Jouanno attaquée de toute part

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GUILLAUME BARDOU , modifié à
Les propos de Chantal Jouanno samedi dans les colonnes de L'Equipe continuent de faire des vagues. Alors que la ministre des Sports avait estimé "inadmissibles" les éventuels retours de Franck Ribéry et Patrice Evra pour la rencontre France-Brésil du 9 février prochain, de nombreux acteurs du football français ne partagent pas cet avis, supportant mal cette nouvelle intervention politique.

Les propos de Chantal Jouanno samedi dans les colonnes de L'Equipe continuent de faire des vagues. Alors que la ministre des Sports avait estimé "inadmissibles" les éventuels retours de Franck Ribéry et Patrice Evra pour la rencontre France-Brésil du 9 février prochain, de nombreux acteurs du football français ne partagent pas cet avis, supportant mal cette nouvelle intervention politique. Huit mois après la grève de Knysna et ses répercussions politiques dont la fameuse entrevue à l'Elysée entre Thierry Henry et Nicolas Sarkozy, le thème n'en finit pas d'attirer les petites phrases et pressions autour d'une affaire devenue nationale, dépassant largement le cadre du football. On croyait la crise apaisée, la hache de guerre enterrée, une nouvelle ère commencée et née d'une victoire fondatrice en Bosnie, confirmée à Wembley sur le chemin d'une qualification pour l'Euro 2012. Trop simple. Car les dernières sanctions prises envers les fameux meneurs des mutins de Knysna arrivent à échéance. Et avec elles, le débat a repris sur le retour de ces meneurs, les fameux "caïds immatures" décrits par Roselyne Bachelot fin juin à l'Assemblée Nationale à la suite d'une conférence de presse surréaliste tenue dans le désormais tristement célèbre Pezula Hotel de Knysna. Samedi, son successeur, Chantal Jouanno, n'a pas hésité à donner son opinion sur le sujet, jugeant lors d'un entretien accordé à L'Equipe "inadmissibles" les éventuels retours de Patrice Evra et Franck Ribéry pour le match France-Brésil du 9 février prochain. La levée de bouclier ne s'est pas fait attendre. "Injuste", a d'abord répliqué le président de la FFF, Fernand Duchaussoy. "Tout le monde a droit à une deuxième chance quand il a purgé sa peine, a rappelé celui qui a pris la suite de Jean-Pierre Escalettes. Je suis désolé mais je n'ai pas le pouvoir de décréter que quelqu'un est suspendu à vie et qu'on ne le reverra plus en équipe de France. C'est à Laurent Blanc d'en décider". Même avis pour Frédéric Thiriez, interrogé samedi lors de l'inauguration du MMArena, en présence de Chantal Jouanno. Le président de la LFP s'est alors montré des plus diplomates: "Il n'est pas du tout anormal qu'un ministre des Sports donne son opinion sur les problèmes qui intéressent le sport. Cela étant, je rappelle tout de même que c'est au sélectionneur Laurent Blanc, en lequel j'ai une totale confiance, de savoir quelle est la meilleure équipe au meilleur moment." Circulez, il n y a rien à voir. Au moins jusqu'à l'annonce de la sélection... L'UNFP se montre virulente D'autres en appellent aux principes de la République. "La France est un pays de droit. Quand on a commis une faute, on est condamné. Et quand on a effectué sa peine, c'est fini", a ainsi jugé Guy Roux, interrogé par Le Journal du Dimanche. "La ministre se comporte comme un juge qui attendrait la sortie de prison de quelqu'un qui a purgé cinq ans pour lui dire: "Finalement, vous prenez perpèt'". Ça ne tient pas, d'autant que la culpabilité de ces deux joueurs est loin d'être prouvée. Chantal Jouanno a été mal conseillée", a jugé l'ancien entraîneur auxerrois. Première pique sur un thème carcéral largement repris par l'UNFP au communiqué des plus virulents. L'Union des footballeurs professionnels a en effet également réagi ce dimanche par le biais d'un long communiqué, débutant par un rappel à la fameuse journée du 20 juin: "Evra et Ribéry ne sont pas plus coupables que tous ceux qui ont refusé de s'entraîner à Krysna, ce dimanche-là, et que si sanctions il devait y avoir, elles auraient dû frapper l'ensemble des sélectionnés et non quelques-uns d'entre eux", note notamment le syndicat. "Enfin, faut-il rappeler à Mme Jouanno qu'en France, une fois sa peine purgée, on a payé sa dette envers la société ? Madame la ministre des Sports ne semble pas être de cet avis. L'UNFP s'étonne, dès lors, qu'elle puisse siéger au Conseil des ministres à quelques pas d'Alain Juppé, par exemple, condamné à 14 mois de prison avec sursis et à un an d'inéligibilité en 2004 pour "prise illégale d'intérêt"... Comme le maire de Bordeaux, ministre de la Défense, Patrice Evra et Franck Ribéry ont été inéligibles. Ils ne le sont plus. Ce qui vaut pour l'un vaut, justement, pour les autres." La ministre des Sports prendra sans doute note qu'il lui faudra à présent aborder le sujet avec d'infimes pincettes. A moins d'enfin l'oublier. Laurent Blanc pourrait s'en satisfaire, le sélectionneur répétant à l'envi son désir d'enfin tourner la page d'un héritage encore bien encombrant...