Sarkozy mis en examen : "rien ne permet de remettre en cause l'impartialité" des juges

Nicolas Sarkozy a été mis en examen par trois juges d'instruction (photo d'archives).
Nicolas Sarkozy a été mis en examen par trois juges d'instruction (photo d'archives). © JOEL SAGET / AFP
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Les trois magistrats instructeurs, dont Serge Tournaire, font l'objet de critiques à droite depuis la mise en examen de Nicolas Sarkozy. "Une diversion", selon le secrétaire national de l'USM.
INTERVIEW

 

"Je ne suis pas juge ni procureur, mais il y a visiblement un acharnement, incompréhensible". Le propos, dans la bouche du chef de file des députés LR Christian Jacob, n'est pas isolé. Depuis le début de la garde à vue de Nicolas Sarkozy, finalement mis en examen dans le dossier du financement illégal présumé de sa campagne électorale de 2007, nombre de ses soutiens dénoncent une obstination de la justice à l'encontre de l'ex-président. "Les Républicains ont le sentiment que tous les élus ou anciens élus ne subissent pas le même traitement, selon qu'ils appartiennent à telle ou telle famille politique", a publiquement regretté le parti de l'ancien chef de l'État.

La présidente du Front national Marine Le Pen est elle allée plus loin, mercredi, allant jusqu'à mettre en cause la "neutralité" de l'un des magistrats instructeurs, Serge Tournaire, qui avait déjà mis Nicolas Sarkozy en examen dans l'affaire Bygmalion et instruit également le dossier Fillon. Un magistrat "engagé, comme d'autres juges d'instruction qui sont saisis d'affaires qui touchent à des politiques, dans un soutien au syndicat de la magistrature", ce qui "pose un vrai problème sur le fond" selon elle. Interrogé par Europe1.fr, le secrétaire national de l'Union syndicale des magistrats (USM), Jacky Coulon, ne partage pas cet avis.

Comment sont désignés les juges d'instruction dans ce type d'affaires ?

C'est le président du tribunal, en l'occurrence le tribunal de grande instance de Paris, qui désigne les magistrats instructeurs. Il y a généralement un planning de permanences, établi par ce même président, mais il a le droit d'y déroger pour nommer tel ou tel juge. C'est aussi lui qui décide du nombre de magistrats nommés, en fonction du dossier. Il peut y en avoir un seul, ou plusieurs : trois dans cette affaire. Cela peut être encore davantage : dans le dossier des attentats du 13-Novembre, pas moins de six juges d'instruction ont été désignés.

Le fait que le juge Tournaire instruise un deuxième dossier impliquant Nicolas Sarkozy s'explique donc essentiellement par des questions de calendrier ?

On constate que ça tombe toujours sur lui en ce moment, c'est vrai. Mais il faut se souvenir que pendant un temps on disait pareil de Renaud Van Ruymbeke…. Au pôle financier, ils ne sont pas très nombreux : forcément, ce sont toujours un peu les mêmes. En revanche, il est important de noter deux choses. D'abord, le juge Tournaire n'est pas seul, et doit composer avec deux autres magistrats. Et surtout, cette "équipe" n'est pas la même que dans l'autre affaire impliquant Nicolas Sarkozy.

Les critiques sur le caractère "partial" des magistrats et en particulier du juge Tournaire ne vous semblent donc pas fondées ?

À ma connaissance, aucune prise de position ou aucun engagement public ne les justifie. Et quand bien même : un magistrat a le droit d'avoir des opinions personnelles, et le devoir de faire la part des choses. Rien n'est de nature à remettre en cause leur impartialité. Ces critiques ressemblent davantage à une diversion, un argument pour parler d'autre chose que du fond du dossier.

D'autres commentaires portent sur le recours au régime de la garde à vue pour interroger Nicolas Sarkozy, puis son placement sous contrôle judiciaire…

Sur la garde à vue, il n'y a pas de débat : elle s'imposait. C'est un régime protecteur, qui permet à la fois aux enquêteurs de garder quelqu'un à disposition le temps de son audition, et à la personne auditionnée de se préparer et d'être assistée de son avocat. Il a pu préparer ses réponses. Quant au contrôle judiciaire décidé après la mise en examen, on ne sait pour l'instant pas quelles obligations il implique. Nicolas Sarkozy peut notamment se voir interdire de communiquer avec les autres mis en cause, ou être restreint dans ses déplacements.

La question qui se posera alors, c'est : "que cherchent les juges ?". À l'empêcher de se concerter avec d'autres personnes ou d'exercer des pressions ? À prévenir une éventuelle fuite ? Quoi qu'il en soit, cette décision est susceptible d'appel. Les avocats de Nicolas Sarkozy peuvent la contester.