Les correspondances non censurées de Mozart

© Max PPP
  • Copié
, modifié à
Flammarion publie les lettres grivoises envoyées par le compositeur à sa cousine.

Flammarion a publié le 9 novembre dernier, La Correspondance complète de W.A Mozart. L'ouvrage, qui couvre pratiquement toute la vie du compositeur, recense près de 800 lettres échangées par Mozart avec ses proches et notamment son père et sa cousine.

L'occasion de découvrir le compositeur sous un nouveau jour. Car le talentueux musicien n'a pas fait que composer, il a été l'auteur de nombreuses lettres, dont certaines peuvent heurter les âmes sensibles et romantiques.

Un hymne à la scatologie

"Excusez ma vilaine écriture, la plume est déjà vieille, mais il y a bientôt 22 ans que je chie par le même trou et il n'est même pas encore déchiré, tous les jours je chie dedans et mord la crotte à belles dents", peut-on lire dans une des lettres adressées à sa cousine.

Mais cette dernière, pas en reste, ne manque pas de répartie : "Porte toi bien mon amour et pousse toi le cul dans la bouche. Je te souhaite un bonne nuit mon mari, mais d'abord chie au lit et que ça pète".

Ces correspondances sont en effet remplies de références scatologiques. Un sujet tabou aujourd'hui mais qui était très courant dans la société bourgeoise autrichienne du 18ème siècle. Plusieurs musicologues se sont amusés à analyser le rapport de Mozart avec la scatologie. Musicologie.org, un site de référence dans le domaine de la musique classique,  souligne que "la défécation et l'expression musicale sont associées dans l'esprit de Mozart à plus d'une occasion".

"Un chenapan qui aime bien s'amuser"

Fait surprenant : si les échanges scatophiles étaient répandus à l'époque, la relation amoureuse qu'entretenait Mozart avec sa cousine était beaucoup plus polémique.

Le contenu de leur correspondance laisse en effet penser que leur relation allait bien au delà du simple lien familial. "Avec sa petite cousine, il a découvert sans doute la femme, entre guillemets, que découvre un chenapan qui aime bien s'amuser et qui se défoule", raconte Geneviève Geffray, qui a traduit l'ouvrage allemand en français, au micro d'Europe1.

Le contenu des lettres est en effet sans équivoque. "Je pourrai alors vous complimenter en noble personne, vous fouetter le cul, vous baiser les mains, tirer du fusil postérieur, vous embrasser, vous donner des lavements par-devant et par-derrière", peut-on lire.

Un véritable exutoire

Véritable boulimique de travail, Mozart voyait dans ces échanges fiévreux, un véritable exutoire lui permettant de décompresser, explique Geneviève Geffray, interrogée par Europe 1.

"Il se défoulait peut-être plus qu'un autre, parce qu'il avait peut-être aussi une surpression du fait de son travail. Ce n'est pas le coté le plus important de sa personnalité, mais c'est une facette de la médaille", explique la spécialiste, également conservateur de la blibliothèque du Mozarteum de Salzbourg.

Des talents d'écriture reconnus par les plus grands

Mais les correspondances de Mozart s'apparentent également à un véritable exercice de style littéraire qui rappelle Folengo, Rabelais, James Joyce ou encore Raymond Queneau. Le compositeur, qui ne s'est jamais prétendu écrivain, maniait en effet avec aisance les figures de styles, jeux de mots ou autres déformations syntaxiques

"Tonnerre du ciel, mille sacristies, Croates de malheur, diables, sorcières, sorciers, bataillons de croisés à n'en plus finir, morbleu, éléments, air, eau, terre et feu. Europe, Asie, Afrique et Amérique" écrit-il à sa cousin avant de poursuivre : "je vous baise vos mains, votre visage, vos genoux et votre... afin, tout ce que vous permettés [sic] de baiser.

Ses multiples écrits ont d'ailleurs valu à Mozart les éloges de ses contemporains. De Stendhal à Cioran, de Nietzsche à Camus, de Zweig à Dai Sijie, les plus grands auteurs se sont copieusement inspirés de ses lettres, rapporte L'Express.

La relation père-fils

Les correspondances permettent également d'en savoir un peu plus sur la relation qu'entretenait Mozart et son père. L'ouvrage débute ainsi par la lettre De Leopold Mozart qui annonce à son éditeur la naissance de son fils, Joannes Chrisostomus, Wolgang, Gottlieb, le 27 janvier, 1756.

Leopold, le père de Mozart adresse ainsi quotidiennement à son épouse et à ses amis des lettres pour leur conter les prouesses et les progrès fulgurants de son fils "si talentueux" qui déchiffre à 3 ans son premier allegro, compose à 5 un menuet.

Dans la suite des correspondances, le lecteur observe comment peu à peu, Mozart coupe le cordon ombilical avec ce père trop prudent et pas assez ambitieux à ses yeux.

La Correspondance complète de W. A. Mozart, édition française et traduction de l'allemand par Geneviève Geffray (Flammarion, 1 930 pages, 99 euros). En vente le 9 novembre.