Travaux d'intérêt général : les communes toujours réticentes à accueillir les condamnés

© KENZO TRIBOUILLARD / AFP
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Martin Feneau, édité par A.H.
Pour lutter contre la surpopulation en prison, Emmanuel Macron propose de développer les travaux d'intérêt général. Mais les collectivités sont-elles prêtes à accueillir les condamnés ?
L'ENQUÊTE DU 8H

Emmanuel Macron veut créer une agence des travaux d'intérêt général. Un moyen de lutter contre la surpopulation carcérale, estime-t-il. L'enjeu est de trouver des structures pour accueillir les condamnés dans des associations, ou des collectivités territoriales, lorsqu'elles sont volontaires. Mais dans les faits, ce n'est pas si simple.

Quelques communes ouvertes à l'accueil des condamnés. À Montataire, dans l'Oise, la mairie accueille une vingtaine de détenus chaque année. Là, les condamnés tondent la pelouse du stade ou ramassent les détritus. Farid, employé de la ville, les encadre. "On a malheureusement reçu beaucoup de jeunes en errance, des toxicomanes, des gens qui ont des problématiques psychologiques. Dans notre collectivité, ça se passe très bien. Mais il y en a d'autres, autour de nous, où ça ne se passe pas si bien", note-t-il.

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Les structures ont peur de la figure du délinquant

La crainte des collectivités. Le travail des condamnés, qui fait office de sanction, n'est pas rémunéré. Pourtant, élus et responsables associatifs sont réticents à s'inscrire dans cette démarche. Sylvain Lhuissier, délégué général de l'association de l'association Chantiers-Passerelles, tente de les rassurer. "Les structures ont peur de la figure du délinquant. Elles se demandent à quoi va ressembler la personne qu'elles vont accueillir dans leurs services, et si elles sont à même de les gérer. Il y a un travail à faire pour déconstruire ces appréhensions."

Les magistrats pour des peines "plus éducatives". Preuve que ces appréhensions ont la vie dure, seules 3.800 communes offraient des postes de travail d'intérêt général en 2011, selon les chiffres du ministère de la Justice, soit une commune sur dix. Et depuis, le nombre de peines prononcées n'a pas beaucoup évolué, regrette Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des magistrats. Selon elle, "les magistrats souhaiteraient prononcer des peines plus éducatives. Mais si vous savez qu'il n'y a pas de sociétés ou de mairies prêtes à accueillir les personnes condamnées à des travaux d'intérêt général, on ne les prononce pas."

La justice sanctionne alors par une peine de sursis, ou une amende. L'an dernier, un peu plus 25.000 peines de travail d'intérêt général ont été prononcées par les tribunaux.