CYCLISME - Le directeur sportif de la Bbox-Bouygues Telecom réagit à "l'affaire Cancellara".Quelle a été votre première réaction en voyant ce reportage ?Abasourdi ! Je n'y croyais pas du tout, c'est un de mes assistants au siège de l'équipe qui m'a poussé à aller la voir, j'ai été stupéfait, je suis resté scotché devant l'écran ! C'est vraiment édifiant, comme reportage. Il y a le concepteur qui donne des détails, il y a un très beau film en 3D pour montrer comment est installé tout ça, ça mérite une grande enquête approfondie.La mise en cause de Fabian Cancellara vous semble crédible ?Je n'irai pas jusque là. Ce que je sais, c'est que dans le vélo, il y a des gens qui ont une petite vertu. Dans le passé, il y a eu énormément d'histoires, souvent avec les mêmes, donc ce que je sais que des gens capables de changer leur sang sont capables de mettre des piles dans un vélo. Je suis très prudent mais j'espère qu'il y aura des investigations.Aviez-vous été étonné par la performance de Cancellara sur le dernier Paris-Roubaix ?On en a tellement vu depuis des années... Ce qui m'a vraiment stupéfait, c'est le Mur de Grammont au Tour des Flandres. Il a déposé, nettoyé, remballé Tom Boonen ! Le Tour de Grammont, en général, ça se bascule à l'arrache, là, il y avait eu Cancellara et les autres.Ces histoires de vélo à moteur, vous en aviez déjà entendu parler ?Chez nous, il n'y avait pas de rumeurs, mais des blagues. On se disait que des gens déjà peu crédibles qui ont déjà fait plein de choses, capables de «s'entraîner dans le noir», en allant en Afrique du Sud ou au Mexique, ce qui nécessite des investissements lourds, sont capables, s'ils peuvent gagner avec autre chose de le faire. On avait évoqué le vélo électrique, on se disait en rigolant: "Le jour où ils feront des batteries dix fois plus petites, ils les mettront dans le tube." C'étaient des grosses blagues, mais on se rend compte que c'est devenu la réalité."Cette vidéo est une vraie base d'investigations"Cette histoire de "dopage mécanique" est encore un coup dur pour le vélo, non ?Nous, on vient de gagner une étape du Giro avec Johann Tschopp qui est un symbole pour le cyclisme propre, donc on reste optimiste sur l'avenir du vélo. Mais on sait qu'il y a des dirigeants à qui on ne serre pas la main car on risque de se salir les doigts...L'UCI semble décidée à instaurer des contrôles, c'est la solution ?Oui, c'est la bonne solution, ce dopage mécanique n'est pas possible s'il y a un contrôle. Donc l'inspection des vélos, ce n'est pas bien compliqué. Par contre, il faut vraiment intégrer une sanction disciplinaire énorme dans les règlements. Aujourd'hui, on n'attaque pas une banque facilement car derrière, il y a le pénal, on peut laisser plusieurs années de sa vie en prison. Si aujourd'hui, on peut piller ou voler avec une sanction qui est de deux ans sans être puni financièrement et avec le droit de revenir au bout de deux ans, on va continuer à attaquer les banques. Donc on doit radier définitivement ceux qui sont impliqués. L'avantage de ce dopage mécanique, c'est qu'il faut des complicités, il va falloir parler sérieusement à tous ceux qui sont impliqués et leur dire que ça va leur coûter un paquet d'années de sanction. En revanche, l'UCI ne semble pas prête à enquêter sur ce qui s'est passé en amont, faut-il essayer d'en savoir plus ?Je pense que cette vidéo est une vraie base d'investigations, il faut s'en servir. Dans le reportage, ils parlent du système depuis 2004, du coup, on peut tout supposer, s'imaginer qu'il y a eu quelques avions de chasse...