Manon Quérouil-Bruneel et son fixeur Malek Dehoune ont enquêté pendant un an dans une des banlieues répertoriée comme l'une des pires de la région parisienne. 4:21
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Ugo Pascolo
Manon Quérouil-Bruneel et Malek Dehoune ont enquêté pendant un an dans une banlieue répertoriée comme l'une des pires de la région parisienne.
INTERVIEW

"Sans Malek, je n'aurai jamais pu faire ce livre", lance Manon Quérouil-Bruneel, grand reporter au Figaro, qui co-signe avec son fixeur [une personne locale qui sert de sauf conduit à un journaliste, ndlr] Malek Dehoune un livre intitulé "La part du ghetto". "Malek connaît la banlieue comme personne, il est beaucoup plus légitime que moi pour en parler", explique la journaliste, au micro de Village médias vendredi, à côté de Malek Dehoune.

Le fixeur. Habituellement utilisé pour les zones de conflits comme la Syrie ou le Yémen, le fixeur a été essentiel pour l'écriture du livre. "Maximus, le surnom de Malek, a des accès que je n'aurai jamais pu avoir en quelques mois, son travail a beaucoup consisté à convaincre ses 'potos' de bien vouloir se livrer à une journaliste qu'ils ne connaissaient pas", témoigne Manon Quérouil-Bruneel. "Il a été ma caution, et mon sésame". "On a pensé qu'à deux, les gens allaient plus se lâcher", résume Malek. 

"Le terrain". Malgré l'économie souterraine, la cité que le duo a sillonné pendant un an - dont il refuse de préciser le nom - n'échappe pas à la loi de l'offre et de la demande, même en ce qui concerne la drogue. C'est le cas avec les "terrains", "des lieux de deal où il y a un patron et des ouvriers", détaille Malek. Et les prix peuvent atteindre des sommes astronomique : "un 'terrain' de shit moyen va se vendre aux alentours de 100.000 euros. Et cela peut monter jusqu'à deux millions d'euros pour les spots importants de 'drogue blanche', précisent les deux compères. 

M6, école de la délinquance. S'il l'on reproche beaucoup aux journalistes les reportages qu'ils ont pu faire sur les banlieues, ils sont très utiles pour les délinquants qui apprennent les "ficelles du métier" notamment via la télévision. "Ils regardent beaucoup M6, notamment Enquête exclusive et Enquête d'action", explique Manon Quérouil-Bruneel. "Donc les délinquants s'appuient sur ces reportages pour apprendre des erreurs de ceux qui sont tombés : comment parler à une juge, ne plus cacher de drogue à la maison". "Ils ont aussi appris qu'en général, les relevés téléphoniques ne remontent pas à plus de trois mois. Donc ils nient tout ce qui s'est passé avant, parce qu'il n'y aura pas de preuve", analyse la journaliste.