"Mi-bas", "complot" et "fusil à pompe" : aux assises, Georges Tron pointe l’ombre de ses ennemis politiques

Georges Tron était entendu pour la première fois sur le fond du dossier, lundi aux assises.
Georges Tron était entendu pour la première fois sur le fond du dossier, lundi aux assises. © THOMAS SAMSON / AFP
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Maintenant ses dénégations, l’ancien secrétaire d’Etat, accusé d’agressions sexuelles et de viols, a assuré aux assises que son procès était "la pire période de (sa) vie", lundi. 

Pour parler des faits, Georges Tron n'évoque qu'un mot : "calomnies". Les viols et agressions sexuelles qui lui sont reprochées par deux de ses anciennes collaboratrices ne sont d'ailleurs presque pas évoqués par la cour plongée dans la pénombre, en cette deuxième moitié d'après-midi. "Puisque vous niez, on va passer vite", pose le président. Grand et droit à la barre, l'édile hoche la tête mais n'est pas sorti d'affaire. Costume noir, chemise blanche, Georges Tron répond tant bien que mal à la question que tout le monde se pose : pourquoi tant de gens veulent-ils lui nuire ? 

"Je n'ai jamais essayé de passer pour un saint". Car au cours de l'instruction puis devant les assises de Seine-Saint-Denis, les témoins se sont succédé pour brosser l'image, qu'il jure fausse, d'un homme multipliant les conquêtes sous couvert, parfois, de réflexologie plantaire. Lui reconnaît une seule relation extra-conjugale, avec une ancienne hôtesse de l'air. "Je n'ai jamais essayé de passer pour un saint", démine-t-il. "Cette affaire m'a conduit à voir toute ma vie personnelle étalée sur la place publique. Je ne me flatte pas d'avoir trahi la confiance de mon épouse."

Cet état de fait posé, Georges Tron passe à l'attaque, parfois avec le ton d'un politique face à un journaliste. "Permettez moi de rappeler un peu de contexte, si vous le voulez bien. En mai 2011 (lorsque les plaintes sont déposées, ndlr), je démissionne de mon poste de secrétaire d'Etat et je passe mes journées dans un état de délabrement total. Ma femme et mon fils sont dévastés. Je me retrouve en garde à vue, je suis déféré et toutes sortes d'idées me passent par la tête. Mais très rapidement, je décide de me battre." 

"Pas dix personnes, pas cent, mais bien plus". Impassible, le président tourne les pages de son dossier et énumère, une à une, les noms des femmes venues dire devant la cour qu'elles avaient eu des relations sexuelles avec l'accusé. Ont-elles toute menti ? "Je peux vous expliquer, pour chacune", assure Georges Tron. Une collaboratrice qui affirme avoir été sa maîtresse ? "Intelligente, mais avec pour seul défaut d'avoir une vie personnelle extraordinairement diverse et aucune limite, d'aucune nature." Lucile M., son ancienne assistante parlementaire, qui l'accuse aujourd'hui de trois agressions sexuelles ? Une femme "touchante", dont le mari "n'était pas à la hauteur" et qui "a vraisemblablement commencé à avoir des contacts avec ces gens..." 

"Ces gens", ce sont les membres du "complot" politique dénoncé par la défense, autour, notamment, des frères Jacques et Philippe Olivier, proches de la famille Le Pen. C'est le cas d'une femme, qui affirme que l'accusé lui aurait proposé d'essayer un mi-bas "révolutionnaire" pour lui toucher les pieds : "une adversaire politique", balaye Georges Tron. Mais aussi de son ancienne suppléante à l'Assemblée nationale, qui a déclaré qu'il lui arrivait de faire du pied aux femmes sous la table : "j'ai eu deux différends avec elle", esquive le maire. 

"A partir du moment où les plaintes ont été rendues publiques par la presse, tout le monde pouvait s'engager dans cette brèche", résume finalement l'édile face à la cour attentive. "Dans ma vie politique, ce ne sont pas dix personnes, pas cent personnes, mais bien plus avec qui je suis entrée en contentieux."

"Profondément dérangé et complètement d'extrême-droite". "J'ai sans doute été imprudent de ne pas comprendre que la réflexologie pouvait être exploitée", déroule Georges Tron. Une grande partie de ceux qui m'ont vu comme un réflexologue m'ont ensuite vu comme un pervers, et ça c'est insupportable. Dans la salle des assises de Bobigny, où le procès a été organisé en raison de la stature publique de l'accusé dans l'Essonne, la phrase fait mouche et quelques "c'est sûr" fusent. Sur les bancs du public, les soutiens du maire sont serrés comme des sardines. 

Mais le président tourne encore quelques pages du dossier d'instruction. Quid de ce Monsieur, qui a déclaré que l'accusé avait attrapé le pied de sa femme sous la table lors d'un dîner ? "Il est profondément dérangé et complètement d'extrême-droite. Il y avait des fusils à pompe et des grenades dans ses toilettes." Cette ancienne assistante, qui affirme avoir entendu des relations sexuelles en groupe dans le bureau du maire ? "Je n'ai jamais eu dans ma vie sexuelle de scène à trois, à quatre ou au-dessus. Jamais." 

L'effet "catalogue" des accusations n'échappe pas au principal intéressé, qui commente : "Passer trois semaines de procès à entendre des gens qui me doivent quasiment tout venir m'insulter comme ils m'ont insultés, c'était la pire période de ma vie." "Pensez -vous que vous pouvez être un homme qui fait peur au point qu'on ose pas lui dire non ?" tente alors le président. L'accusé marque le temps d'arrêt le plus long d'une séance de questions-réponses menée du tac au tac. "J'ai eu des centaines et des milliers d'employés au fil du temps, je m'entends merveilleusement bien avec la majorité d'entre eux. Autrement dit, 98% des agents sont mes amis. Les 2% qui restent sont partis et c'est très bien ainsi."