Viré pour avoir voulu diffuser "Merci patron! : un salarié débouté aux prud'hommes

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avec AFP , modifié à
Après avoir fait l'éloge du documentaire de François Ruffin, et convié des syndicats à le diffuser, un employé avait été licencié en mars dernier. 

Licencié pour "faute grave", après  avoir suggéré une projection du documentaire Merci patron!. C'est ce qui est arrivé, en mars dernier, au salarié d'un sous-traitant de Renault. Cet homme de 34 ans avait convié les syndicats du site Renault où il travaillait, à Guyancourt, dans les Yvelines, à diffuser ce film relatant la lutte d'un couple d'ouvriers licenciés contre leur ex-employeur, Bernard Arnault (LVMH), à l'occasion de la première Nuit debout. Saisi en référé, le conseil des prud'hommes de Versailles l'a débouté vendredi. 

La faute grave confirmée. La formation de référé du conseil de prud'hommes de Versailles "prend acte que la partie demanderesse reconnaît que, sur la forme, la procédure de licenciement pour faute grave n'est pas entachée d'irrégularité ; dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des chefs de la demande", stipule la décision du conseil. Les prud'hommes ont également rejeté la demande des syndicats CGT et Sud appuyant la requête du sous-traitant. 

Dans un mail envoyé depuis son domicile, le 15 mars, cet ingénieur d'études en mission longue sur le site de Renault au moment des faits avait convié les organisations syndicales du site à diffuser le documentaire de François Ruffin. Aussitôt alerté par Renault, le PDG d'Eurodecision, son employeur, indiquait à l'ingénieur lors d'un entretien informel qu'il "avait fait une grosse bêtise", que Renault "surveillait les mails de ses syndicats" et qu'"en tant que prestataire extérieur, il ne devait pas s'adresser aux syndicats de Renault". 

Mis à pied, puis viré. L'ingénieur avait alors été mis à pied à titre conservatoire et prié de quitter le site. Mais le trentenaire parle alors du contenu de cet entretien à Fakir, journal alternatif fondé par François Ruffin et pour lequel il est bénévole. Tout en prenant soin de ne citer aucun nom dans l'interview qu'il accorde. Le 21 avril, il est licencié par Eurodecision pour faute grave.

Pour son avocate, Marie-Laure Dufresne-Castets, comme pour les syndicats CGT et SUD, l'ingénieur, aujourd'hui au chômage, n'avait fait que "dénoncer une infraction pénale : la violation du droit syndical" par le constructeur automobile Renault. A l'audience du 1er juillet dernier, elle avait donc réclamé 50.000 euros pour son client à titre d'indemnité provisionnelle pour le préjudice subi. 

Eurodecision, représenté par Me Charlotte Moreau, avait estimé au contraire que la faute grave était caractérisée, l'ex-employé ayant "violé son obligation de loyauté et de bonne foi" vis-à-vis de son employeur et niant toute "atteinte manifeste à la liberté syndicale".