Tout le monde a gagné

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SYLVAIN LABBE , modifié à
Même si de Marc Lièvremont à ses joueurs, il n'est pas un seul Tricolore pour se contenter de la courte défaite concédée samedi à Twickenham (9-17), ce XV de France ressemble un peu à l'école des fans au lendemain de la perte du Grand Chelem. Entre un sélectionneur persuadé d'avoir assisté à un grand match et des joueurs sûrs de leur potentiel, les Bleus seraient donc sur la bonne voie à six mois du Mondial.

Même si de Marc Lièvremont à ses joueurs, il n'est pas un seul Tricolore pour se contenter de la courte défaite concédée samedi à Twickenham (9-17), ce XV de France ressemble un peu à l'école des fans au lendemain de la perte du Grand Chelem. Entre un sélectionneur persuadé d'avoir assisté à un grand match et des joueurs sûrs de leur potentiel, les Bleus seraient donc sur la bonne voie à six mois du Mondial. A ceux qui attendaient le premier faux pas de cette équipe de France après huit succès de rang pour assister au coup de torchon du patron, Marc Lièvremont a adressé dimanche, au lendemain du court revers de Twickenham (9-17), une fin de non-recevoir qui ressemble fort à une manière de figer le paysage de cette sélection tricolore, à six mois de la Coupe du monde. Et tous les détracteurs de ces Bleus au potentiel certain, mais toujours dans l'attente d'être exploité, en sont pour leurs frais. Comme souvent le Lièvremont reposé, frais et dispos des lendemains de match, au col roulé élégant, s'est montré beaucoup plus clément que le redresseur de tort à cran dès la toute fin de match. Au point même de renoncer, à la lumière de la vidéo, aux qualificatifs employés la veille au sujet du jeu français, jugé à chaud "stérile et incohérent". "C'était un grand match, on ne peut pas se satisfaire d'une défaite parce qu'une défaite reste une défaite et j'ai du mal à employer l'expression de défaite encourageante. Il y a beaucoup de déception parce que je pense que mes joueurs ont mis le coeur et les ingrédients pour s'imposer à Twickenham." Le sélectionneur va même plus loin, alors que seule la blessure de François Trinh-Duc l'empêche de reconduire ses 23 joueurs comme un seul homme (voir par ailleurs), et voit dans ce "crunch" - abandonné à la Rose sur le tard - un match charnière. "Tout va très bien, madame la marquise..." "J'ai l'impression que ce match a validé l'investissement des joueurs depuis trois semaines en termes d'état d'esprit, d'implication et de maîtrise, sincèrement, je pense qu'on est dans les clous." Le Grand Chelem s'est envolé, bientôt complété par Martin Johnson et ses joueurs - Lièvremont en est persuadé - mais pourtant rien ne change, ni ne bouge dans le petit monde des Bleus. Convaincu que son équipe a existé samedi dans un grand match de rugby (il le répète à l'envie...), le coach des Bleus confirme ce que certains recalés de la sélection craignent depuis l'entame de ce Tournoi: "Je pense qu'on va rester sur la stabilité...", et sous-entend du même coup que son groupe des trente est bel et bien fermé d'ici la Coupe du monde. "Oui, il y a de ça et puis, vous ne pouvez pas me reprocher de faire tourner d'un côté et de manquer de cohérence par rapport aux repères de jeu, et de figer un groupe qui donne satisfaction..." On tente de remettre en cause la valeur de cette équipe d'Angleterre, qu'on n'a peut-être vue trop belle, rien n'y fait... "Pourquoi ? Parce qu'ils n'ont pas réussi à inscrire sept essais comme contre l'Italie ? Parce qu'on a bien défendu ?", interroge Lièvremont, qui ne désarme pas et estime plus que jamais que son équipe est aujourd'hui dans le vrai, malgré un secteur offensif toujours aussi peu convaincant. "Sincèrement, je ne suis absolument pas inquiet et je pense qu'on va continuer à progresser de ce côté-là. Je lis, j'entends les critiques à propos de notre organisation offensive, on a tendance à être dithyrambique avec celle des autres, le jeu anglais face à l'Italie. Si ce n'est qu'il y a plus de fraîcheur certainement et de spontanéité chez les Anglais, dus à l'organisation et à l'état physique du moment, les choses se mettent en place et sont validées dans la semaine, on en voit certaines sur le terrain..." Deux mois de préparation et, à l'en croire, il n'y paraîtra plus rien... Sur cet air du "Tout va très bien, madame la marquise", certaines voix discordantes dans l'assistance osent jeter les noms des Huget, Chabal ou Poitrenaud pour s'interroger sur leur apport réel. Là encore, Lièvremont reste droit dans ses bottes: "Je n'ai pas le sentiment que Yoann (Huget) est inhibé, il n'y avait pas tellement d'espaces et malgré tout il a fait preuve d'une grosse volonté ; et Clément joue à un poste exposé, on connaît ses qualités et ses défauts", même si ces derniers sont nettement plus à l'honneur depuis deux matches. "Les conséquences à son poste sont forcément plus dramatiques." Le cas Chabal, malgré les apparences, ne déroge pas: "Je pense qu'on aura besoin de tout le monde et Sébastien est peut-être moins bien physiquement qu'au mois de novembre, mais c'est justement intéressant de l'impliquer. Je n'ai vraiment pas l'impression qu'il ait fait un mauvais match." Lièvremont: "Je vais continuer avec deux demis de mêlée" Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil, en somme... "Ce n'est pas une volonté délibérée de positiver, je pense que les garçons méritent le respect sur ce match", tente encore de convaincre le sélectionneur qui, jusqu'au-boutiste, n'hésite pas à valider son choix inédit... de ne pas choisir entre ses deux demis de mêlée. "Ça se passe bien entre eux et je pense que je vais continuer comme ça. Même à ce poste, certains disent que c'est du jamais vu et qu'il faut absolument installer un demi de mêlée. Je ne suis pas d'accord, on a le droit de faire différemment, c'est mon cas et je pense que je vais continuer avec deux demis de mêlée." Le Grand Chelem perdu, Lièvremont voit déjà plus loin: "On peut penser qu'aux mois de septembre, octobre, avec les conditions météo d'un printemps néo-zélandais, on aura encore des matches de rugby de ce registre, avance-t-il, plus que jamais projeté sur la Coupe du monde, où chaque ballon en conquête et sur les rucks a été l'occasion d'âpres batailles."