Le V6 fait (presque) l'unanimité

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Yannick SAGORIN , modifié à
Le projet des quatre cylindres avait fait vaciller nombre de constructeurs, qui s'étaient pourtant prononcés en faveur d'une F1 plus "propre" l'hiver dernier. La révolution verte abandonnée au profit d'un V6 turbo, d'ici trois ans, tout le monde se félicite aujourd'hui de la volte-face de la FIA. Tout le monde si ce n'est Bernie Ecclestone...

Le projet des quatre cylindres avait fait vaciller nombre de constructeurs, qui s'étaient pourtant prononcés en faveur d'une F1 plus "propre" l'hiver dernier. La révolution verte abandonnée au profit d'un V6 turbo, d'ici trois ans, tout le monde se félicite aujourd'hui de la volte-face de la FIA. Tout le monde si ce n'est Bernie Ecclestone... C'est avec un vrai soulagement que la plupart des acteurs de la F1 ont accueilli le dernier communiqué de la Fédération internationale de l'automobile. "Le prochain bloc sera un V6 1,6l turbo équipé de systèmes de récupération de l'énergie. Cette nouvelle formule entrera en vigueur au début du championnat du monde de Formule 1 2014", pouvait-on notamment y lire. Quelques mots qui suffisaient à décrisper les débats, brisant la posture contestataire de quelques intéressés influents, parmi lesquels le président de Ferrari. "Le choix du V6 est important car c'est bon pour l'avenir, non seulement pour Ferrari mais aussi pour Mercedes et d'autres, juge aujourd'hui Luca Di Montezemolo, lequel était allé jusqu'à menacer la F1 d'un retrait du pur et simple du Cheval cabré. Nous serons en F1 aussi longtemps que la discipline représentera pour nous le plus important centre de recherche. La F1 a contribué au fil des ans à améliorer la boîte de vitesses Ferrari, les matériaux composites et d'autres technologies de pointe." Appartenant à un camp favorable à l'origine à l'introduction dès 2013 des moteurs à quatre cylindres, Eric Boullier, le manager du team Lotus-Renault, se veut également satisfait de ce revirement de perspective. "Tout le monde est content d'avoir le V6 à partir de 2014, y compris Renault, qui soutient le projet, avoue-t-il dans les pages d'AutoHebdo. Le V6 est bien plus intéressant que le quatre-cylindres d'un point de vue technologique. Et aussi pour l'image de la F1, qui doit être une vitrine technologique." Todt: "Nous ne sommes pas encore mûrs" Ce postulat, beaucoup le partagent, à commencer par Ross Brawn. Pour le directeur de Mercedes GP, l'important ne réside toutefois pas dans la performance, qui selon lui restera assurée. "Ce n'est pas le fait que le nouveau moteur sera plus efficace qui est le plus important. C'est le message qu'il donne: avoir un moteur vraiment efficace et courir en consommant moins de carburant est quelque chose de génial. [...] La chose importante au sujet des voitures de course est le message qu'elles peuvent donner. Nous avons fixé des objectifs afin de réduire la quantité de carburant pour la course de 30, 40, 50% par rapport à ce que nous utilisons actuellement, mais avec toujours la même puissance et la même excitation." Jean Todt, le patron de la FIA, confirme dans les colonnes de Nice-Matin, même s'il aurait souhaité une autre issue: "Nous avions d'abord tranché en faveur du quatre cylindres de 750 chevaux dont la consommation est 40 % inférieure à celle du moteur actuel. À mes yeux, ç'aurait été un pas en avant extrêmement important. Cependant, il s'avère que nous ne sommes pas encore mûrs pour faire un tel pas. Après nouvelle réflexion, l'ensemble des intéressés a préféré quelque chose d'un peu moins osé." Le V6, la promesse de nouveaux motoristes ? Président de l'association des écuries de F1 (la Fota) et directeur de McLaren, Martin Whitmarsh insiste lui sur le caractère "très positif" de cette évolution annoncée pour 2014. "Nous sommes dans une situation où la F1 compte trois motoristes (quatre si l'on tient compte de Cosworth, ndlr). Au cours de l'histoire de la F1, les constructeurs automobiles ont énormément investi dans notre discipline. Il faut leur fournir un environnement dans lequel la règlementation moteur est assez bien définie, pour qu'ils sachent qu'en réalisant un bon travail au niveau technologique, ils seront compétitifs." De Brackley, fief de Mercedes, Ross Brawn voit les mêmes ouvertures dans l'adoption des V6: "Un nouveau moteur crée de nouvelles opportunités d'engagement pour les manufacturiers, et c'est là une autre raison pour laquelle nous avons besoin de celui-ci. Qui veut s'impliquer pour construire un V8 à 18 000 tours/minute ? Aucun manufacturier n'est intéressé. Là, il s'agit d'une nouvelle opportunité et d'une spécification plus pertinente pour les constructeurs." De fait, il n'y a guère que Bernie Ecclestone pour trouver à y redire, lui qui s'inquiète dans The Independant d'avoir à l'avenir "des moteurs qui ne sonnent pas du tout comme des moteurs de F1". "Les promoteurs pensent que ces moteurs vont retirer ce que les gens veulent quand ils assistent aux courses de F1: le glamour et le bruit. Donc ils ne seront pas en mesure de vendre les billets et en mesure de nous payer." Si tel était le cas, le grand argentier de la F1 se réserve le droit de demander des comptes à la FIA. "Le régime moteur maximum a été modifié, passant de 12.000 à 15.000 tours/minute - en raison de la nouvelle architecture et de la limitation du régime moteur, il y aura un son différent, mais il restera représentatif de la Formule 1", rétorque la fédération internationale. Le débat semble clos. Pour le moment.