Championnats d'Europe d'athlétisme : un bilan très mitigé pour l'équipe de France

Mahiedine Mekhissi a confirmé sur 3.000 m steeple, Kevin Mayer a déçu sur le décathlon, Pascal Martinot-Lagarde a surpris sur le 110 m haies.
Mahiedine Mekhissi a confirmé sur 3.000 m steeple, Kevin Mayer a déçu sur le décathlon, Pascal Martinot-Lagarde a surpris sur le 110 m haies. © John MACDOUGALL / Andrej ISAKOVIC / AFP / Montage Europe 1
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Thibauld Mathieu et Corinne Boulloud
L'équipe de France d'athlétisme a récolté dix médailles, dont trois en or, lors des Championnats d'Europe à Berlin. Loin des 15 espérées avant la compétition.

Dix médailles, dont trois en or. L'équipe de France d'athlétisme est repartie dimanche soir de Berlin auréolée d'une quatrième place au classement des nations européennes, derrière la Grande-Bretagne et ses 18 breloques, la Pologne et l'Allemagne. Un bilan en demi-teinte, loin des 15 podiums espérés avant la compétition.

La dynamique s'est enrayée. Il y avait pourtant de quoi se montrer ambitieux, après les belles moissons lors des Jeux olympiques de Rio (6 médailles) et des Championnats du monde de Londres (5 médailles). Là, le coup d'arrêt est net : la France récolte moitié moins de médailles qu'il y a quatre ans, aux championnats d'Europe de Zürich (24 breloques dont 9 en or).

Des absents de marque. Alors, comment expliquer cette déconvenue ? Il y a, d'abord, les absences de Christophe Lemaitre (100 m, 4x100 m et 200 m) et Mélina Robert-Michon (lancer du disque) et Yohann Diniz (50 km marche).

Mayer et Vicaut, deux grosses claques. Il y a aussi eu la faillite, dès le premier jour, des deux cadres Kevin Mayer et Jimmy Vicaut, deux énormes chances de victoires. Le champion du monde du décathlon, grandissime favori, tenait pourtant la forme de sa vie, mais un improbable zéro pointé dès sa deuxième épreuve (le saut en longueur) a enterré tous ses espoirs, le contraignant à abandonner

Pour Vicaut, la déception est tout aussi colossale. Le co-recordman d'Europe du 100 m (9"86) était arrivé à Berlin auréolé d'une première place au bilan européen (9"91 à égalité avec le futur vainqueur, le Britannique Zharnel Hughes). En demi-finales, il avait même battu le record des Championnats d'Europe, en 9"97… Oui mais voilà : comme en 2014, le natif de Bondy a été trahi par son corps et n'a pas pu prendre part à la finale.

"Le petit coup d'élan positif qu'il y aurait pu avoir le premier jour est tombé un peu comme un soufflé", reconnait ainsi le directeur technique national de l'athlétisme français, Patrice Gergès, au micro d'Europe 1. "Oui, il y a des manques, des déceptions. On pensait certaines spécialités un peu au-dessus, et puis elles ont été un peu en-deçà".

Quelques déceptions. Au rayon déceptions, il faut aussi ajouter Quentin Bigot (marteau) ou encore Jeanine Assani-Issouf (triple saut). "On ne va pas se satisfaire de dix médailles, mais je pense que sur les dix, il y en a bien la moitié qui peut prétendre à une médaille mondiale", nuance le DTN.

Entendu sur europe1 :
Que ce soit les garçons ou les filles, on alterne le bon et le mauvais

Ces Bleus ont répondu présent. Parmi ces Bleus qui ont répondu présent, à l'image de Mahiedine Mekhissi, sacré pour la cinquième fois sur 3.000 m steeple, du champion du monde Pierre-Ambroise Bosse, bronzé sur 800 m, de Renelle Lamote (argent sur 800 m), d'Alexandra Tavernier (argent et record de France du marteau en 74,78 m) ou de Renaud Lavillenie, troisième et vaincu par un jeune Suédois de 18 ans en état de grâce, Armand Duplantis (6,05 m), à l'issue d'un concours de la perche inoubliable.

"Il n'a pas à être déçu. Il fait l'une de ses meilleures performances de l'année avec 5,95 m. Il a 32 ans, il est battu par des gamins qui ont 20 ans. Il est sûr qu'on assiste à un virage. Mais ce n'est pas une tragique déception comme on pourrait le dire", analyse sur Europe 1 notre consultant athlétisme Jean-Claude Perrin.

De belles surprises. Il y a même eu de belles surprises avec Pascal Martinot-Lagarde, coiffant pour quelques millimètres le numéro un mondial Sergey Shubenkov sur 110 m haies, Morhad Amdouni, qui repart de Berlin avec deux médailles autour du cou (or sur 10.000 m, bronze sur 5.000 m) ou Clémence Calvin, qui a décroché l'argent pour son premier marathon.

Entendu sur europe1 :
Aujourd'hui, on n'a pas le vivier derrière pour pouvoir palier ces manques

La jeunesse n'a pas offert de garanties. "Sur le plan des performances, c'est très inégal. Que ce soit les garçons ou les filles, on alterne le bon et le mauvais", note surtout Jean-Claude Perrin. "Et aujourd'hui, on n'a pas le vivier derrière pour pouvoir palier ces manques", complète le patron des équipes de France d'athlétisme, Patrice Gergès.

Car nombreux sont les jeunes à avoir manqué à l'appel du podium : Ninon Guillon-Romarin à la perche, Ludvy Vaillant sur 400 m haies, Jean-Marc Pontvianne au triple saut… Hormis Alioune Sene (22 ans), finaliste à la perche, et surtout Solene Ndama (19 ans), qui a explosé à deux reprises son record personnel sur 100 m haies (12"88 puis 12"77) pour atteindre le Top 8, personne ne s'est réellement distingué dans la perspective des Mondiaux, l'année prochaine à Doha, des Jeux de Tokyo en 2020, mais surtout des JO 2024 à Paris.

Le mot de la fin, lui, revient à Jean-Claude Perrin : "compte tenu la valeur de notre athlétisme, du fait qu'on n'a quand même pas beaucoup d'athlé à l'école, je crois que l'équipe de France s'en tire bien. Alors évidemment, on peut être déçu avec dix médailles, mais ce n'est plus du tout entre les mains des techniciens dans les stades. Maintenant, c'est entre les mains des pouvoirs publics. Mais ça, c'est un débat qu'on a depuis Jules Ferry…"