Violences gynécologiques : "La majorité des phénomènes de violences sont sous-estimés"

Dans son "Livre noir de la gynécologie", Mélanie Dechalotte dénonce des pratiques dont les femmes parlent de plus en plus ouvertement.
Dans son "Livre noir de la gynécologie", Mélanie Dechalotte dénonce des pratiques dont les femmes parlent de plus en plus ouvertement. © AFP
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C.O. , modifié à
Pour Mélanie Déchalotte, journaliste et auteur du "Livre noir de la gynécologie", invitée jeudi sur Europe 1, "beaucoup de victimes de violences obstétricales se taisent ou n'ont pas conscience que ce qu'on leur fait n'est pas normal".
INTERVIEW

Mauvaise préparation des femmes à l'accouchement, gestes brutaux, poses de stérilet douloureuses, épisiotomies trop fréquentes… La journaliste Mélanie Déchalotte a longuement enquêté sur des violences, souvent passées sous silence, dont les femmes sont victimes dans certains cabinets de gynécologie, à l'hôpital ou en clinique. Dans son "Livre noir de la gynécologie", elle dénonce ces pratiques dont les femmes parlent de plus en plus ouvertement. "Jusque-là les femmes en parlaient entre elles", explique Mélanie Déchalotte dans Europe midi. "Mais l'usage des réseaux sociaux et la médiatisation a permis que ces récits soient largement diffusés et partagés à grande échelle".

"On ne sait rien non plus sur la nécessité réelle ou supposée des actes". Selon la journaliste, qui a recueilli de nombreux témoignages dans son ouvrage, il ne s'agit pas de cas exceptionnels comme l'assurent certains médecins. "Les enquêtes sur les actes médicaux ne donnent qu'une photographie statistique de ces pratiques, donc on sait combien de ces actes sont pratiqués, mais on ne sait pas dans quelles conditions. On ne sait rien non plus sur la nécessité réelle ou supposée des actes. Il n'y a aucune enquête scientifique fiable sur le phénomène en France", souligne-t-elle. 

La plupart des victimes se taisent. "Mais on a quand même des indices pour mesurer l'ampleur du phénomène. On sait que la majorité des phénomènes de violence sont sous estimés car les victimes se taisent ou elles n'ont pas conscience que ce qu'on leur a fait n'est pas normal. Et puis il y a des associations d'usagers qui montrent que beaucoup de progrès sont à faire en terme d'informations et de consentement des patientes", étaye la journaliste pour qui ces témoignages pourraient n'être "que la partie émergée de l'iceberg". 

Un problème de prise de conscience et de formation. Toutefois la journaliste apporte un peu de nuance à son propos, assurant que selon elle la majorité des soignants sont bien intentionnés. "Tous n'ont toutefois pas conscience que leurs actes peuvent être traumatiques pour les femmes. Et puis il y a aussi certains soignants qui peuvent faire preuve de brutalité, ne pas être soucieux de la douleur chez la femme qu'ils examinent", ajoute Mélanie Dechalotte. "En France, on forme de bons techniciens. Mais on ne les forme pas assez à la relation soignant-soigné."