Mesnil: "L'impression de mendier"

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Propos recueillis par Reuters , modifié à
ATHLE - Le perchiste, qui avait couru nu l'an passé, n'a pas d'équipementier.

ATHLE - Le perchiste, qui avait couru nu l'an passé, n'a pas d'équipementier.Romain, un an après votre sortie nue sur internet, quel bilan en tirez-vous ?Ma course à poil sur internet m'a rapporté deux sponsors, toujours fidèles. Ma médaille d'argent de Berlin, rien. Et depuis, rien. Du coup, j'ai fait un hiver alimentaire, sauté pour gagner de l'argent.Comment ça, rien ?Rien, aucun équipementier de sport. Ma médaille de Berlin ne compte pas, n'a rien changé. Aujourd'hui, j'ai l'impression d'être un moins que rien, d'être limite un peu pestiféré, d'avoir fait quelque chose de mal, d'avoir, à la limite, mal fait mon boulot. Le sportif que je suis est frustré de ne pas vivre de son sport, tout simplement. Ce manque de reconnaissance mine mon moral, ma sérénité, ma confiance.Comment vos démarches vers les équipementiers se sont-elles passées ?Ce fut une bagarre pour avoir un rendez-vous, pour essayer de convaincre, pour mettre en avant une notoriété incroyablement boostée par mes résultats et mon buzz internet. Mais, rien. Je ne suis pas 'bankable' mais cela vient aussi de mon sport de moins en moins mis en valeur, limite mineur. Souvent, j'ai même eu l'impression de mendier. Actuellement, je vais même jusqu'à proposer qu'on me prenne pour 2010 mais qu'on me paye seulement en 2011 ou 2012 (...). La crise a réduit tous les budgets, rendu frileux tous les sponsors. Seul le foot a le droit de cité."Je gagne bien ma vie, mieux même que si je pratiquais mon métier d'ingénieur"Cette situation ne présente-t-elle aucun avantage ?Une certaine liberté de mouvements, pas si désagréable que cela finalement ! D'ailleurs, si j'arrive à accepter que ma réussite sportive ne passe pas par la signature d'un contrat avec un équipementier, je serai définitivement libre et libéré. Cette situation va aussi certainement m'inciter à être, encore plus, le meilleur, avoir envie de prouver à tout le monde que je suis toujours dans le coup.N'avez-vous pas été pénalisé par votre sortie nue sur internet ?Non, absolument pas. Je n'ai eu aucun retour, aucun écho dans ce sens. De quoi vivez-vous aujourd'hui ?Attention, entre un salaire notamment de la ligue professionnelle, deux sponsors et des primes aux résultats, je gagne bien ma vie, mieux même que si je pratiquais mon métier d'ingénieur. Mais en ce qui concerne ma panoplie sportive, c'est le système D : je mets des chaussures où je colle du scotch pour estomper le logo, des chaussettes basses où le logo ne se voit pas trop et je tape dans mes stocks de vieilles affaires.Quelle est votre ambition désormais ?La recherche de l'or sur l'un des trois prochains grands championnats : les Europe, fin juillet à Barcelone, les Mondiaux en 2011, les Jeux en 2012. Etre le premier champion olympique de perche âgé dey 35 ans, ça aurait aussi de la gueule, non ? Avant la fin de ma carrière, je veux vivre un titre afin de n'avoir aucun regret.