Djokovic: "Etre un champion"

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Propos recueillis par Krystel ROCHE , modifié à
Tout auréolé de son premier titre à Wimbledon, Novak Djokovic s'est présenté avec un large sourire en conférence de presse. Le Serbe, qui sera n°1 mondial lundi, revient sur sa performance à Londres, son nouveau statut et ses rêves dans les prochaines années. Djokovic espère marquer l'histoire du tennis en remportant d'autres tournois majeurs.

Tout auréolé de son premier titre à Wimbledon, Novak Djokovic s'est présenté avec un large sourire en conférence de presse. Le Serbe, qui sera n°1 mondial lundi, revient sur sa performance à Londres, son nouveau statut et ses rêves dans les prochaines années. Djokovic espère marquer l'histoire du tennis en remportant d'autres tournois majeurs. Novak, que de chemin parcouru depuis ce saladier d'argent à Belgrade en décembre. Pouvez-vous nous raconter ce que vous avez vécu et ressenti ces derniers mois ? J'aimerais vous le dire, mais c'est vraiment dur à décrire. Franchement, si vous arrivez à trouver le meilleur mot qui soit pour décrire ce que je ressens, je suis preneur ! (sourire) C'est fantastique. J'ai atteint l'objectif de toute une vie, et j'ai rendu mes rêves réalité, le tout en l'espace de trois jours. C'est une sensation incroyable, que je ne pourrai jamais oublier. C'est le plus beau jour de ma carrière. N'importe quel athlète rêve d'être n°1 mondial. C'est ce qui nous motive tous. Donc lorsque tu y arrives, et lorsque tu sais que tu es à ton meilleur niveau, c'est juste un accomplissement fantastique. Aujourd'hui, vous remportez très facilement la 2e manche. Après ce 2e set, avez-vous commencé à être un peu nerveux, ce qui pourrait expliquer la perte du set suivant ? Qu'avez-vous pensé lorsque vous avez cédé le 3e set 6 jeux à 1 ? Je pense que je me suis relâché peut-être un peu trop au début du 3e. Je n'étais pas concentré. Bien sûr, quand tu affrontes un joueur comme Nadal, tu sais que s'il a la moindre opportunité, il la saisit et revient dans le match. Je ne voulais pas perdre ma concentration. Rafa a mérité de gagner ce 3e set, mais j'ai commis également pas mal de fautes directes. C'est un peu de ma faute s'il est revenu dans la partie... Dans le 4e, j'ai fait la course en tête du début à la fin. Il était important d'éviter le break. Vous aviez dominé Rafa en finale à quatre reprises cette saison. Cela a-t-il pesé aujourd'hui ? Probablement. J'avais ça en tête. J'ai essayé de me rappeler de ces matches, de jouer aussi bien, d'être agressif, de saisir les opportunités et surtout ne lui laisser aucune chance de prendre l'ascendant. Qu'avez-vous ressenti après cette balle de match ? Impossible de décrire ce que j'ai ressenti à ce moment là. Je crois que c'est la meilleure sensation jamais ressentie sur un court de tennis. Remporter Wimbledon, regarder vers mon box, y voir 20 personnes, les personnes qui me sont les plus chères, partager ce moment avec eux... C'était juste incroyable. "Wimbledon, le tournoi le plus important qui soit" Et lorsque vous vous êtes accroupi ? Lorsque j'ai mangé le gazon ? (sourire) Exactement ! Je me suis senti un peu... animal. (rires) Je voulais voir quel goût ça avait, et ce n'est pas mauvais ! (rires) ça m'est venu comme ça. Je ne saurais l'expliquer. Ça a été spontané, je n'avais pas prévu de faire ça ni quoi que ce soit. Vous avez livré aujourd'hui une copie impeccable... J'ai essayé de rester concentré sur chaque point. Et je ne pouvais pas laisser un champion comme Rafa revenir dans le match... C'est un battant, il n'abandonne jamais, mais j'ai réussi à rester concentré, stable émotionnellement quand il le fallait et j'ai joué mon meilleur tennis lorsque j'en avais le plus besoin. J'ai pris beaucoup de plaisir, vraiment. Tu dois savourer le moment présent. Mener en à peine une heure 2 sets à 0 face au champion en titre - qui n'avait plus perdu ici depuis 3 ans-, c'était juste incroyable. J'ai tout simplement essayé de profiter au maximum. Il s'agit clairement de mon meilleur match sur gazon. Disons que c'est arrivé au bon moment. Quelles sensations procure une victoire à Wimbledon ? Je ne peux pas parler au nom des autres joueurs, car chacun ses préférences. Mais je crois que la plupart des joueurs considèrent Wimbledon comme le tournoi le plus important qui soit. Vous avez quitté votre Serbie natal à l'âge de 12 ans. Pouvez-vous nous parlez de tous les