Voeckler peut-il le faire ?

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Régis AUMONT , modifié à
Venu sur le Tour de France dans la forme de sa vie, Thomas Voeckler voulait y gagner au moins une étape. Après deux semaines de course, et les Pyrénées dans le dos, le Français en est le maillot jaune avec environ deux minutes d'avance sur tous les favoris. Il a beau affirmer le contraire, le coureur d'Europcar est bien candidat malgré lui à la victoire finale à Paris dimanche prochain.

Venu sur le Tour de France dans la forme de sa vie, Thomas Voeckler voulait y gagner au moins une étape. Après deux semaines de course, et les Pyrénées dans le dos, le Français en est le maillot jaune avec environ deux minutes d'avance sur tous les favoris. Il a beau affirmer le contraire, le coureur d'Europcar est bien candidat malgré lui à la victoire finale à Paris dimanche prochain. Thomas Voeckler est du genre modeste, très modeste. "Je me sous-estime parfois", nous avoue-t-il quand on s'étonne de sa résistance héroïque depuis plusieurs jours. Mais aussi humble soit-il, le Français n'en est pas moins le leader du Tour de France après 15 des 21 étapes au moment où le peloton s'accorde lundi la deuxième et dernière journée de repos. Sa prise de pouvoir à Saint-Flour il y a huit jours, à l'issue d'une longue échappée sur les routes du Massif Central, ne devait être qu'une courte parenthèse avant l'explication entre les gros, dans les Pyrénées. Sauf qu'à Luz-Ardiden comme au Plateau de Beille, Voeckler a su se hisser au niveau des meilleurs, ne perdant rien ou presque (40 secondes sur Fränk Schleck et deux secondes sur Andy) sur les favoris pour la victoire finale à Paris. Avant la dernière ligne droite - la plus difficile avec la traversée des Alpes et le contre-la-montre de Grenoble -, le Vendéen d'adoption possède une avance assez confortable sur les six derniers coureurs en mesure de s'imposer sur les Champs-Elysées. Son poursuivant le plus pressant, Fränk Schleck, pointe à une minute et 49 secondes. Alberto Contador, le moins bien classé des potentiels vainqueurs, est relégué à 4 minutes tout rond. S'il parvient à accompagner les meilleurs dans les Alpes, notamment lors des deux grandes étapes du Galibier (jeudi) et de l'Alpe d'Huez (vendredi), Voeckler ne sera plus très loin de causer l'une des plus grandes sensations de l'histoire du Tour. Parce que s'il n'est pas un spécialiste du chrono, aucun de ses rivaux, hormis Cadel Evans, ne peut se targuer d'en être. "Je ne suis pas là pour gagner le Tour de France" Alors bien sûr, le coureur d'Europcar pourrait craquer dans les Alpes, un massif qu'il craint plus que celui des Pyrénées. Mais son aisance dans l'ascension du Plateau de Beille samedi dernier, là où seul Andy Schleck lui semblait supérieur, laisse place aux rêves les plus fous. "Si Voeckler arrive en haut avec les leaders aujourd'hui, on pourra dire qu'il peut gagner le Tour, avait pianoté sur son Twitter Lance Armstrong lors de cette étape. Il a 2 minutes d'avance et ils n'arrivent pas à le secouer." Ils, ce sont Contador, les frangins luxembourgeois, Evans et Ivan Basso. Des favoris incapables jusque-là de se débarrasser du Français dans les cols. Des cadors qui pensent à l'unisson que leur inhabituel compagnon de route peut viser le podium sur les Champs-Elysées. Quand on interroge les coureurs français du peloton, aucun ne semble surpris par les performances du maillot jaune. Ce dernier, étincelant depuis le début de l'année, impressionne par sa force. Il ne cache d'ailleurs pas se trouver dans la forme de sa vie. Mais ce n'est pas pour autant qu'il a changé sa façon de vivre la course: "Je ne suis pas là pour gagner le Tour de France, ce n'est pas mon objectif, appuie-t-il pour convaincre son auditoire. Je pense même que je n'ai aucune chance de le faire. Tout le monde voudrait gagner le Tour. Depuis Bernard Hinault, on attend un vainqueur français, et depuis Richard Virenque, on attend un Français sur le podium. Mais je ne veux pas mentir aux Français. Je ne veux pas leur dire: «J'ai une chance de gagner». Il reste une semaine, ce Tour a été dessiné pour qu'elle soit décisive et que tout se joue là. Je vais me battre, c'est sûr, mais je ne dois pas être malhonnête. J'estime avoir 0% de chances de gagner le Tour de France." On le croit sincère. Voeckler n'est pas un faux modeste. Après tout, il a raison. Qui n'aurait pas ri il y a une semaine s'il avait dit qu'il avait des chances de remporter le Tour de France ? Sa traversée des Pyrénées, épaulé par un Pierre Rolland épatant, a néanmoins donné un petit peu plus de consistance à cette idée folle. N'en déplaise à l'intéressé.