Evra: "La cicatrice restera"

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Propos recueillis par Alban LAGOUTTE , modifié à
Marqué à vie par son capitanat en Afrique du Sud, lors de la Coupe du monde 2010, Patrice Evra revient en équipe de France avec envie et ambition. "J'ai envie d'être une solution, pas un problème pour cette nouvelle génération", a-t-il expliqué ce mercredi à Clairefontaine. Mais le latéral gauche de Manchester United a conscience qu'il va devoir se fondre dans le moule dessiné par Laurent Blanc.

Marqué à vie par son capitanat en Afrique du Sud, lors de la Coupe du monde 2010, Patrice Evra revient en équipe de France avec envie et ambition. "J'ai envie d'être une solution, pas un problème pour cette nouvelle génération", a-t-il expliqué ce mercredi à Clairefontaine. Mais le latéral gauche de Manchester United a conscience qu'il va devoir se fondre dans le moule dessiné par Laurent Blanc. En préambule, Patrice Evra s'est adressé à l'assemblée des journalistes présents "Après huit mois d'absence, c'est avec une très grande fierté, un très grand plaisir que je retrouve l'équipe de France, qui m'a énormément manqué. Je voudrais dire merci à tous les gens qui m'ont soutenu et ont toujours cru en moi, parce qu'il y a eu des moments difficiles. Je parle évidemment de cette Coupe du monde, de l'après-Coupe du monde, de ces cinq matches de suspension que j'ai pris. J'ai été condamné en tant que capitaine de l'équipe de France et non en tant que meneur. Les gens qui connaissent le vrai Patrice Evra savaient que je n'allais rien lâcher, que j'allais me battre pour revenir et aujourd'hui, même si je sais que le plus dur reste à venir, à moi de persuader les personnes qui ne voient en moi que la Coupe du monde 2010 que je suis là pour m'investir dans cette nouvelle équipe de France pour avoir un avenir bien meilleur." "Quant à ceux qui réclament des excuses, je crois que certaines personnes ont la mémoire courte. J'ai été le premier joueur à m'excuser après la rencontre contre l'Afrique du Sud au Mondial, à avoir demandé aux joueurs de renoncer à leurs primes, etc. Avant de partir en vacances, j'avais donné une interview ou je disais que l'heure était au grand pardon et où j'avais surtout souhaité ne plus mettre de l'huile sur le feu, alors je ne comprends pas pourquoi la question des excuses a de nouveau été soulevée. Maintenant, je suis là, on est en train de préparer les deux prochains matches dans les meilleures conditions possibles, donc j'ai envie de tourner la page. J'ai envie d'être une solution, et pas un problème pour cette nouvelle génération." Patrice, craignez-vous particulièrement ce retour en équipe de France ? Non, pas du tout. Je n'ai eu de problème avec personne et, depuis la Coupe du monde, je n'ai reçu que des messages de soutien. Je bossais comme un fou dans mon club pour rester à mon niveau et avoir la chance d'être appelé de nouveau. C'est ce qui a été fait et, comme je l'ai dit, maintenant, le plus dur reste à venir. Considérez-vous que votre retour est dû à l'absence d'Eric Abidal ou à vos performances ? Avant de répondre, j'ai eu des nouvelles d'Eric Abidal, l'opération s'est bien passée, ce qui est le plus important. Mais par tous les chemins, je serais revenu dans cette équipe. Le principal c'est que je sois là et que je fasse mon boulot. Vous revenez sans statut, cela change-t-il quelque chose pour vous ? Non. Qu'est-ce que c'est d'avoir un statut ? Moi, je reviens en équipe de France pour être performant, pour gagner des titres comme je le fais avec mon club. Je reviens avec de l'envie. Quand j'étais suspendu, je le disais, je faisais mon métier à 50% car faire mon métier à 100% c'était à condition de jouer pour mon pays. "Je n'ai pas le sentiment que les Français m'en