sacrifices nécessaires pour arriver au sommet ? J'en parlais tout à l'heure dans le vestiaire avec ma famille et mon équipe. On se souvenait de tous ce travail effectué, des rêves que je pouvais avoir gamin... Un succès comme celui-là te ramène à ton enfance, à tout ce par quoi tu es passé pour en arriver là. Ça n'a pas été facile tous les jours, loin de là, mais j'imagine qu'il est nécessaire d'en baver et de se battre pour atteindre ses objectifs. Tout le monde connaît la situation de la Serbie. Il était extrêmement difficile de devenir joueur de tennis professionnel, sachant que le tennis n'était pas vraiment populaire dans notre pays, et surtout n'avait aucune histoire. Mais au final, c'est ce dont nous avions besoin. Ana Ivanovic, Jelena Jankovic, Janko Tipsarevic, Nenad Zimonjic: tous ont connu le succès ces dernières années. Nous sommes tous passés par des moments difficiles, c'est ce qui a fait de nous des joueurs plus forts. La Coupe Davis semble vous avoir libéré. Pensez-vous que sans ce titre à Belgrade, vous n'en seriez pas là aujourd'hui ? Après cette Coupe Davis, j'étais plein d'énergie, j'avais une envie incroyable de rejouer, de remporter d'autres tournois. Dans un sens, j'ai perdu ma peur. J'ai cru en mes chances plus que jamais. L'Open d'Australie 2011 a d'ailleurs été l'un des meilleurs tournois de ma carrière. "Je ne compte pas m'arrêter en si bon chemin" A quel point a-t-il été difficile de vous imposer alors que Nadal et Federer dominaient outrageusement le circuit ? Tout le monde connaît la carrière et le palmarès de Roger et Rafa. Nul besoin d'en dire plus. Ils ont été les deux joueurs qui ont le plus dominé le circuit ces cinq dernières années, ils ont gagné presque tous les Grands Chelems auxquels ils ont participé. Donc parfois, il était peut-être un peu frustrant d'atteindre les quarts, les demies ou les finales en Grand Chelem... et de tomber sur eux. Car c'est toujours à ce moment de la compétition qu'ils produisent leur meilleur tennis ! Mais ça t'apprend beaucoup, te permet d'évoluer et de progresser en tant que joueur et en tant que personne: tu dois trouver un moyen de passer outre la pression, les attentes et les problèmes que tu peux rencontrer. J'ai toujours cru que j'avais les qualités pour les battre, pour gagner des Grands Chelems. C'était la seule solution pour me retrouver un jour là où j'en suis aujourd'hui. J'ai le plus grand respect pour ces deux joueurs, pour tout ce qu'ils ont accompli. Chaque fois que je suis amené à les rencontrer, ce sont toujours de supers matches. Mais lorsque tu les joues, il faut garder un état d'esprit positif, se dire: "Je dois gagner ce match, ce n'est pas possible autrement". Vous déclarez avoir toujours cru en vous. Avez-vous néanmoins connu des moments de doute ? Après avoir gagné mon premier tournoi du Grand Chelem (Open d'Australie 2008, ndlr), j'ai dû faire face à des choses que je n'avais jusqu'alors jamais affrontées: défendre un titre majeur, être l'un des tous meilleurs, gérer la pression, les attentes, le fait que l'on s'attende à ce que tu ailles loin systématiquement lors des grands rendez-vous (au moins en demi finale)... Tout cela, je ne l'avais jamais vécu avant d'avoir 21 ans. Ces deux, trois dernières années, il y a des hauts et des bas. Des périodes de doutes, où je ne savais pas si j'y arriverais un jour... Rafa et Roger dominaient tellement !... Vous surfez actuellement sur le succès. Jusqu'où ? Je veux gagner encore d'autres Wimbledon, d'autres titres du Grand Chelem. C'est ce pour quoi je suis né. Je veux être un champion. Et je ne compte vraiment pas m'arrêter en si bon chemin, même si je viens d'accomplir les deux plus belles choses de ma vie en l'espace de trois jours... Vous êtes le nouveau n°1 mondial... Vous venez de remporter votre premier Wimbledon. Prochaine étape: la demande en mariage à votre compagne Jelena ? Oula.... Doucement !.... (rires)... Je viens à peine de gagner le tournoi. Pour ce qui est de ma vie privée, je garde ça pour moi (sourire). On verra plus tard... L'an prochain, Wimbledon et les Jeux Olympiques s'enchaîneront. Serez-vous présent sur les deux événements ? Bien sûr. Maintenant que je sais que je suis capable de bien jouer sur gazon (rires). Comment allez-vous célébrer cette victoire ? Comme les Serbes le font. C'est très difficile à expliquer (rires)... Nous rentrons dès demain à Belgrade, et nous fêterons ça là-bas. Je m'attends à un accueil fabuleux.