré par le conflit entre les deux familles mais ce qui est très fin et sensible, c'est qu'il n'y a pas de bons et de méchants."

>> L'avis de Baptise Liger : "C'est un petit film indépendant américain. Peut-être que ses différents grands prix, notamment à Deauville, peuvent paraître disproportionnés mais c'est un très joli film. Ce qui est très réussi, c'est la manière de filmer les enfants, d'être à hauteur d'hommes. D'ailleurs le titre original est Little Men. Il y a un côté Truffaut dans L'argent de poche. Ce n'est pas un chef-d'oeuvre, c'est un film modeste."

VERDICT : Oui à 75%.

 

  • Juste la fin du monde, de Xavier Dolan, en salles depuis le 21 septembre.

Le pitch : "L'adaptation d'une pièce de théâtre de Jean-Luc Lagarce. L'histoire est celle de Louis, joué par Gaspard Ulliel, qui revient dans sa famille après douze ans d'absence. Il a le Sida. Il veut annoncer à ses proches (sa mère jouée par Nathalie Baye, son frère interprété par Vincent Cassel, sa belle-soeur jouée par Marion Cotillard et sa sœur jouée par Léa Seydoux) sa mort prochaine. En fait, l'absence qu'il a laissée dans cette famille a été tellement terrible qu'il y a plein de non-dits, de rancœur, d'amertume et cela va être un règlement de comptes. Le film a très bien démarré, mieux que Mommy, le précédent film du réalisateur canadien."

>> L'avis de Danielle Attali : "C'est une histoire, une pièce puissante. Maintenant, je trouve qu'il y a une sophistication dans ce film, comme si Xavier Dolan avait voulu montrer qu'il pouvait faire autre chose que de raconter des histoires simplement. Il pose sa caméra, fait des gros plans, des zooms, met de la voix off, des couleurs saturées. Il y a finalement une disharmonie. C'est presque conceptuel, cela pourrait être dans un musée. Je suis partagée."

>> L'avis de Baptise Liger : "J'adore et pourtant j'ai beaucoup de choses à reprocher sur l'écriture des dialogues. Mais malgré tout, il y a du cinéma tout le temps, dans les cadrages, dans les lumières, dans la manière de capter les comédiens et la manière de raconter cette histoire très simple. Je trouve le film éblouissant, fort. Il y a des sensations rares au cinéma."

>> L'avis de Mathieu Charrier : "Je suis d'accord sur le fait que, formellement, c'est un très beau film. On a compris que Dolan était devenu un immense cinéaste, qui manie la caméra comme personne à son âge. Mais l'histoire m'a un peu moins touché que quand il parlait de ses propres histoires, de son rapport à la mère."

>> L'avis de Bruno Cras : "On adore brûler ce que l'on a adoré. Ce n'est pas parce que c'est différent de Mommy que ce n'est pas un très grand film. Dolan est un génie du cinéma. Là, on mégote un peu. C'est un très beau film qui prend aux tripes. Les acteurs n'ont jamais été aussi bien dirigés."

VERDICT : A voir, aussi pour se faire sa propre idée sur la sophistication du film.