veuillent" Avez-vous quand même eu peur de ne jamais revenir ? Non. Sincèrement, non. J'étais conscient de mes qualités. Malgré tout ce qu'il s'est passé en Afrique du Sud, j'ai été fier d'être le capitaine de cette équipe. Il fallait que je fasse la différence sur le terrain, c'est ce que j'ai fait et je pense avoir été sélectionné pour mes qualités sportives. Neuf mois après Knysna, vous arrive-t-il de regretter encore certains décisions ? Bien sûr que j'y repense, je revois certaines images... Mais j'essaye de tourner la page. La cicatrice restera mais on doit écrire une nouvelle histoire qui, je l'espère, sera plus heureuse que la précédente. Si c'était aujourd'hui, demanderiez-vous aux joueurs de ne pas faire grève ? Faudrait-il encore qu'ils acceptent... On a fait une erreur, on en est tous conscients, on s'est excusé. Elle s'est produite, bien sûr qu'on regrette mais... Avant de retrouver le public tricolore, avez-vous reçu un accueil hostile des joueurs de l'équipe de France ? Pas du tout. Vous pourrez demander à n'importe qui, pour eux j'ai été un bon capitaine. J'ai été très bien accueilli. Quant au public... Vous savez, un stade c'est comme une arène, il y aura toujours des sifflets. Mais après cette Coupe du monde, je suis allé manger en plein Paris et je n'ai reçu que des messages de soutien. Après, je suis peut-être un peu décalé car je ne suis pas quelqu'un qui regarde beaucoup la télévision ou est attentif à ce qui est écrit dans la presse, mais je n'ai pas le sentiment que les Français m'en veuillent. Pour les Français, vous semblez incarner la grève de Knysna, est-ce injuste à vos yeux ? Oui et non. Après la Coupe du monde, j'ai dit aux autres joueurs de partir tranquilles en vacances car, s'il y avait une tête à couper, ça devait être la mienne, en qualité de capitaine. Il fallait que quelqu'un prenne et, avec le brassard, ça devait être moi. Mais je confirme que je n'étais pas un meneur de cette grève. Même dans le rapport de la Commission de discipline de la FFF, il a bien été écrit que j'ai été suspendu de cinq matches en tant que capitaine des Bleus et non en tant que meneur. Quand on est capitaine, on est un peu plus responsable, mais je ne suis pas dans la colère. J'ai dit ce que j'avais à dire à la Commission (de la fédération française, ndlr), ils ont bien compris qui j'étais. "Je penserai peut-être un peu plus à moi" Lundi soir, vous vous êtes entretenu avec Laurent Blanc en privé, qu'en est-il ressorti ? Laurent Blanc est quelqu'un de très franc. Il a dit certaines choses qui resteront entre lui et moi. La discussion a été faite mais après, c'est sur le terrain qu'il faut prouver. Le sélectionneur a malgré tout souligné qu'il serait très attentif à votre comportement et à celui de Franck Ribéry et qu'il n'hésiterait pas à prendre des mesures radicales au besoin... Oui, mais je n'ai pas de réaction particulière à avoir. A part lors de cette Coupe du monde, je me suis toujours bien comporté sous le maillot Bleu. Je n'ai jamais entendu dans un groupe que j'étais quelqu'un qui était capable de créer des problèmes donc à partir de là, je n'ai pas de souci à me faire. Vous intégrez un groupe très jeune, cela change-t-il quelque chose à vos yeux ? De ce que j'avais vu de l'extérieur, le groupe me paraissait plein d'envie et désireux de redorer le blason de l'équipe de France. A moi de m'intégrer mais l'âge n'est pas un problème. Il faut que je reste le même, que je fasse mon boulot comme je sais le faire. Au début, je penserai peut-être un plus à moi, à me concentrer sur mon jeu. Pour ce qui est du relationnel, je suis naturellement porté vers les autres donc tout devrait bien se passer. Seriez-vous prêt, si on vous le proposait, à porter de nouveau le brassard de capitaine de l'équipe de France ? Bien sûr.